5 conséquences néfastes de la fessée utilisée comme “méthode” éducative

5 conséquences néfastes de la fessée

Des croyances éducatives traditionnelles affirment que les fessées n’ont pas de conséquences néfastes, qu’elles ont au contraire des vertus éducatives et servent à faire filer l’enfant droit. Pourtant, les fessées sont loin d’être anodines, elles sont même nocives bien que leurs conséquences néfastes aient tendance à être minimisées. Le déni de la réalité est un mécanisme de défense.

Les personnes qui défendent la valeur éducative de la fessée justifient à la fois les coups reçus (je l’avais bien mérité, ça m’a remis dans le droit chemin, j’en suis pas mort, je ne suis pas traumatisé) et les coups donnés (mon enfant m’avait cherché, il me teste, il a besoin de limites, si vous aviez le même enfant que moi, vous ne pourriez pas faire autrement que moi de toute façon).

Cette résistance est dûe à plusieurs facteurs :

  • nous sommes beaucoup à avoir reçu des fessées et nous reproduisons ces gestes
    • par imitation 
    • par « fidélité » : comme il nous est impossible de se dire que nos parents nous ont fait mal sous couvert de l’amour, nous sommes dans le déni du mal que nous avons ressenti et du mal que nous faisons subir à nos propres enfants quand ils reçoivent une fessée
  • la grande majorité des parents actuels et de nos parents ont utilisé ou utilisent la fessée.

Brigitte Oriol, psychothérapeute, dit que ce n’est pas très glorieux de se découvrir maltraitant et que cela nous renvoie en situation du passé. Un parent qui donne la fessée et qui entend le discours anti-fessée pourtant scientifiquement fondé et dénué de jugement moral se sent pris en faute. Les discours anti-fessée se heurtent souvent à des personnes contrariées ou vexées qui ne pourront rien retenir des arguments car elles se mettent en position de défense, tel un enfant pris en faute.

Brigitte Oriol dresse 5 conséquences néfastes de la fessée utilisée comme méthode éducative :

1. Dysfonctionnement du système émotionnel

L’éducation par la violence éducative ordinaire, et notamment la fessée, n’éduque pas mais crée des blocages émotionnels car l’enfant est obligé de se couper de ses émotions, de son monde interne. Il apprend à faire dysfonctionner son système émotionnel.

L’enfant ne pourra plus se fier à ses sentiments, ses émotions et ses sensations puisqu’il aura entendu qu’il n’a aucune raison de pleurer pour si peu, que par contre son parent va lui donner une bonne raison de pleurer, qu’il n’a pas mal après être tombé, qu’il n’a pas le droit d’avoir envie de bonbons…

L’enfant perd la réceptivité à ses signaux d’alerte qui sont censés le guider dans sa vie : il perd sa boussole. Si l’enfant apprend que les sentiments et les émotions n’ont aucune importance et qu’il faut obéir aux adultes dans tous les cas, les résistances intérieures et profondes, de même que les intuitions, seront ignorées par l’enfant en cas de danger sans adulte référent “qui sait mieux ou qui sait pour lui”.

2. Apprentissage de la violence comme un modèle de relation sain

Quand on interagit avec violence (physique ou verbale) avec un enfant, l’enfant enregistre cette violence comme un mode de relation bon et sain. Ce mode de relation ne peut être que bon puisque ce sont ses parents qui le lui ont offert. L’enfant ne peut pas s’imaginer que ses parents lui font du mal puisqu’ils lui font croire que cette violence est pour son bien. Ce serait trop douloureux pour l’enfant de se rendre compte que ses parents sont capables de lui faire du mal et de constituer un danger pour lui.

Quand l’enfant emmagasine trop de stress, il va devoir le relâcher à un moment et notamment avec des plus faibles qui lui font moins peur que ses parents.

3. Répercussions dans la vie adulte

  • Expressions psychosomatiques

Les situations d’impuissance ou de danger du passé peuvent se retrouver dans le présent de l’adulte, par exemple dans des expressions psychosomatiques. Un enfant qui a été enfermé dans un placard enfant et qui a refoulé ce souvenir (il ne s’en rappelle pas de manière consciente une fois arrivé à l’âge adulte) peut souffrir de claustrophobie dans l’âge adulte sans comprendre l’origine de cette phobie. Un adulte à qui les parents ont répété avec dureté “on ne répond pas à ses parents” pourra souffrir de sidération chaque fois que quelqu’un l’intimide.

Voici le processus qui empêche à une violence ou une menace d’être encodée et traitée par le cerveau comme une situation autobiographique : le cerveau ne peut pas décoder ce qui se passe quand on vit une agression.

violence éducative ordinaire

  • La violence comme seul mode d’expression et de communication

Dans une crise de violence, on peut devenir aussi méchant que nous avons eu peur face aux agressions des adultes qui nous entouraient enfants. On attend le moindre faux pas de l’autre (enfants, conjoint, amis, collègues, connaissances virtuelles…) pour décharger sur eux tout ce que l’on a accumulé jadis sans rien dire.

Brigitte Oriol affirme que plus on est capable de s’énerver contre nos enfants, plus on a eu peur enfants, plus on s’est senti en danger avec nos propres parents (ou toute autre personne qui s’est occupé de nous enfants). On va maquiller cette violence en amour ou en nécessité d’éduquer et c’est ce maquillage qui va permettre de prôner l’éducation à la baguette.

4. Perte des repères innés nécessaires à une vie équilibrée

Brigitte Oriol cite 3 repères innés nécessaire à la survie et à une vie équilibrée qui sont perturbés par une éducation par la fessée (et tout autre forme de VEO) ;

  • Le besoin d’attachement

Les êtres humains sont programmés pour chercher la proximité d’un adulte autour d’eux en situation de détresse pour les rassurer tout au long de leur vie (bébé, enfant, adolescent et même une fois adulte, nous recherchons autour de nous compréhension, soutien et contact en cas de problème).

La satisfaction du besoin d’attachement joue un rôle fondamental dans notre perception de la relation à l’autre (j’ai confiance en l’autre en cas de problème) et dans la construction de notre estime de soi (j’ai de la valeur, je peux m’affirmer sans m’imposer).

  • La sauvegarde

En cas de stress, nous sommes programmés pour plusieurs options : s’immobiliser (faire le mort pour ne pas attirer l’attention), fuir ou attaquer. C’est grâce à la production d’hormones dans notre organisme (adrénaline et cortisol) que ces comportements de survie sont déclenchés. Or un enfant tapé ou menacé par ses parents ne peut ni prendre la fuite, ni se défendre. Les hormones déchargées dans l’organisme deviennent alors inutiles et attaquent l’organisme vu qu’elles ne peuvent pas jouer leur rôle normal (voir le schéma ci-dessous : risque de crise cardiaque).

  • L’imitation

Le cerveau comporte des neurones miroir qui s’activent quand nous observons quelqu’un agir. Quand les neurones miroir s’activent, le cerveau a l’impression que nous sommes nous-mêmes en train de faire l’action, pas seulement la regarder.

Quand l’enfant voit ses parents taper, ses neurones miroir s’activent. Frapper un enfant, c’est d’abord lui apprendre à frapper.

5. Une société empreinte de violence et amputée de liens empathiques

Ce sont donc bien les coups, les humiliations, les punitions ou encore l’isolement qui pervertissent la nature bonne de l’enfant. C’est toute la société qui paie le prix de la violence éducative ordinaire, que ce soit par le manque d’affirmation de soi de certains individus ou au contraire leur rigidité, par la violence comme mode de relation, par l’apparition de problèmes psychosomatiques, ou encore par la transformation de certains individus perturbés en criminels.

La violence éducative ordinaire fabriquent de véritables handicaps relationnels qui nous empêchent certains de se défendre dignement quand ils en ont besoin, d’autres de garder leur sang froid ou encore de s’exprimer avec affection avec les autres.

 

>>> Des alternatives pour élever les enfants sans fessée :

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Pour aller plus loin :
La fessée – Questions sur la violence éducative de Olivier Maurel (éditions La Plage)

Châtiments corporels et violences éducatives-Pourquoi il faut les interdire en 20 questions réponses de Muriel Salmona (éditions Dunod)

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