6 nouvelles manières de raisonner pour une co-éducation émotionnelle

co éducation émotionnelle

J’aime développer cette notion de co éducation émotionnelle dans le sens où je reprends volontiers l’expression de Claude Steiner selon laquelle nous sommes tous des “illettrés émotionnels”.

J’entends par éducation émotionnelle une manière d’accompagner les enfants et adolescents qui vont leur permettre de connaître, comprendre, exprimer et utiliser leurs émotions de manière à mener une vie saine (envers eux-mêmes et les autres) et en bonne santé (mentale et physique). Je l’oppose à la répression émotionnelle qu’on identifie avec des phrases du type “Arrête de pleurer” ou “C’est pas grave”.

Avant de chercher à inculquer des compétences émotionnelles et relationnelles aux enfants, nous avons donc à entamer un travail d’alphabétisation émotionnelle que nous poursuivrons au contact de nos enfants. On s’éduque soi-même et on s’alphabétise en même temps que les enfants !

La co éducation émotionnelle, c’est apprendre à raisonner autrement en tant qu’adultes. Je vous propose 6 nouvelles manières de raisonner pour une co-éducation émotionnelle

1.Raisonner en terme de besoins

Chacune de nos actions (enfants et adultes) est motivée par une intention positive : celle de nourrir des besoins fondamentaux non satisfaits.

Tous les humains ont les mêmes besoins, à ne pas confondre avec les stratégies qui sont les actes que nous effectuons pour satisfaire un besoin fondamental (par exemple, certaines personnes vont satisfaire leur besoin de repos en se couchant plus tôt et d’autres en faisant une sieste).

Émotions et besoins vont de paire. Les émotions émergent pour attirer l’attention sur un besoin non satisfait.  L’éducation émotionnelle implique de trouver le besoin non satisfait qui se cache derrière une émotion car les besoins sont la vie qui cherche une expression !

Marshall Rosenberg, concepteur du processus de Communication Non Violente, nous dit que tout jugement, toute critique est l’expression tragique (et on pourrait élargir à tout acte violent) de besoins non satisfaits. Ces besoins peuvent être de différents ordres (affectifs, relationnels, physiologiques, cognitifs) comme les besoins de toucher, de sécurité, d’appartenance, de respect, de sens, d’empathie, de créativité, d’amour, de liberté, de soutien, de lien, de différenciation… Que dire d’un enfant qui a passé 6 heures en classe assis, parfois sans liberté de mouvement, de parole, souvent sans pouvoir boire ou aller aux toilettes quand il en ressent le besoin ?

Raisonner en termes de besoins, c’est mettre le “décodeur”, c’est aller au-delà des étiquettes : enfant roi, enfant pleurnicheur, enfant jaloux, enfant insolent, enfant rebelle, enfant capricieux, enfants irrespectueux… Que nous disent les pleurnicheurs, les jaloux ou encore les insolents ? Que peuvent-ils nous apprendre ? Quel est le mystère à déchiffrer derrière ce que nous nommons “caprice” ? Que pouvons-nous apprendre sur nos propres besoins et les valeurs véhiculées par notre culture quand nous nous surprenons à parler des enfants rois, des enfants gâtés ?

Raisonner en termes de besoins, c’est abandonner l’idée de punition, c’est abandonner la volonté de faire souffrir l’enfant pour qu’il comprenne bien la leçon. C’est chercher la connexion émotionnelle avant de rediriger l’action. Cette connexion émotionnelle passe par une attitude empathique sur ce que vit l’enfant : à quoi dit-il oui quand il dit non aux adultes ?

Le simple fait de valider qu’un enfant est en proie à des émotions fortes, en particulier la colère, permet de créer un lien, une connexion à travers la reconnaissance de ce qui est. Dans la communication empathique, le plus important est l’intention qu’on met dans les gestes et les mots qu’on utilise dans la relation (plus que les mots en eux-mêmes).

« Wow, ça, c’est de la colère ! »

« Ah oui, tu fais ça et ça. C’est vraiment de la grosse colère que tu ressens. »

Raisonner en termes de besoins, c’est abandonner l’idée de s’adresser à la logique ou la raison de l’enfant. Faire la leçon, conseiller, argumenter, interroger sont inefficaces et néfastes à la relation parents/ enfants (et de manière générale adulte/ enfant… et adulte/ adulte !). De même, nier, minimiser les émotions ressenties ou même rassurer l’enfant (“ce n’est rien”, “n’aie pas peur”, “tu verras, ça va bien se passer”, “ne sois pas jaloux”, “tu te mets dans des états pas possibles pour un si petit truc”, “calme toi”) envoie le signal à l’enfant que ces émotions ne sont pas normales. Il peut également avoir tendance à se rebeller contre ce qu’il ressent comme une manière de le contrôler ou de le changer et à ne plus vouloir se confier parce qu’il ne se sent ni compris ni aimé tel qu’il est (puisqu’il est invité à changer ce qu’il ressent).

Pour aller plus loin : L’importance VITALE de l’expression des émotions dans l’enfance (par Alice Miller)

 

2.Raisonner en termes de de réservoir affectif

L’image du réservoir affectif illustre l’attachement des enfants aux parents. Ce réservoir d’amour est à remplir chaque fois qu’il se vide. La figure primaire d’attachement de l’enfant (en général la mère) est la station d’essence auprès de laquelle l’enfant a besoin de s’approvisionner. C’est auprès d’elle qu’il revient entre deux excursions dans le monde extérieur.

Le réservoir de l’enfant est vidé par la faim, la fatigue, l’isolement, la séparation, le stress, les disputes, des blessures, des écorchures…

Un enfant dont le réservoir affectif est vide aura tendance à être plus sensible, à chercher de l’affection et de l’attention par des moyens plus ou moins efficaces, à être plus irritable, moins coopératif.

Le livre “As-tu rempli un seau ?” est très efficace pour comprendre ce phénomène et l’expliquer aux enfants. L’auteur explique que c’est une bonne idée de penser que chaque bébé nait avec un seau invisible. Ce seau représente la santé mentale et émotionnelle de l’enfant. On ne voit pas le seau mais il est là. C’est la responsabilité des parents ou autres adultes de remplir le seau de l’enfant. Quand on tient, caresse, touche, berce, chante, joue et aime, donne attention et soin à un enfant, on remplit son seau. Aimer, c’est remplir des seaux !

Cette image est utile à la fois pour les parents et les enfants : un parent peut demander à un enfant irritable, qui a tendance à “pleurnicher”, “à chercher l’attention” si son seau est vide et s’il faut le remplir. Un parent pourra également dire à l’enfant que son propre seau est presque vide et que la patience est aussi petite qu’un petit pois. L’enfant se fera un plaisir de le lui remplir !

Lire aussi : Remplir le réservoir de tous les membres de la famille : pourquoi ? comment ?

 

3.Raisonner en termes de compréhension de la nature et fonction des émotions

Les émotions primaires sont des réactions adaptatives qui viennent de l’intérieur pour s’exprimer à l’extérieur et véhiculent des messages au service de la vie. Elles durent en général quelques minutes seulement et sont comme des vagues qui montent puis finissent par disparaître.

Tous les spécialistes des émotions ne sont pas d’accord entre eux sur le nombre d’émotions primaires mais on en compte généralement 6 : tristesse, colère, peur, joie, surprise, dégoût. Certains y rajoutent la honte et l’amour. De la même manière que les couleurs primaires, ces émotions primaires seraient celles à partir desquelles des émotions plus complexes s’élaboreraient (par exemple, il y a de la peur, de la tristesse et de la colère dans la jalousie). Essayer de ramener les émotions ressenties à ces 6 émotions primaires permet de mieux comprendre leur nature profonde.

Les émotions sont caractérisées par 5 dimensions :

  • les sensations corporelles
  • les pensées qui les font naître, qui les accompagnent et qui les alimentent
  • la nature de l’émotion
  • l’intensité de l’émotion
  • les tendances à l’action qu’elles font naître

Il est essentiel de faire la différence entre les émotions saines et le stress (=les émotions parasites). Les émotions saines durent quelques minutes (rarement plus de 5 minutes) et sont des réactions physiologiques qu servent la vie humaine en attirant l’attention sur des besoins fondamentaux insatisfaits. Chaque émotion est ressentie en lien avec des causes et des besoins différents  :

  • la colère : cause -> frustration, injustice, impuissance, violation de l’intégrité (psychique ou physique); besoin -> écoute, compréhension, décharge de l’énergie, changement, réparation
  • la tristesse : cause -> perte, séparation, échec; besoin -> réconfort, acceptation, expression émotionnelle (ex : pleurer), amour inconditionnel
  • la peur : cause -> danger, inconnu, insécurité, menace; besoin -> protection, aide, compréhension sécurité, réassurance
  • la joie : cause -> réussite, émerveillement, rencontre, gratitude; besoin -> partage, lien, réjouissance,
  • le dégoût : cause -> nocivité, viol; besoin -> sécurité, respect, accueil des émotions, justice
  • la honte : cause -> non alignement avec les valeurs, moquerie, jugement; besoin – > restauration de l’estime de soi et de la valeur personnelle, acceptation, amour inconditionnel.

Les crises explosives de stress sont des réactions émotionnelles inappropriées et disproportionnées. Ce sont des décharges liées à des couches d’émotions qui n’ont pas pu s’exprimer pour une raison ou une autre. Contrairement aux émotions primaires qui sont à accueillir et écouter, les réactions parasites nécessitent une recherche de la cause pour permettre à la vraie émotion (l’émotion “cachée”, secondaire) de sortir. On repère assez vite les émotions parasites au caractère disproportionné, prolongé et inadéquat (ex : de la colère alors que la situation aurait du provoquer de la tristesse). On parle aussi du syndrome du biscuit cassé : le biscuit cassé est seulement le déclencheur de la crise, pas la raison principale.

En tant qu’adultes, il est de notre responsabilité d’identifier notre terrain émotionnel et les émotions apprises dans l’enfance qui sont venues se substituer à nos émotions authentiques. Une émotion « apprise » est une émotion parasite qui a été enseigné dans l’enfance à travers des normes sociales, culturelles et/ou parentales.Le problème est que les sentiments appris et les comportements socialement acceptés, attendus par l’entourage, se substituent progressivement aux émotions saines et naturelles. Quand les émotions parasites se substituent aux émotions saines et authentiques, alors les premières constituent petit à petit une protection. De plus, à la manière d’une cocotte minute, les émotions primaires censurées et interdites d’expression finissent par exploser sous forme de passage à l’acte disproportionné (par exemple, une personne calme sort de ses gonds dans un accès de colère spectaculaire).

Il est donc important de reconnaître la valeur réparatrice des émotions dites “négatives” pour pouvoir les accueillir chez soi et chez l’enfant (peur, colère, tristesse). En parallèle, il est primordial de savoir accueillir aussi les émotions joyeuses, expansives, bruyantes, qui s’accompagnent parfois d’un sur-plus de travail pour nous (ranger la cuisine après un atelier culinaire, nettoyer la peinture, laver les vêtements – et les enfants – pleins de boue…). En effet, quand on s’engage dans un processus d’accompagnement des émotions, on a souvent tendance à se focaliser sur les émotions désagréables pour que les enfants apprennent à vivre avec et se servent de l’énergie véhiculées par ces émotions pour servir leurs besoins plutôt que faire preuve de violence ou se replier sur eux-mêmes. Pourtant, l’accompagnement de l’émotion de joie peut aussi être source de difficultés (comment accueillir le désordre ? comment supporter l’agitation et le bruit ? un enfant qui se réjouit d’une bonne note va-t-il finir narcissique et/ou fainéant ?). La joie est l’émotion qui dit que nous sommes à notre place et savoir convoquer la joie permet de nourrir l’âme et d’aller puiser dans des ressources personnelles en cas de difficultés.

 

4.Raisonner en termes d’empathie et d’auto empathie

Cette notion d’empathie est centrale dans la co éducation émotionnelle. Elle n’a de sens qu’en lien avec la notion d’auto empathie.

Comme nous sommes presque tous des “illettrés émotionnels”, nous n’avons pas appris à descendre en nous pour explorer nos motivations, identifier et nommer nos émotions, en déduire nos besoins et nous comporter envers nous-même comme un.e bon.ne ami.e. Un mot clé de l’auto empathie est “oui” : “oui, je ressens de la colère et je sens que mes poings sont fermés, que je suis contractée…, je ressens aussi de la peur et une pointe de tristesse… c’est vrai que j’aurais besoin de…, c’est ce que je ressens maintenant et c’est ajusté…, j’ai le droit de me sentir comme ça et c’est vraiment difficile de… j’aurais tellement aimé…, j’ai le droit de pleurer…, oui, je suis profondément en colère et tellement déçu que j’aurais eu envie de…”.

Cette écoute de soi de manière émotionnellement alphabétisée permet à la fois de s’apaiser, de gagner en lucidité mais aussi de mieux comprendre ce qui motive et traverse les autres (notamment les enfants).

Nous ne pouvons réellement offrir avec amour que dans la mesure où nous recevons nous-mêmes de l’amour et de la compréhension (de la part des autres mais également de nous-mêmes envers nous-mêmes).

Apprendre à faire preuve d’auto empathie s’inscrit dans un processus de “ré éducation”. La pratique est essentielle. Au départ, elle nécessitera de s’arrêter physiquement, de ralentir le débit de la parole, de prendre de vrais temps de pause, de réfléchir posément avant de parler, de prendre le temps de répondre mentalement à des auto questions (qu’est-ce que je sens dans mon corps ? comment ça fait ? quelle est la nature de mes émotions ? sur quels besoins attirent-elles mon attention ? quelles sont les valeurs importantes pour moi en jeu ? quelle demande je pourrai formuler ?) et de s’occuper de soi avant de communiquer avec autrui.

Si, à chaque fois que nous nous jugeons et que nous jugeons les autres, nous nous demandons «Y-a-t-il en moi une partie vulnérable qui a besoin d’empathie ? », alors nous intégrerons cette manière de penser en termes de besoins comme une nouvelle manière de communiquer au quotidien.

 

5.Raisonner en termes d’enseignement

Trop souvent, nous oublions que « l’éducation » est avant tout synonyme d’enseignement et non de punition. – Daniel Siegel (neuroscientifique spécialiste du cerveau des enfants)

Raisonner en termes d’enseignement, c’est évacuer tout système de punition/ récompense parce qu’il devient simplement inutile parce qu’on pense connexion avant solution.

Par exemple, face à un enfant qui en tape un autre, il est possible d’appliquer les raisonnements mentionnés plus haut : quelle intention positive avait-il en tapant ? quelles émotions l’ont conduit à adopter ce comportement ? comment est son seau ? quels peuvent être ses besoins non nourris (notamment affectifs) ?

Des questions complémentaires peuvent aider à raisonner en termes d’enseignement :

  • l’enfant a-t-il appris ce comportement (peut-être reproduit-il ce qu’il a vécu/ subi) ?
  • l’enfant est-il en capacité de se contrôler (avant 5 ans, les enfants sont littéralement submergés par leurs émotions) ?
  • l’enfant a-t-il entendu et compris la consigne/ la règle ?
  • quelles paroles et attitudes aidantes puis-je adopter pour construire des compétences émotionnelles et relationnelles chez l’enfant ?
  • comment amener l’enfant à comprendre les conséquences de ses actes en développant son sens de la responsabilité individuelle plutôt que la honte ou la peur (et éviter le jeu du “quand le chat n’est pas là, les souris dansent”) ?
  • comment amener l’enfant à réparer ?
  • comment outiller l’enfant et mettre à sa disposition des stratégies pour qu’il agisse différemment la prochaine fois ?

Cet enseignement peut également concerner le parent :que peut m’apprendre ma réaction disproportionnée face à une simple dispute entre enfant ou au refus de manger de mon enfant sur moi-même ?

Toutes nos réactions disproportionnées sont intéressantes pour travailler sur nous parce qu’elles nous permettent d’identifier des blessures d’enfance que nous avons vécues. A chaque réaction disproportionnée correspond une blessure d’enfant que nous n’avons pu exprimer, travailler, pleurer à aucun moment. En effet, dans notre mémoire traumatique sont stockées toute les situations douloureuses que nous n’avons pas pu réévaluer consciemment afin qu’elles servent d’expériences, de souvenirs. Elles peuvent revenir à la mémoire consciente quand un élément en lien avec la blessure inconsciente la réactive dans le corps sans que nous sachions faire le lien avec la blessure originelle.

Catherine Dumonteil-Kremer, spécialiste française de la parentalité consciente, propose de tenir un journal émotionnel afin de consigner les scènes difficiles dans lesquelles nous avons perdu le contrôle et fait preuve de comportements disproportionnés :

  • comment, dans cette situation, mes parents agissaient-ils avec moi ?
  • à quel moment de la journée cela avait-il lieu ? à quelle saison ? dans quelle pièce de la maison ? dans quelles circonstances ?
  • comment je me sentais quand j’étais enfant dans ces cas-là ?

 

6.Raisonner en termes de droit à l’erreur

Être un parent conscient, bientraitant et émotionnellement alphabétisé est une lourde tâche. Nous gagnerons sur ce chemin à nous donner droit à l’erreur et à apprendre à transformer la culpabilité en terreau fertile pour le changement.

Assumer nos responsabilités concerne les blessures émotionnelles que nous commettons envers d’autres (nos enfants dans le cas qui nous intéresse dans cet article) et consiste à reconnaître sincèrement, le cœur ouvert, ses torts : s’excuser mais également réparer la relation. Cela est valable dans toutes les circonstances et à tous les âges, y compris donc en tant que parents : savoir s’excuser et réparer la relation quand nous manquons de respect à nos enfants et montrer aux enfants en étant nous-mêmes de bons modèles comment demander pardon de manière authentique.

Cela suppose à la fois d’exprimer nos émotions (“je me sens triste de t’avoir hurlé dessus et c’est important pour moi de te présenter mes excuses parce que je t’ai manqué de respect”) mais également d’accueillir celles de nos enfants en leur reflétant comment ils ont dû se sentir sans les culpabiliser ou minimiser leurs émotions (“tu as été beaucoup en colère contre moi quand je t’ai privé de…/ quand je t’ai crié dessus”, “j’imagine que tu as envie de pleurer quand je t’en envoyé tout seul dans ta chambre et que tu m’en as voulu”…). Les enfants pourront se montrer véhéments dans leurs réactions et cette véhémence est à accueillir comme une manière pour eux de se réparer, de guérir leur blessure émotionnelle, de tester la sincérité des excuses et la solidité du lien parent/ enfant.

Ce droit à l’erreur ne doit pas pour autant se transformer en une manière facile de s’en “tirer”. Il doit nécessairement s’accompagner d’un retour réflexif sur les déclencheurs de la réaction violente envers l’enfant et d’une élaboration de solutions bientraitantes pour les prochains cas similaires.

 

La co éducation émotionnelle est un processus qui s’inscrit dans le temps qui demande de réels efforts conscients, une volonté d’apprendre et de s’éveiller à ses propres conditionnements. La co éducation émotionnelle est un processus conscient de libération, de reconnexion à soi, de lucidité; elle n’est pas synonyme de stratégies pour se faire obéir, pour avoir le calme, pour avoir des enfants obéissants ou pour éviter, voire réparer, ses propres blessures d’enfance en étant gentil.

La co éducation émotionnelle se vit forcément dans une éthique humaine et une intention aussi lucide que possible; dans une acceptation inconditionnelle des émotions adultes et enfantines (toutes les émotions sont OK, tous les comportements ne le sont pas). Quand on parle d’émotions, il n’y a pas de bien ou mal, de « tu devrais ou je devrais ressentir ça », de « tu exagères » ou « je suis bête » mais il y a simplement ce qui est « juste » (et ce qui est juste peut varier d’une personne à l’autre et même d’un instant à l’autre pour une même personne), ce qui est à entendre et décoder si nécessaire. Qui parle quand je prends la parole : est-ce vraiment moi (ou les discours entendus de mes parents, à la télé, dans les magazines…) ? Qui agit quand ma main part “toute seule” pour donner une fessée ?

Les mots clés de la co éducation émotionnelle sont coopération (vs. compétition et domination), consentement (vs. coercition et conditionnement), sécurité (vs. éducation par la peur et la honte) et vulnérabilité (vs. se montrer fort pour protéger les apparences). Cela nécessite d’accepter d’entrer en contact avec la peur, avec des messages difficiles (notamment sur les origines et les conséquences des violences éducatives ordinaires), avec des tabous, avec des secrets de famille, avec les blessures de l’enfance, avec la colère refoulée.