Quand un enfant n’a pas envie de se confier et ne veut pas parler

Quand un enfant n'a pas envie de se confier et ne veut pas parler

Il arrive que des enfants ne souhaitent pas se confier et se figent dans le mutisme suite à une blessure émotionnelle, une dispute ou encore une maladresse. Comment les accompagner sans les forcer ni rompre le lien ?

Raisonner en termes de comportement : les comportements sont des éléments de communication !

La communication ne passe pas forcément par des mots. Les comportements, gestes et silences sont aussi des éléments de communication. Il nous revient d’apprendre à les décoder en termes d’émotions et de besoins.

Un enfant qui ne veut pas se confier a peut-être honte ou peur (de notre réaction ou d’une punition par exemple). Il est peut-être trop en colère ou trop triste pour pouvoir parler. Il a peut-être besoin d’un câlin, d’une présence non jugeante, d’une personne auprès de qui il peut pleurer, de solitude, de temps pour libérer son énergie de colère avant de pouvoir réfléchir…

Raisonner de cette manière nous permet d’accéder aux émotions et aux besoins qui sous tendent le comportement de l’enfant sans entrer dans un jeu de pouvoir (“Raconte moi/ Pourquoi tu ne veux pas me parler ?/ Si tu ne me dis pas ce qui s’est passé, je ne peux pas t’aider”).

Voir l’exemple de la bouderie décodée : La bouderie est un langage : comment accompagner un enfant qui boude ?

 

Reconnaître le besoin de retrait de l’enfant 

Des stratégies comme la solitude, le retrait, l’introspection peuvent être des moyens de vivre ses émotions passagères tout à fait sains.

Il s’agit ici de ne pas forcer l’enfant et de lui assurer un espace et du temps de tranquillité tout en lui offrant une disponibilité de notre part (“Je t’aime et je vois que quelque chose ne va pas/ que tu n’as pas envie d’en parler. Tu préfères rester seul.e pour le moment. Si tu as envie d’en parler plus tard, je serai disponible pour toi.”).

L’écoute bienveillante, c’est n’est pas vouloir tirer les vers du nez à tout prix et les enfants ont évidemment droit à leur jardin secret. Le fait qu’un enfant ne veuille pas se confier ne doit pas être un problème en soi mais peut le devenir quand on a l’intuition que le problème tu est grave mais que l’enfant se braque ou se retire quand on aborde le sujet.

 

Passer par des moyens détournés

Les enfants, surtout les plus jeunes et ceux qui ne maîtrisent pas un vocabulaire riche pour parler des émotions, n’ont pas les moyens linguistiques de mettre leurs émotions en mots. Cela est d’autant plus difficile que le cerveau des jeunes enfants est immature et que même les plus âgés (y compris les adolescents et même les adultes!) n’ont pas accès au “cerveau qui réfléchit” sous le coup des émotions.

Un enfant peut dessiner ce qui lui fait peur, le gêne, ce qui le met en colère. Le dessin est déjà une façon de se libérer d’émotions. Le dessin peut à la fois aider l’enfant à mettre ses ressentis au clair et offrir un support à l’adulte pour engager la discussion.

On peut aussi jouer à Dixit, un jeu de société pour enfants à partir de 8 ans qui invite chaque joueur à devenir conteur à partir des cartes superbement illustrées. Avec le support des cartes, les enfants inventent des histoires et racontent un peu d’eux-mêmes indirectement. On retrouve ce principe du récit de soi pour dépasser les blocages dans le coffret des Cartes Créatives. Les cartes créatives invitent l’enfant à créer des contes spécifiques selon leurs problématiques personnelles. En s’identifiant aux héros des histoires qu’il invente, l’enfant rejoue intuitivement les scènes de sa vie qu’il souhaite mieux maîtriser, élargissant ainsi l’éventail des possibles pour trouver de nouvelles solutions. En scénarisant les épreuves rencontrées par les héros, il extériorise les conflits provenant de son monde intérieur, puis les dépasse en explorant de nouvelles stratégies. Les dénouements positifs l’aident à se projeter dans de futures expériences de vie tout en lui apportant apaisement, assurance et autonomie.

cartes créatives bartoli

 

Pour accompagner un enfant qui ne veut pas se confier ou a du mal à parler, il est également possible de recourir aux histoires :

  • on peut lire une histoire qui parle des émotions, qui met en scène un personnage qui rencontre le même type de problématique que l’enfant, on peut même inventer un conte à valeur thérapeutique en fonction du vécu de l’enfant (lire : Inventer un conte pour rassurer les enfants (peur, angoisse, cauchemar, stress…) )
  • on peut aussi raconter un conte à deux : l’adulte commence une histoire en plantant un décor sciemment propice à laisser l’enfant poursuivre l’histoire.

Le jeu parent/ enfant est également efficace pour dénouer des situations problématiques : le jeu permet à l’enfant de se remettre d’une contrariété en la rejouant, d’exprimer les zones douloureuses de l’enfant (celles où il s’était lui aussi senti stupide, humilié, incapable), de remplir le réservoir d’attachement.

Il peut être utile de rejouer la situation avec des poupées, des Playmobils, des Legos ou tout autre jouet d’imitation. Sans forcer l’enfant à jouer une scène en particulier, vous pouvez à l’occasion d’un jeu introduire ces événements et laisser l’enfant décider de la suite : va-t-il les ignorer ? les amplifier ?  Lawrence Cohen, spécialiste de la parentalité ludique, cite l’exemple d’une mère et sa fille qui jouaient aux poupées suite à une journée tendue chargée de cris : elles s’amusaient à les coucher et la mère dit dire à l’une d’elles « La journée fut rude, il y a eu beaucoup de cris dans cette maison », la petite fille a enchaîné en grondant une de ses poupées : « Méchante, tu as désobéi aujourd’hui, tu dormiras par terre ! ». La maman est intervenue en disant : «Tu sais, je crois qu’elle n’a pas fait exprès, elle a sûrement plutôt besoin d’un câlin pour être consolée de sa dure journée. »

Réfléchir à notre propre manière de dévoiler notre vulnérabilité et de régler nos problèmes

Les enfants nous imitent et il est possible que c’est en nous regardant qu’ils aient appris à se fermer quand ils sont tristes ou qu’ils ont peur.

Il peut être utile de réfléchir à nos propres habitudes et à ce que nous donnons à voir (et donc à imiter) à nos enfants :

  • est-ce que je parviens à parler de moi, de ma tristesse, de ma colère, de ma peur ?
  • est-ce que j’ai appris à mettre des mots appropriés et ajustés sur mes émotions et mes besoins ?
  • est-ce que j’accepte de montrer ma vulnérabilité ?
  • est-ce que je sais me confier à une personne de confiance quand je sens que j’ai besoin d’aide, de soutien ?
  • si ce n’est pas le cas, comment amorcer un processus d’alphabétisation émotionnelle ?
  • est-ce que je donne envie à mon enfant de se confier à moi (ou alors est-ce que mon enfant a peur de se confier parce qu’il craint une punition, un isolement, une leçon de morale…) ?

Explorer des causes non émotionnelles

Pour autant, les enfants qui se renferment, qui partent au quart de tour systématiquement sans pouvoir expliquer pourquoi ils agissent ainsi, qui semblent avoir du mal à voir clair dans ce qui se passe en eux rencontrent peut-être des problèmes d’un autre ordre.

Il peut être intéressant de faire un pas de côté et d’explorer des causes non émotionnelles (à explorer avec un professionnel de la santé, médecin ou pédiatre) et notamment :

  • une dysbiose intestinale (ou déséquilibre du microbiote intestinale);
  • un environnement mal adapté avec trop de surcharges sensorielles (bruits, stimulations visuelles…), pas assez d’occasion de se dépenser physiquement et d’être en contact avec la nature;
  • un trouble de l’apprentissage (dys), un trouble de l’attention avec ou sans hyperactivité, un trouble de la vue ou neuro visuel;
  • une alimentation trop riche en sucres, en produits laitiers, en colorants et conservateurs.

 

Quoiqu’il en soit, l’important est de ne juger ni l’attitude de l’enfant ni son émotion. Une attitude efficace est plutôt une attitude douce, empathique et rassurante sans chercher à forcer un enfant ou à prendre en charge son problème avec des “Mais pourquoi tu te sens comme ça ?” ou des “Parle-moi” insistants.

Lire aussi : Pourquoi demander “pourquoi ?” aux enfants est inefficace pour les faire parler !

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Sources :

Vidéo d’Isabelle Filliozat – Que faire pour accompagner un enfant qui ne nous dit rien ? 

Livre On ramène le calme à la maison : aider votre enfant à calmer stress, agitation, anxiété et angoisse de Anne-Laure Mahé (éditions Eyrolles). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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