L’éducation bienveillante, tellement plus que ce à quoi on voudrait la réduire…

L'éducation bienveillante, tellement plus que ce à quoi on voudrait la réduire...

Dans le cadre d’un atelier, j’ai réfléchi à une manière d’introduire l’éducation bienveillante/positive/non violente de manière concise et efficace.

Je me suis questionnée sur ce que j’avais vraiment envie de retenir et de transmettre au sujet de l’éducation telle que je l’envisage. Au final, je trouve que les mots qui définissent le mieux l’éducation telle que je la conçois sont

  • l’éducation consciente (pour ne pas subir notre histoire et nous laisser guider automatiquement par les croyances relatives à ce que devrait être l’éducation),
  • l’éducation créative (dans le sens où il n’y a pas “une” bonne manière de faire mais une philosophie, une manière de penser à incarner qui se traduisent dans une souplesse d’esprit et une capacité d’adaptation, en fonction de sa personnalité de parent et de l’âge, du caractère et des besoins de chaque enfant),
  • l’éducation ludique (dans le sens où le rire et le jeu sont des moyens utiles pour créer une atmosphère familiale chaleureuse, qui nourrit les besoins affectifs de chacun et qui permet de diminuer les tensions, sans pour autant chercher à éviter tout conflit ou à être en permanence zen),
  • l’éducation respectueuse (des enfants et des adultes : être un parent bienveillant ne signifie pas être un “paillasson” et le droit à l’erreur vaut autant pour les adultes que pour les enfants).

La priorité y est donnée à la relation : l’éducation telle que je la conçois s’inscrit dans une manière de penser, qui se traduit également dans les choix de vie quotidiens au-delà de l’éducation (choix professionnels, alimentation, engagement associatif, instruction…).

Etre un parent conscient est une tâche lourde parce qu’on est amené à changer notre manière de voir le monde, les relations, l’environnement, soi-même, l’école, le travail… L’éducation bienveillante/positive est un vrai chemin de développement personnel et relationnel. Ce n’est pas juste remplacer NON par STOP ou utiliser des consignes positives pour faire “obéir” les enfants. C’est une philosophie avant d’être une boîte à outils.

J’ai tiré de ces réflexions les quatre principes d’éducation qui me guident au quotidien.

4 principes d’éducation efficaces

1. Quels sont mes objectifs à long terme ?

Réfléchir sur nos objectifs à long terme pour nous et nos enfants, c’est être aligné, c’est répondre à des questions sur soi :

Qui suis-je ?

Qu’ai-je envie d’incarner ? 

Quelles sont mes valeurs ?

Qu’est-ce que j’ai envie que mes enfants incarnent comme valeurs ? 

Quel est le sens de ma vie ?

Quel exemple ai-je envie de donner ?

Quelle est mon éthique personnelle ?

Est-ce que je me donne le droit de faire des erreurs ?

Quels sont mes schémas de comportement répétitifs (quand je crie, je m’énerve…) ? 

Est-ce que je donne le droit à mes enfants de pouvoir dire oui et de pouvoir dire non ?

Quels mots ou quelles phrases nous viennent à l’esprit pour décrire ce que nous voudrions que nos enfants deviennent quand ils seront plus grands ?

Est-ce que nos actes sont cohérents avec ce que nous désirons réellement ?

Nos pratiques quotidiennes ont-elles une chance d’aider nos enfants à devenir les personnes que nous aimerions qu’elles soient ?

Ce que nous disons à nos enfants au supermarché, lors des repas ou des couchers contribue-t-il à les rendre heureux, équilibrés, indépendants, épanouis (ou tout autres objectifs à long terme que nous nourrissons pour eux) ?

Si ce n’est pas le cas, que devons-nous faire à la place ?

Répondre à ces questions permet de donner corps et âme aux outils d’éducation positive. Ce travail sur soi est un pilier essentiel avant de redéfinir l’autorité et de faire autrement dans la pratique. L’éducation positive/bienveillante/ non violente/ consciente/ respectueuse/ créative/ ludique (quelle que soit le nom qu’on lui donne) est une philosophie et un chemin de développement personnel; ce n’est pas une accumulation d’outils et de méthodes pour se faire « obéir » sans crier.

Les meilleurs parents n’hésitent pas à regarder en eux-mêmes et à ne pas se ménager dès lors qu’il est question de réfléchir à l’éducation de leurs enfants. Je ne veux pas dire par là qu’il faut vous consumer de culpabilité ou vous sentir incompétent; il arrive qu’on verse dans l’auto critique excessive (ou la critique contre-productive).

Plus vous vous connaissez vous-même, plus vous comprendrez en quoi vos besoins et votre vécu (par exemple : ce qui vous met en colère et pourquoi ?) affectent votre façon d’agir avec vos enfants, plus vous avez de chances de vous améliorer.

Ne cessez pas d’être gêné si vous trouvez gênantes certaines des choses que vous faites. – Alfie Kohn

 

2. Chaleur et structure sont compatibles.

On peut être ferme sur le comportement et souple sur les émotions. Haïm Ginott écrit même que c’est la base de l’éducation bienveillante : dire qu’on a envie de taper et le faire n’est pas la même chose !

Si on veut améliorer le comportement, il faut d’abord s’occuper des émotions ajoute-t-il. On peut le faire à travers l’accueil des émotions et l’écoute active.

Dans l’écoute active, le parent essaie de comprendre ce que ressent l’enfant, de saisir ce que son message veut dire. Ensuite, le parent transforme sa compréhension dans ses propres mots et retourne le message à l’enfant pour vérification.

Le plus important pour le parent est de transmettre son propre message « décodé » sans évaluation, sans opinion, sans conseil ni raisonnement ou encore analyse. Il retourne seulement ce qu’il pense être le sens véritable du message de l’enfant : rien de plus, rien de moins.

L’objectif de l’écoute active est d’aider l’enfant à en dire plus, à approfondir, à mieux développer sa pensée.

citation éducation

Lire aussi : Fermeté et bienveillance sont compatibles : la preuve !

 

3. L’empathie est la clé.

Comprendre les émotions, les besoins et les raisons qui poussent un enfant à agir comme il le fait aide à faire preuve d’empathie. Cela nécessite forcément de se documenter sur les étapes du développement des enfant, sur la psychologie de l’enfant, sur ses besoins moteurs/ physiologiques/ affectifs…

A quoi mon enfant dit-il oui quand il me dit non à moi ?


citation catherine gueguen

Ainsi, savoir que le cerveau de l’enfant est immature permet de ne pas attribuer de volonté de manipulation aux enfants; raisonner en termes d’attachement permet de comprendre pourquoi les enfants sont plus “pénibles” avec leurs parents qu’avec les personnes moins proches; connaître les étapes du développement moteur de l’enfant permet de lui faire des demandes adaptées à ses capacités; comprendre la différence entre une émotion primaire (à accueillir) et une émotion parasite (une décharge de stress) permet de conserver une attitude bienveillante plutôt que s’énerver…

Lire aussi : 5 raisons qui peuvent expliquer les comportements inappropriés des enfants

 

4. On résout les problèmes de manière constructive.

Thomas Gordon parle de résolution de problème gagnant-gagnant. L’idée est de trouver des solutions qui satisfassent les besoins des uns et des autres et de continuer à considérer les enfants comme faisant partie de la solution plutôt que du problème.

Chaque conflit est vu comme une occasion d’apprendre et de progresser.

citation thomas gordon

Les 6 étapes de la méthode sans perdant :

  1. Première étape : identifier et définir le conflit
  2. Deuxième étape : énumérer les solutions possibles
  3. Troisième étape : évaluer les solutions énumérées
  4. Quatrième étape : choisir la solution la plus acceptable
  5. Cinquième étape : établir les moyens d’appliquer la décision
  6. Sixième étape : réviser et réévaluer la décision

Si une solution n’est pas trouvée, il vaut mieux persévérer que d’imposer une décision unilatéralement :

  • continuer à parler,
  • retourner à la 2° étape et trouver d’autres solutions possibles. « Avons-nous fait le tour de toutes les solutions possibles ? »,
  • suspendre la séance et reprendre une nouvelle conversation plus tard,
  • voir s’il n’y a pas d’autres problèmes cachés qui empêchent de trouver la solution.

Si les ententes ne sont pas respectées, il sera nécessaire de confronter l’enfant au non respect de son engagement avec des messages je sans menaces ni jugement. « Je suis déçu de voir que tu n’as pas accompli la tâche que tu avais promis de faire ». En fonction de la réaction de l’enfant, plusieurs scénarios sont possibles :

– reconsidérer le problème et revenir à la recherche de solutions plus efficaces

– proposer de l’aide à l’enfant pour qu’il se souvienne de ses engagements (un minuteur ? un message dans la cuisine ? une affiche dans sa chambre ?)

– réaffirmer les besoins par des messages je (« Je suis à bout. Avec ta mère/ ton père, nous soulevons un problème qui nous préoccupe et tu te dérobes. Je crois que tu n’as aucune considération pour nos besoins. Je n’aime pas ça et je trouve cela inacceptable. Nous voulons régler ce problème tout de suite. Nous ne voulons pas te faire perdre mais nous n’allons pas non plus perdre pour te laisser gagner. Je pense que nous pouvons trouver une solution qui nous permettra tous d’être gagnants, mais nous ne pouvons pas le faire si tu ne viens pas t’asseoir à table avec nous. Maintenant, est-ce que tu voudrais bien revenir à la table afin que nous puissions essayer de trouver une bonne solution ?« )

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La lecture de mon livre La co-éducation émotionnelle : s’élever en même temps qu’on élève les enfants (éditions Hatier) vous donnera des pistes pour raisonner autrement face aux comportements des enfants qui nous mettent en difficulté (avant de chercher à plaquer des astuces et conseils au risque de constater que “l’éducation positive, ça ne marche pas”). Il est disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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