4 étapes de l’accompagnement des émotions de l’enfant (par Isabelle Filliozat)

Isabelle Filliozat écrit :

L’enfant a besoin de l’accompagnement de l’adulte pour ne pas être envahi et débordé par ses affects, pour canaliser son énergie, pour apprendre à exprimer ses besoins de manière socialement acceptable, pour savoir qu’il ne court pas de danger en se laissant aller à ce qu’il ressent. Pas question donc de le laisser seul avec ses émotions quand il n’a pas encore les outils mentaux pour gérer efficacement ce qu’il vit. Plutôt que laisser les enfants seuls aux prises avec leurs monstres intérieurs, nous pouvons être là. Les parents ont la responsabilité de la sécurité affective des enfants.

L’enfant a besoin de sentir la solidité de ses parents lorsqu’il vit une émotion et il a besoin de les voir eux aussi traverser des émotions, même fortes, sans être détruits.

Au fur et à mesure que l’enfant grandit, le parent se retire. 

 

L’écoute des émotions de l’enfant passe par une écoute empathique : refléter ce que nous entendons dans ce que vient de dire l’enfant, percer ce qui sous-tend les paroles prononcées par l’enfant, écouter la résonance émotionnelle dans ce que l’enfant dit, se mettre à sa place.

citation isabelle filliozat

 

1. Accueillir non verbalement par le regard

L’attitude intérieure est plus importante que les mots employés. Être présent dans la respiration, dans l’attitude intérieure peut parfois suffir, et est quoiqu’il en soit une condition à une écoute émotionnelle efficace.

Une reformulation parfaite peut être inefficace si elle ne vient pas du cœur, si elle n’est pas chargée d’empathie.

par le regard est confirmé le plaisir mutuel qui circule entre deux êtres citation jacques salomé

2. Mettre des mots sur le ressenti

Respecter les émotions des enfants sans entrer dans un jeu de pouvoir : “je vois que tu es en colère”

Reformuler sans juger, sans commenter ni intervenir : “oh, tu es triste”, “tu n’en as pas envie du tout”

Accueillir l’émotion en respectant les nuances vécues par l’enfant : “tu as eu peur !”

Écouter avant de consoler : “je vois que tu as mal”

Écouter de l’intérieur ce que l’enfant est en train de vivre : “Tu hésites. Qu’est-ce que tu sens ?”

Valider le vécu : “tu as le droit de ne pas avoir envie, c’est vrai, tu préfèrerais continuer à jouer, je peux comprendre ça”

 

3. Permettre à l’émotion d’aller jusqu’à sa résolution

L’émotion est une structure en 3 étapes :

  • la charge : quand ça monte à l’intérieur, quand on ressent les sensations corporelles liées à l’émotion (gorge sèche, rythme cardiaque qui s’accélère…)
  • la tension : on utilise l’énergie de l’émotion dans une action, une parole, un comportement
  • la décharge :  le moment où l’on pleure, crie, tremble… La décharge n’est que la 3° partie de l’émotion, c’est l’étape qui permet le retour au calme.

Quand on est face à un enfant, il s’agit alors de ne pas empêcher cette 3° étape qui est souvent confondue avec l’émotion elle-même. L’enfant a besoin de se décharger pour ne pas rester en tension. Comme cette tension n’est plus utile, elle doit pouvoir sortir du corps en s’extériorisant.

Par exemple, pleurer fait du bien suite à un choc, à une peur, à une douleur, même suite à une forte joie. Dire « ne pleure pas » revient à dire « Garde ta douleur à l’intérieur de toi ».

Au contraire, on pourrait encourager les enfants à pleurer :

« Vas y, pleure un bon coup parce que, quand on pleure un bon coup, ça dure quelques secondes et ça s’arrête. Les émotions sont des états, elles sont temporaires. Comme quand le soleil et la pluie s’alternent. »

« Pleure, pleure fort si tu en as besoin, serre-moi et pleure, tu as mal ! »

 

4. Place à l’échange en paroles quand le calme est revenu

Isabelle Filliozat nous conseille d’éviter les questions qui commencent par “Pourquoi ?”, comme “pourquoi tu pleures ?” ou “pourquoi tu as peur ?”.

Nous pourrions plutôt demander :

«Qu’est-ce qui s’est passé ? »

« Qu’est-ce que tu as ressenti ? »

 

 

Quand l’écoute des émotions nous parait infaisable

L’écoute empathique n’est pas nécessaire en toutes circonstances pour expliquer en permanence les comportements de l’enfant. Elle est en revanche très utile pour aider les enfants à sortir d’une situation coincée ou pour accompagner un événement douloureux.

Cette écoute empathique risque de nous mettre en contact avec nos propres émotions, de réveiller des manques ou encore des détresses de notre propre passé. Quand les émotions des enfants nous exaspèrent ou réveillent de la violence en nous, plusieurs hypothèses sont possibles :

  • nous sommes épuisés
  • nos besoins sont en compétition avec ceux des enfants
  • l’émotion de l’enfant n’en est pas une : c’est une émotion secondaire, qui dissimule la vraie émotion et s’exprime de manière disproportionnée
  • c’est une émotion que nous ne nous permettons pas (et qu’on ne nous a pas permise d’exprimer dans notre enfance)
  • cela nous rappelle des souvenirs douloureux de notre propre enfance que nous ne voulons pas revivre

Une seule voie pour pratiquer une réelle écoute empathique des enfants : guérir notre propre enfance, affronter nos nœuds affectifs, écouter notre enfant intérieur et lâcher nos propres émotions.

Voici quelques ressources pour y parvenir :

5 étapes pour guérir son enfant intérieur

Aimer notre enfant intérieur dans nos relations avec nos enfants pour leur offrir amour et soutien inconditionnels

Colère, culpabilité, émotions : 3 exercices pour travailler sur notre histoire en tant que parents

 

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Source : Au coeur des émotions de l’enfant d’Isabelle Filliozat (éditions Poche Marabout). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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