Adoucir la pression d’être parent solo : des pistes avec la discipline positive pour les familles monoparentales

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Jane Nelsen, auteure du livre La discipline positive, a également écrit un livre pour accompagner les parents solos (dont je fais partie) dans l’éducation de leurs enfants. Elle y propose de nombreuses pistes pour mettre en place ou poursuivre une démarche éducative bienveillante à la suite d’une réorganisation familiale (séparation, décès, éloignement professionnel d’un parent…).

Elle consacre un chapitre entier à la manière de se “tisser un filet de sécurité” pour assurer les ressources nécessaires quand les angoisses et la pression seront trop présentes, voire paralysantes dans le quotidien.

Gérer le stress financier

Comment ne pas céder à la panique face aux questions d’argent même si l’on sait pertinemment que la panique et la peur court-circuitent fréquemment notre aptitude à résoudre les problèmes de façon constructive ? Jane Nelsen écrit :

Sans honte, l’art consiste à savoir demander de l’aide quand on en a besoin. Si c’est nécessaire, on peut chercher de l’aide auprès des services publics (aide au logement, aides à la formation professionnelle, associations d’aide pour les denrées alimentaires, pour les vêtements, pour les activités sportives…). Et si l’orgueil nous freine, on peut simplement se dire que peut-être un jour, on sera dans la position d’aider quelqu’un d’autre qui en a besoin.

Prendre le temps d’identifier qui pourrait faire partie d’un réseau de soutien n’est pas une perte de temps :

  • personnes ressources (assistantes sociales, technicien d’intervention sociale et familiale…)
  • organismes
  • associations
  • services municipaux (les mairies ont la compétence pour répondre aux questions concernant les aides disponibles)
  • famille/ amis

Se rapprocher d’autres parents solos qui sont dans la même situation peut à la fois apporter un soutien moral et organisationnel. Pourquoi ne pas envisager une colocation et/ou un système de garde avec un autre parent solo ? Par exemple, quatre parents solos peuvent s’organiser pour se partager la garde de tous leurs enfants une journée par week-end.

Pour entrer en contact avec d’autres parents solos proches géographiquement, plusieurs pistes sont envisageables :

Pour ma part, nous avons mis en place un roulement avec des mamans de l’école de ma fille : je prends les filles à manger un midi de la semaine (jeudi) et une autre maman les prend un autre midi (mardi) et, avec une autre maman, on fait une semaine sur deux (je prends les filles à manger un vendredi midi sur deux et l’autre vendredi, elles mangent là-bas). Il arrive aussi fréquemment qu’on récupère les filles des unes ou des autres le soir après l’école pour qu’elles jouent ensemble un moment.

 

S’ouvrir, se lancer dans une logique de développement personnel

La victimisation et la colère sont mauvaises conseillères. – Jane Nelsen

L’amertume empêche de s’extraire des pensées négatives et limite ainsi les démarches constructives. Cela peut prendre un certain temps mais il est libérateur de travailler sur soi afin de sortir petit à petit du rôle de victime et de transformer son sentiment de colère. L’énergie peut alors être investie à trouver des solutions aidantes et à prendre soin de soi.

Les livres sur la motivation ou les témoignages d’autres personnes ayant vécu des situations similaires avec succès sont parfois sources d’inspiration pour s’ouvrir à de nouvelles expériences et accueillir de nouvelles perspectives. Une séparation peut être l’occasion de se retrouver soi-même, de suivre ses envies et ses rêves. De nombreux parents solos reprennent leurs études ou décident de se reconvertir professionnellement (pour des raisons qui peuvent être variées : mieux gagner sa vie, avoir plus de temps pour les enfants, s’accomplir personnellement…).

Pour ma part, j’ai “profité” de la séparation d’avec le papa de ma fille pour me reconvertir professionnellement. J’ai quitté mon emploi de cadre bien rémunéré sur une rupture de contrat conventionnelle pour passer le concours de recrutement de professeurs des écoles. J’ai par ailleurs beaucoup travaillé sur moi (et m’engager dans l’éducation bienveillante a été un vrai chemin de développement personnel), à travers des livres, des conférences, des moments d’introspection.

Le premier été où ma fille est partie 3 semaines en vacances avec son papa, j’ai pris mon sac à dos et je suis partie seule une semaine en Autriche. Ce fut une expérience formidable : me retrouver dans un pays étranger que j’avais toujours voulu visiter a été l’occasion de faire le point sur moi-même, d’accomplir un rêve que j’avais laissé de côté lors de ma relation, d’affronter un défi (partir seule) et aussi de ne pas déprimer seule chez moi !

Par ailleurs, j’ai intégré l’association des parents d’élèves de l’école de ma fille. Cela m’a permis de sympathiser avec plusieurs parents et de créer un petit réseau d’amis plus ou moins proches. J’ai également décidé de rejoindre le collectif Colibris de mon département afin de m’intégrer dans le tissu local et associatif de ma région. Je pense que c’est également important de montrer aux enfants que nous ne sommes pas forcément isolés en tant que parents solos et que nous pouvons nous engager pour des causes qui nous tiennent à cœur, qu’on peut être acteurs de changement.

>> Pour aller plus loin, je vous invite à consulter la rubrique Développement personnel du blog.

 

Mettre la casquette d’un bon gestionnaire

Nous vivons dans une époque d’abondance et de matérialisme. Certains soucis financiers sont moins liés au fait d’être un parent solo qu’au fait de se retrouver entrainé dans une société de consommation sans avoir nécessairement les qualités de gestionnaire requises pour ne pas vivre au dessus de ses moyens. – Jane Nelsen

La réalité impose au parent solo de réduire son train de vie pendant une certaine période ou de ne pas céder aux tentations dans l’immédiat :

  • moins (ou pas) de sortie au restaurant ou au cinéma
  • un budget vacances mûrement réfléchi
  • pas de grosse dépense ou d’investissement immobilier

Jane Nelsen écrit que l’attitude positive du parent face à son budget et son aptitude à enseigner la capacité à attendre, permettent aux enfants d’acquérir des aptitudes de vie. Même si, sur le moment, les frustrations ne sont pas faciles à gérer, les enfants développent souvent bien plus de compétences à “faire sans” qu’à vivre dans l’abondance.

Pour ma part, nous ne sommes pas parties en vacances cet été : nous avons tout de même eu la chance de partir 3 jours à l’océan lors d’un pont de Mai car une de mes amies nous y avait invitées. Pour économiser sur le trajet en voiture, j’avais pris de covoitureurs sur Blabla Car! Ce fut une très bonne idée : ma fille a beaucoup apprécié de pouvoir discuter avec eux et je crois qu’eux-aussi y ont trouvé du plaisir :).

Par ailleurs, nous passons énormément de temps dehors : nous restons une à deux heures dehors tous les soirs après l’école et il y a toujours à faire (grimper, sauter, escalader, construire des cabanes, glisser, ramasser des feuilles/ fleurs/ glands, marcher…). Nos loisirs se font à peu de frais mais je me rends compte que ma fille sait s’occuper et imaginer à partir de pas grand-chose. Hier, je discutais avec une maman devant l’école et son fils (du même âge que ma fille) est venu plusieurs fois la voir pour se plaindre qu’il n’y avait rien à faire et qu’il s’ennuyait. Finalement, ses occupations à partir de rien sont une force pour ma fille.

En ce qui concerne les livres et les jeux/ jouets, nous allons régulièrement à la médiathèque et surtout à la ludothèque (on y reste en général les mercredis après-midis jusqu’à la fermeture et on peut y emprunter des jouets et jeux).

Jane Nelsen ajoute :

La croyance que nous n’avons pas assez d’argent pour satisfaire nos besoins peut générer un sentiment de manque qui nous pousse à compenser par des dépenses non prioritaires. Modifier sa perception de manque est une chose compliquée, mais reconnaître que l’on adopte parfois une attitude irréfléchie est la première étape du changement.

J’ai adopté un train de vie réaliste, en phase avec mon budget. Pour cela, je m’inspire de la philosophie Zéro Déchet. Il existe également de nombreux groupes privés sur Facebook (par exemple : Gestion budgétaire, entraide et minimalisme) ou des blogs consacrés à la gestion d’un budget (par exemple : L’accro du budget ou Zen et organisée).

Il existe un certain nombre d’autres sujets que les parents solos devraient prendre le temps d’analyser mais qu’ils négligent souvent :

  • la rédaction d’un testament
  • les économies pour financer les études supérieures
  • une assurance vie
  • la préparation de la retraite

La plupart des communes proposent l’aide d’avocats, des consultations légales à faible coût et des conseillers financiers. Je sais que ma commune propose par exemple une mutuelle à bas prix pour tous les habitants. Vous pouvez vous renseigner en mairie.

Bien entendu, notre bonne volonté sera mise à l’épreuve. Les tentations sont tellement nombreuses et les messages publicitaires proposent constamment des produits que nous n’avons pas encore. Nos enfants sont inévitablement attirés par les marques que portent leurs copains. Ce sera aussi pour nous une opportunité de les aider à développer leur référentiel interne, à penser par eux-mêmes plutôt que de se limiter à adopter les valeurs des autres. – Jane Nelsen

Nous pouvons apprendre à porter un regard de gratitude sur ce que l’on possède. En ce qui me concerne, cela fait plus d’un an et demi que je ne me suis pas acheté de vêtement. Je m’en suis rendue compte la semaine dernière en discutant avec une autre maman : j’ai eu du mal à me souvenir du dernier vêtement que je m’étais acheté… Pourtant, ce n’est pas un manque. Idem pour la télé : nous sommes restées 6 mois sans télé car la mienne est tombée en panne et je n’avais pas les moyens de la réparer. Mes parents ont fini par m’en racheter une… mais je me suis rendue compte qu’elle est restée éteinte toute cette semaine ! Nous ne l’utilisons de toute façon que pour les DVD et quelques émissions (comme On n’est pas que des cobayes) et je suis sûre que le fait que ma fille ne soit pas exposée aux pubs joue dans le fait qu’elle réclame peu de marques, de jouets ou tout autre produit marketing.

 

Apprendre à s’appuyer sur les autres et construire un réseau de soutien

Il existe des façons de construire un système de soutien pour se sentir aidé.e au quotidien :

  • regarder ce qui existe en matière d’ateliers de parentalité bienveillante, voire de parents solos (ateliers Faber et Mazlish, Gordon, Filliozat, Discipline Positive…)
  • demander de l’aide lorsqu’on en a besoin (et abandonner le mythe du “héros solitaire”)
  • conserver des liens solides avec la famille élargie (les grands parents, les oncles, les tantes, les autres membres de l’ex belle famille… Pour ma part, je sollicite régulièrement les grands parents paternels de ma fille : elle a passé une semaine de vacances au camping seule avec son papi qui est à la retraite cet été… je suis sûre que cela lui fera des souvenirs formidables plus tard : son papi pour elle toute seule pendant une semaine :) !)
  • dégager du temps pour ses amis (et aborder avec les personnes qui nous aiment ce que nous traversons et ressentons)
  • rechercher des organismes ou des groupes de soutien (les cafés Peps par exemple, des forums sur internet…)
  • rester en lien avec l’autre parent des enfants quand cela est possible (co-parentalité saine et centrée sur l’enfant)

Pour ma part, j’utilise le processus de la Communication Non Violente avec le papa de ma fille. Récemment, nous avons eu un conflit car ma fille ne voulait plus passer du temps avec lui en semaine (elle y allait les mardis soirs pour manger avec lui). Je suis restée centrée sur elle : on parlait de ses besoins, de ses émotions à elle, de sa demande. J’ai refusé de répondre à ses attaques verbales par d’autres attaques, je me suis contentée de lui répéter la demande de notre fille et d’exprimer mes besoins à moi (besoin de soutien, d’aide, d’une relation sereine entre lui et moi). J’en ai été affectée car certains de ses mots ont été durs, mais il a fini par s’excuser au téléphone deux jours plus tard. Il s’était senti rejeté par sa fille et souffre de la voir peu. Nous avons ensuite pu discuter calmement et il a admis que cette solution était satisfaisante en maternelle (pas de devoirs) et quand il n’y avait pas d’école le mercredi matin (il y a 3 ans quand nous avons mis ce système du mardi soir en place) mais que c’était devenu trop fatiguant pour elle et pour moi dorénavant.

Être un parent solo peut faire peur. On se sent l’unique responsable de ses enfants, de leur bien-être, de leur bonheur. On pense parfois qu’on devrait toujours savoir quoi faire, mais c’est bien loin d’être le cas. Une force que l’on peut développer, c’est d’avoir le courage de risquer une chute, d’apprendre que l’on peut échouer et survivre tout de même. Parfois on est plus fort que les expériences que l’on traverse.

La perfection n’est pas requise ! – Jane Nelsen

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La discipline positive pour les parents solos de Jane Nelsen, Cheryl Erwin et Carol Delzer (éditions Poche Marabout) est disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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