Développer des compétences émotionnelles chez les enfants

réguler l'agressivité, l'anxiété et l'impulsivité enfants

Lawrence Cohen, pédopsychiatre spécialisée dans la parentalité ludique et l’anxiété des enfants, écrit : “Le jeu est le moyen dont disposent les enfants pour s’exprimer, eux et leurs émotions.

L’intelligence émotionnelle suppose la capacité de moduler ses émotions, plutôt que les évacuer n’importe quand et comment, ou que les étouffer. Développer l’intelligence émotionnelle des enfants revient à leur apprendre à :

  • exprimer ce qu’ils ressentent sans mettre en danger qui que ce soit (ni eux ni leur entourage) mais avec franchise et respect pour les personnes et l’environnement (le matériel, les objets, les végétaux, les animaux…);
  • ne pas enfouir leurs émotions;
  • les libérer au moment opportun et de la manière opportune (par exemple, exprimer sa colère envers la bonne personne, au moment où la colère est ressentie et sans taper, crier ni insulter).

En tant que parents, nous aimerions que nos enfants se dépêchent et parviennent maintenant à l’ultime stade de leur développement, celui où on est capable de mettre des mots sur ce que l’on ressent. Chaque chose en son temps ! – Lawrence Cohen

 

Le développement de l’intelligence émotionnelle peut passer par plusieurs canaux :

  • montrer l’exemple et être honnêtes à propos de ce que nous ressentons nous-mêmes,
  • rester calmement près de l’enfant pendant qu’il relâche la soupape, sans chercher à influencer son état d’esprit mais en étant juste présent,
  • enseigner à identifier les sensations physiques qui annoncent et accompagnent les émotions,
  • donner le vocabulaire adéquat pour mettre des mots sur les émotions,
  • demander régulièrement aux enfants ce qu’ils ressentent, ce qu’ils imaginent que les autres ressentent,
  • pratiquer l’écoute empathique (plus de détails ici),
  • accueillir les larmes des enfants sans les censurer avec des mots du type “Tu pleures comme une fille” ou “Pleure, tu pisseras moins”,
  • jouer et stimuler l’imagination.

C’est sur ce point que Lawrence Cohen insiste dans son livre Qui veut jouer avec moi ? Selon lui, beaucoup d’émotions que les enfants ressentent sont trop intenses pour que de simples mots en rendent compte. Les enfants ont parfois besoin de pleurer, de tempêter et le jeu peut leur fournir une échappatoire.

citation jeu enfant

10 idées pour réguler l’agressivité, l’anxiété et l’impulsivité par le jeu

Lawrence Cohen propose plusieurs pistes pour développer l’intelligence émotionnelle par le jeu. Cette étape intermédiaire de transposition des émotions par le jeu est cruciale.

1. Jouer en tant qu’adultes à faire semblant de ressentir une émotion que l’enfant peine à exprimer, avant de la traduire en actes qui ne portent préjudice à personne (aller courir dehors, frapper un coussin, crier dans une boîte à cri, respirer profondément, sauter…) : “je suis furieux, je vais frapper mon oreiller“, “je suis tellement énervée que j’ai envie de cracher, je vais courir dehors pour me défouler“.

2. Imaginer des personnages (poupées, légo, marionnettes…) en proie à de nombreuses émotions et demander aux enfants ce qu’ils ressentent selon eux

intelligence émotionnelle jeu

 

 

3. Demander à l’enfant de dessiner ce qu’il/elle ressent (“tu pourrais dessiner les monstres de ton cauchemar ?“, “dessine ta colère jusqu’à ce qu’elle disparaisse, tu as le droit de déchirer la feuille et d’appuyer fort avec ton crayon“)

4. S’exprimer par la danse (“si les papillons dans ton ventre dansaient, à quoi ressemblerait leur ballet ?“)

5. Raconter une histoire à partir des émotions ressenties (par exemple : “montre moi à l’aide de ces personnages ce qui s’est passé et ce que tu as ressenti“, “on dirait qu’on va chez le dentiste“, “imaginons un jeu à partir du film d’hier, il fichait vraiment la trouille“)

6. Proposer une poupée souci (voir le principe ici)

7. Jouer à des jeux de chahut (pour en comprendre les bénéfices, lire cet article : 10 règles pour faire des jeux de chahut des moyens de renouer le contact et redonner confiance à l’enfant)

8. Inventer des jeux à base d’interdictions absurdes pour permettre à l’enfant de jouer autour des limites : “pas le droit de rire !“, “pas le droit de respirer !“, “pas de le droit de cligner des yeux !“. Quand l’enfant enfreint ses limites, mimer la colère et imaginer une scène loufoque de réprimande.

9. Utiliser la répartie et l’humour pour soulager la frustration : “L’un de nous deux a besoin de crier. Tu veux que je m’en charge ? Je suis sûre que je peux crier plus fort que toi.“, “La moutarde monte au nez de tout le monde. Si nous faisions semblant de glousser jusqu’à éclater de rire pour de bon ?“, “On fait une bataille de pouce ?

10. Aider les enfants à gérer leur frustration en jouant à “Jacques a dit” : l’enfant sera d’abord le donneur d’ordres puis le suiveur.

Parce que nous inhibons la libre expression de leurs émotions, la plupart des enfants ne se sentent pas en droit de manifester leur chagrin, leur terreur ou leur rage. D’un autre côté, ils ne parviennent pas à les garder en eux. Ce qu’ils ressentent se traduit par des pleurnicheries, de la jalousie, de l’ennui, de la solitude, des maux de ventre et autres maladies psychosomatiques. Notre mission de parents consiste à aider nos enfants à évacuer plus franchement leurs émotions, en particulier par le biais du jeu et d’une intimité partagée. – Lawrence Cohen


Source : Qui veut jouer avec moi ? de Lawrence Cohen (éditions PocheMarabout). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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