Favoriser le jeu comme alternative aux comportements agressifs des enfants de 1 à 6 ans

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Sylvie Bourcier écrit dans son livre L’agressivité chez l’enfant de 0 à 5 ans:

Demander à un enfant d’être immobile et sage, c’est nier son besoin d’activité motrice et exutoire qui lui est nécessaire. C’est oublier l’enfant pour répondre au besoin de tranquillité des adultes. L’éducation consiste donc à canaliser cette énergie vers des activités ou des gestes acceptables.

Le jeu peut alors être mis au service du développement des habiletés sociales : on réorientera les actions des enfants vers des actions ludiques qui permettent d’assouvir leurs besoins et pulsions de manière acceptable. Le jeu sera alors une occasion de moduler l’agressivité, de modérer les élans moteurs et de maîtriser le geste. Mobiliser positivement l’énergie de l’enfant devient possible.

-> Pour les 1-2 ans

Sylvie Bourcier les appelle les “petits trottineurs”. Les enfants de cet âge doivent trouver satisfaction dans les jeux d’exploration (fouiller, transvaser, toucher, observer, manipuler) et les jeux moteurs (grimper, glisser, courir, sauter, pousser, tirer, lancer).

-> Pour les 3-6 ans

Les enfants de 3-6 ans exercent leurs petits et leurs grands muscles dans les mêmes types de jeux (exploration et moteurs), mais aussi dans les jeux de construction et de “faire semblant” (jouer à la maman, au docteur…).

l'enfant est une boule d'énergie

6 manières d’utiliser le jeu pour canaliser l’agressivité des enfants

1. Un enfant tire les cheveux d’un autre enfant

Alternative :

  • Offrir une brosse pour peigner une poupée

2. Un enfant transporte des objets défendus et/ou dangereux.

Alternatives :

  • Proposer à l’enfant de transporter des objets non cassables à la place
  • Jouer au jeu du déménagement avec des boîtes récupérées et de vieux objets
  • Offrir à l’enfant des objets cassables rien qu’à lui (comme un petit service à thé en porcelaine)

3. Un enfant se promène dans la maison avec des rollers/ patins à roulettes ou des chaussures onéreuses/ que son frère ou sa soeur ne veut pas lui prêter

Alternatives :

  • Utiliser des boîtes de papier mouchoir comme patins ou comme bottes d’astronautes
  • Proposer des vieilles pantoufles/ chaussettes pour faire des glissades

4. Un enfant tape les autres enfants

Alternatives :

  • Réorienter le geste vers des objets qu’il est possible de taper : des percussions (tambourin, xylophone, castagnettes…), des casseroles (ou, version moins bruyante, des boîtes en plastique)…
  • Offrir des jeux qui reproduisent le geste de taper (comme la chasse aux taupes, le jeu du marteau ou alors des activités de bricolage, de jardinage)

chasse taupejeu marteau motricité fine

5. Un enfant joue avec l’eau au moment de la toilette/ du lavage de main/ de la cuisine

Alternatives :

  • Offrir à l’enfant la possibilité de jouer avec l’eau dans un endroit réservé à cette fin (c’est ce que j’ai fait avec ma fille : elle a une bassine et des bouteilles en plastique sur le balcon qu’elle peut remplir à sa guise et qui peuvent déborder sans risquer de tâcher ou d’inonder l’appartement)
  • Prolonger le temps du bain afin de répondre aux désirs d’explorer l’eau (ici, je laisse ma fille jouer dans la douche une fois l’eau éteinte avec des récipients en plastique qu’elle a remplis au préalable)

6. Un enfant crie dans la maison

Alternatives :

  • Proposer à l’enfant de jouer sur les modalités de sa voix (ton et force) : “chuchote comme si tu voulais garder un secret, rugis comme le lion, parle avec une voix hachée de robot, ris comme le Père Noël, barris comme un éléphant…
  • Faire le rugissement du tigre quand on joue dehors

On pourrait utiliser ces mêmes alternatives pour un enfant qui court dans l’appartement quand il y a des voisins en dessous :

  • Courir le plus vite possible (comme un guépard) et le plus bruyamment possible (avec des pas d’éléphant) quand on joue dehors
  • Marcher comme un astronaute dans l’appartement (avec des grands pas comme si on flottait) ou comme un patineur (en glissant tout en souplesse)
  • Jouer au jeu du ralenti (activité tirée du livre 35 activités pour développer l’attention de votre enfant de Gilles Diederichs) :
    • « Action ! » Tu es comme un tigre et tu bondis de rocher en rocher !
    • « Stop ! » Tu es un koala tout tendre et qui mange une feuille d’eucalyptus.
    • « Action ! » Tu es le tigre qui vient d’apercevoir le koala, tu veux le manger et tu t’élances !
    • « Stop ! » Tu es le koala qui tente de s’échapper et tu as peur.
    • « Action ! » Tu es le tigre qui a perdu de vue le koala, tu regardes en avant, en arrière et sur les côtés !
    • « Stop ! » Tu es le koala qui va se cacher sous une souche d’arbre
    • « Action ! » Tu redeviens un tigre qui doucement va s’asseoir pour se reposer.
    • « Stop ! » Tu es le koala tout content de s’être échappé.

D’autres pistes dans le même esprit :

  • Quand un enfant lance des objets défendus, proposer une séance de lancer de doudous (l’enfant les lance, le parent les rattrape et les lui relance… ici, on a un signe avec une longue queue qu’on aime s’amuser à faire tournoyer avant de lancer);
  • Quand un enfant veut écrire sur les murs ou le canapé, offrir une zone en expression libre (des chutes de carton, de tissus, de nappe en papier/ des galets/ des feuilles mortes/ du papier d’aluminium…).

peindre sur différents supports

Et les jeux de bataille et de chahut ? 

Certains jeux de bataille (où les enfants se poursuivent, se poussent et se bousculent), les corps à corps et les jeux avec des personnages/ animaux menaçants réduisent l’agressivité du jeune enfant en facilitant le passage de gestes agressifs à leur expression symbolique.

Sylvie Bourcier écrit

Bien que ces comportements semblent parfois contenir un élément d’agressivité, il est important de ne pas confondre avec une conduite agressive. Le jeu combatif offre la possibilité à l’enfant d’exprimer des émotions fortes, de pratiquer la maîtrise de soi, en modulant et refrénant ses gestes et en négociant des rôles. Dans l’imagination de l’enfant, le jeu combatif prend forme dans le “faire semblant”.

Cependant, inutile de nier que les batailles dégénèrent quand les enfants s’excitent trop. Le rôle de l’adulte est alors de stopper le jeu et d’aider les enfants à prendre conscience que ce n’est plus un jeu amusant quand on se fait mal ou quand on fait mal aux autres (en détail ici).

Les jeux de chahut sont aussi une occasion pour nous de renforcer le lien avec nos enfants et de leur montrer comment canaliser leur agressivité. Il y a un jeu que nous adorons avec ma fille : elle a une épée et j’ai un ruban de gymnastique rythmique. Je dois alors attraper son épée en l’enroulant dans mon ruban. Quand j’arrive à l’attraper, elle doit venir la chercher sans que je la “saucissonne” à son tour :-). C’est un jeu qui l’aide à dépenser son énergie et à modérer ses élans.

Non seulement vous aiderez le petit à maintenir son attention, à canaliser son énergie et à partager ses émotions avec vous, mais vous aurez aussi le plaisir de cultiver un lien et de maintenir le rapprochement en découvrant son monde. – Sylvie Bourcier 

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A lire pour comprendre les gestes des enfants et se doter de pistes d’action pour canaliser et mobiliser positivement l’énergie des enfants : L’agressivité chez l’enfant de 0 à 5 ans de Sylvie Bourcier aux éditions CHU Sainte Justine (disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet)

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