Comment aider utilement les enfants dans leur construction et leurs apprentissages ?

aider utilement les enfants

Le passage sur la manière d’aider utilement les enfants m’a beaucoup interpellée dans le livre “Appliquer la pensée Montessori chez soi“. J’avoue que je suis encore beaucoup dans le schéma : “faire à la place pour gagner du temps”, surtout les matins d’école.

Par ailleurs, nous ne sommes que 2 à la maison puisque je suis maman solo et ma fille enfant unique. Jusqu’à maintenant, je lui demandais rarement de débarrasser son assiette après manger. Cela ne me venait même pas à l’idée car débarrasser seulement 2 assiettes ne me gêne absolument pas finalement. Or Emmanuelle Opezzo écrit que si nous pensons faire à la place du petit enfant des tâches qui nous paraissent ingrates ou désagréables par amour, il y a fort à parier que, lorsque nous estimerons qu’il est en âge de le faire, il considérera cette tâche comme une contrainte ou une punition. C’est le cas pour ma fille de 6 ans : quand je lui demande de débarrasser la table depuis quelques temps, elle rechigne.

Emmanuelle Opezzo ajoute que si nous avons toujours valorisé ces actions par la coopération, en faisant ensemble en famille, ces gestes du quotidien (comme mettre la table ou la débarrasser, beurrer les tartines, essuyer la table…) seront considérées comme une simple routine.

Prenons conscience que c’est dans la petite enfance que se construit l’adolescence, puis l’adulte. – Emanuelle Opezzo

Appliquer la pensée Montessori chez soi

Aider et faire à la place : synonymes ?

On considère qu’il est normal d’aider un enfant, dans le sens de faire à sa place. On a tendance à faire à la place de l’enfant sans même se poser la question (parce que l’enfant est trop petit, trop maladroit, trop lent, trop fragile…).

Or c’est dans la nature de l’enfant de ne pas aimer être aidé. L’enfant aime faire tout seul pour apprendre et se construire. Laisser l’enfant faire tout seul, c’est l’aider dans son processus d’apprentissage par l’expérience : il a l’opportunité d’apprendre à faire, de pratiquer, de se tromper et de recommencer pour se perfectionner.

Une aide utile n’est donc pas synonyme de “faire à la place”. Quand nous faisons quelque chose que notre enfant sait déjà faire à sa place ou quand nous empêchons notre enfant d’apprendre à faire tout seul, nous entravons son développement naturel. Aider utilement l’enfant, c’est le faire seulement quand il est en difficulté, s’il est d’accord pour être aidé et en montrant plutôt qu’en faisant à la place.

Si l’enfant se débrouille seul, aidons-le en le laissant faire tout seul.– Emanuelle Opezzo

Pour autant, limiter nos interventions ne veut pas dire laisser l’enfant faire tout et n’importe quoi. Quand l’enfant se met en danger, s’excite au point de s’énerver, manque de respect (aux autres, au matériel, aux règles de vie) ou montre de la peur, notre intervention est justifiée.


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2 types d’interventions inutiles

Les interventions physiques

Emmanuelle Opezzo cite 3 (mauvaises) raisons qui nous poussent à ôter un objet des mains de l’enfant, à le soulever ou l’asseoir sans le prévenir, à faire à sa place, sans lui demander son avis ni prendre le temps de l’observer :

  • nous sommes pressés

En tant qu’adultes, nous faisons plus vite (et mieux).

  • nous nous focalisons sur le résultat (plutôt que sur le processus)

Nous voulons des choses bien faites (ou mieux faites que ce que l’enfant a lui-même réalisé). C’est alors un perfectionnisme mal placé, la honte ou la peur du jugement d’autrui qui nous pousse à une aide inutile, voire humiliante.

  • nous avons peur

Avoir peur peut être justifié mais on pourra très bien communiquer sur cette peur et rappeler les règles de sécurité plutôt qu’empêcher un enfant. Si la peur est irrationnelle, on risque de transmettre une peur personnelle non justifiée à l’enfant et entraver la volonté de l’enfant.

Les interventions verbales

Nous sommes habitués à ponctuer les actions de nos enfants de jugements :

  • positifs (c’est bien, bravo, super, c’est beau….)
  • négatifs (attention, c’est mal, c’est trop, non pas comme ça…)

Plutôt que des des jugements sur les résultats, nous pourrons alors porter notre attention sur :

  • le processus (c’est beaucoup d’efforts/ de travail, tu y as mis beaucoup de détermination/ tu as essayé tout seul…)
  • la description de ce que l’enfant a fait (je vois telle et telle couleur/ telle et telle forme…)
  • les sentiments de l’enfant, ce qu’il pense de son action (tu es content de toi ?/ fier de toi ?/ tu as l’air déçu…)
  • les encouragements à recommencer s’il est déçu du résultat de son action

Les commentaires seront plus efficaces une fois que l’enfant a terminé son action afin de ne pas l’interrompre, de ne pas le déconcentrer ni le décourager de finir avec un jugement négatif (“pas la peine que je finisse si c’est moche/ nul/ trop difficile” ou “pas la peine de finir si c’est déjà parfait/ beau/ si ça plait déjà à tout le monde”).

 

3 conséquences de nos interventions inutiles

Les conséquences motrices

Favoriser le résultat aux dépens du processus d’apprentissage, en faisant à la place de l’enfant, le prive d’opportunités de manipuler et de perfectionner ses mouvements et son adresse. En agissant à sa place, nous freinons l’émergence de son autonomie.

Quand on laisse à l’enfant l’opportunité d’affiner fréquemment ses gestes et ses sens, il devient autonome plus rapidement.

Les conséquences psychiques

Un enfant interrompu est un enfant atteint dans son amour-propre et dans son élan vital. Or un enfant interrompu de la sorte est mécontent… et ce mécontentement va prendre l’étiquette de “caprice” dans nos bouches d’adultes. Ce que nous nommons “caprice” est simplement là pour nous informer que nous avons entravé son développement naturel.

Avec le temps, c’est la confiance en soi, l’estime de soi, mais aussi la volonté, la persévérance et la prise d’initiatives qui seront affectées.

La prise de risques

Emmanuelle Opezzo écrit que les enfants ont un fort instinct de préservation : ils ne se mettent jamais en danger consciemment. Ils ne le font que s’ils ne disposent pas de suffisamment de connaissance sur leur environnement, s’ils manquent de conscience d’eux ou du monde.

Notre rôle est alors de présenter et d’expliquer le monde aux enfants. Quand on explique la situation et la source du danger, ils pourront le percevoir par eux-mêmes la prochaine fois.

Nous pouvons aussi expliquer à l’enfant que nous avons réagi par peur et non pas par colère. Si l’action enfreint une règle de vie, nous pourrons la lui rappeler et lui demander de ne plus recommencer.

 

9 propositions pour aider utilement les enfants

Je vais citer les propositions d’Emmanuelle Opezzo dans son livre “Vivre la pensée Montessori à la maison” :

1. Interrogeons-nous non pas sur ce que nous devons faire , mais sur ce que nous devons cesser de faire.

2. Commençons par montrer, avant de demander de coopérer : “D’abord, je te montre, ensuite c’est toi qui fais”.

3. Apprenons-lui que chaque chose a un début, un déroulement et une fin pour l’inciter à entreprendre jusqu’au bout et ne pas abandonner en chemin.

4. Exerçons-nous à limiter nos interventions verbales et physiques.

5. Le langage corporel est un excellent moyen de limiter nos interventions. Un simple regard ou un simple geste peut conforter l’enfant, le soutenir dans son activité (ou le décourager s’il y lit de la désapprobation). Un sourire chaleureux peut alors remplacer toutes les interventions !

6. Observons notre enfant sans parler avant d’intervenir. Peut-être est-il en train de détourner l’usage d’un matériel et va-t-il nous surprendre. On gagnera toujours à ne pas intervenir trop rapidement (sauf en cas de danger bien sûr).

7. S’il nous est trop difficile de nous taire, tâchons de nous limiter à décrire ce que nous voyons, sans chercher à évaluer, juger ou interpréter.

8. Apprenons à notre enfant à demander de l’aide en lui rappelant que nous répondrons toujours à sa demande en cas de besoin.

9. Si nous constatons que notre enfant est en difficulté et qu’il ne demande pas d’aide, nous pouvons lui dire que nous observons ses efforts, lui proposer de lui remontrer comment faire pour qu’il essaye à nouveau.

Je rajouterais que la condition pour apporter à notre aide est de demander à l’enfant s’il est d’accord et lui décrire ce que nous allons faire.

Tout ceci peut paraître évident, juste une question de bon sens mais quand on y réfléchit bien, nous n’avons pas été habitués nous-mêmes à être aidés et à aider utilement. Le principal prérequis à ce changement est la confiance dans les capacités innées des enfants.

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