12 manières d’aider les enfants en difficulté de lecture

enfants en difficultés de lecture

Dans son livre “L’école des illusionnistes”, Elisabeth Nuyts propose des pistes et des activités pour aider les enfants en difficulté de lecture. Ces exercices ou conseils aideront les enfants à accéder au sens de ce qu’ils lisent, à libérer le mécanisme de la pensée, à comprendre un texte lu, à développer l’intelligence du texte.

 

1. Faire lire les enfants à haute voix

La simple visualisation n’est pas directement porteuse de sens chez la grande majorité des élèves. La parole est l’essence même de leur pensée.

Elisabeth Nuyts recommande donc d’associer la parole à chacune des étapes des apprentissages de base. La parole entendue permet de relier des circuits.

2. Subvocaliser (se parler à voix basse) : la parole intériorisée

Elisabeth Nuyts regrette que l’apprentissage de la lecture soit dissocié de la parole et que certains enfants apprennent à lire silencieusement, à écrire la bouche close, à écouter sans écrire, à écrire sans se dicter la moindre chose.

Les enfants qui ne savent pas analyser ce qu’ils entendent, qui ne s’entendent plus dans leur tête quand ils lisent ou quand ils écrivent, ne s’entendent presque plus quand ils pensent.

3. Se dicter des mots avant d’écrire

Seule une petite minorité de personnes peut lire directement, sans passer par la parole effective ou intériorisée.

Le fait de se dicter des mots avant de les écrire participe à la formation de l’habitude de se parler, à haute voix ou en subvocalisant.

Les bonnes habitudes prises pour l’écriture seront des bonnes habitudes prises pour la lecture.

4. Faire des pauses dans le texte et évoquer la scène à l’aide d’images mentales 

Parler à voix haute ou dans sa tête lorsqu’on lit ou qu’on écrit est nécessaire à la compréhension des mots, mais insuffisant à celle des phrases. Il faut en plus prendre le temps d’évoquer la scène.

L’évocation est la mère de la compréhension. – Antoine de la Garanderie

Un enfant qui a appris à prendre le temps de s’arrêter fréquemment dans la lecture pour prendre le temps d’évoquer la scène lue peut comprendre et mémoriser les textes qu’il lit.

On pourra demander aux enfants de décrire ce qu’ils voient dans leur tête après chaque phrase ou chaque paragraphe (en fonction de leur âge et de leur niveau de difficulté). C’est le “film” qu’ils se font dans leur tête.

 

5. Analyser méthodiquement les textes : les questions d’intelligence

Elisabeth Nuyts propose des formulations de questions d’intelligence qui développent le sens de l’analyse chez l’enfant :

Où se passe la scène ? A quoi le vois-tu ?

Quel temps fait-il ? A quoi le vois-tu ?

Combien y-a-t-il de personnages ? Grâce à quoi le sais-tu ?

A quoi sert… ? Quels sont les indices qui t’ont guidé ?

Elle insiste sur l’importance de la question “A quoi le vois-tu ?“. Si l’on n’oublie pas de poser cette question, sous quelque forme que ce soit (pourquoi ? qu’est-ce qui te fait dire ça ?…), l’enfant cherchera automatiquement par la suite à justifier ses réponses, sans pouvoir se contenter de scanner le texte à la recherche du mot réponse.

Elisabeth Nuyts propose même de de poser des questions linéaires après chaque phrase pour certains textes difficiles. Une fois cette analyse linéaire effectuée, on pourra s’attaquer aux questions plus synthétiques (telles que mentionnées plus haut).

Que nous apprend le titre ?

Julien tendit les mains. A qui ? Pour quoi faire ? Peut-on le savoir dès maintenant ? Sinon, gardons ces questions en tête et continuons notre analyse.

L’intérieur des gants était chaud et humide. De quels gants s’agit-il ? Pourquoi étaient-ils chauds et humides ?

6. Poser des questions d’ouverture

Elisabeth Nuyts explique que les questions d’ouverture permettent d’accroître la culture de l’enfant. Ces questions seront posées à la fin de l’analyse de texte et abordent ce que l’enfant connait dans la vie. C’est ainsi qu’il pourra jeter des ponts entre les livres et la vie. C’était le but des “leçons de chose” qui suivaient traditionnellement la lecture.

Par exemple, sur un texte mettant en scène des personnages sur une plage surveillée :

Toutes les plages sont-elles surveillées ?

A quoi voit-on qu’elles le sont ?

Quelles sortes de drapeaux trouve-t-on sur les plages, devant les postes de surveillance ?

A quoi servent ces postes ?

Que peut-on prendre pour aller pêcher ?

 

Le travail de question des points 2 et 3 ont pour objectif ultime d’apprendre aux enfants à se poser des questions quand ils lisent pour qu’ils puissent s’assurer eux-mêmes de bien comprendre ce qu’ils sont en train de lire. L’autonomie du lecteur passe par là : savoir se poser des questions d’analyse, et les bonnes questions.

7. Travailler sur la chronologie

Le travail sur la perception du temps et de la chronologie aide les enfants à retrouver l’accès à leur cerveau temporel.

Elisabeth Nuyts propose ce type d’exercices :

Demander à l’enfant de sortir de la pièce, puis de rentrer à notre appel.

Dès qu’il est rentré, lui demander de faire une action (par exemple jeter des dés).

Demander à l’enfant de dire ce qu’il a fait et d’indiquer la première action (Quand je suis entré, j’ai lancé les dés)

Une fois la réponse correcte donnée (si ce n’est pas le cas, réitérer la scène), proposer de faire 4 choses différentes dans la pièce.

Une fois les actions effectuées, demander à l’enfant de les raconter dans l’ordre.

Ecrire les phrases correspondant aux actions, les mettre dans le désordre et demander à l’enfant de les remettre dans l’ordre d’exécution.

Recommencer du début avec d’autres actions jusqu’à ce que l’enfant soit tout à fait à l’aise (éventuellement, augmenter le nombre d’actions).

Passer à des phrases plus complexes : Quand tu es arrivé, j’avais déjà mangé/ Dès qu’il a entendu du bruit à la cave, il est descendu. Quelle est la première des 2 actions ?

Aider avec des questions ouvertes si nécessaire.

8. Remettre dans l’ordre des images séquentielles

Les images séquentielles permettent à l’enfant d’exercer sa logique et de comprendre les relations de cause à effet.

L’enfant est invité à remettre des cartes dans l’ordre chronologique pour dérouler une histoire cohérente et logique.

Il est ensuite invité à oraliser l’histoire qu’il vient de créer.

On pourra lui proposer d’insérer des connecteurs temporels (“d’abord“, “puis“, “enfin“, “ensuite“, “donc”…)

Des cartes séquentielles simples (3 images) en téléchargement gratuit ici .

7 séries de 6 images sur 123montessori.

cartes séquentielles

 

9. Reproduire des rythmes 

Elisabeth Nuyts propose aux enfants de reproduire des cadences frappées sur la table.

Elle commence par des rythmes simples et réguliers, de 3 noires “ta-ta-ta”. A ceux qui ont du mal à passer à 4, elle recommande de répéter oralement ce qu’ils viennent d’entendre “ta-ta-ta-ta”. Le passage par la parole (ou du moins par la subvocalisation) facilite la mémorisation.

Les enfants que la parole n’aide pas s’en sortent en fixant les mains : c’est la mémoire du geste qui les aide.

Les exercices sont complexifiés au fur et à mesure que la mémoire et la discrimination auditive des enfants s’affinent.

On peut également jouer à d’autres jeux de ce type :

  • l’adulte tape 1 fois dans les mains, l’enfant trace 1 trait vertical; l’adulte tape 2 fois dans les mains, l’enfant trace 2 traits verticaux. L’adulte alterne ensuite les coups de manière irrégulière.
  • l’adulte tape 1 fois dans les mains, l’enfant reste dans sa position; l’adulte tape 2 fois dans les mains, l’enfant change de position (s’assoit s’il est debout et se lève s’il est assis).

10. Passer par le corps

Certains enfants ont besoin de toucher des objets (par exemple, fabriquer des lettres en pâte à modeler).

Ces élèves ont besoin de fabriquer et de toucher chaque lettre de l’alphabet avant de commencer à lire et de s’habituer à lire lettre par lettre puis le mot. Pour un apprentissage efficace de la lecture, ces enfants ont besoin de toucher et de prononcer le son de la lettre jusqu’à la maîtrise de l’alphabet.

Pour aller plus loin : De la pâte à modeler pour apprendre à lire ?

 

11. Exercer les sens par des activités de reconnaissance tactile et visuelle

Elisabeth Nuyts propose un exercice sensoriel pour développer les perceptions tactiles des enfants.

Les yeux fermés, ils doivent identifier au toucher des petites figurines de formes et de compositions différentes (par exemple des animaux en plastique). Quand les enfants atteignent la limite de leurs capacités d’analyse tactile, il leur suffit de décrire à haute voix ce qu’ils sentent sous leurs doigts pour pouvoir rapidement identifier l’objet. L’analyse à partir d’indices énoncés à haute voix (il y a 4 pattes courtes, il y a un long cou, je sens des cornes…) débouche sur une synthèse (c’est un…).

On peut aussi penser aux dessins en fermant les yeux. Le dessin cache-cache consiste à proposer à l’enfant de dessiner un objet qu’il ne connait pas et qu’il a seulement touché. Je vous en détaille le principe ici.

dessiner en touchant

On peut également imaginer un adulte qui fait un dessin dans le dos de l’enfant et celui-ci doit reproduire le dessin qu’il sent dans son dos sur une feuille.

D’autres exercices concernent la perception visuelle : ces exercices peuvent prendre la forme de différences à retrouver (les classiques 7 différences), d’un modèle à retrouver parmi des formes qui se ressemblent…

12. Établir des liens logiques entre des images hétéroclites

C’est un des exercices également proposés dans le livre Manuel de pensée géniale de Philippe Brasseur (édition Casterman). Ce livre propose de nombreux jeux pour apprendre aux enfants à créer de nouvelles connexions dans leur cerveau.


Le fait d’établir des liens logiques entre des images qui n’en ont pas a priori force à réfléchir.

On pourra commencer par montrer 2 images et demander de trouver un point commun.

Puis on pourra montrer une dizaine de cartes et demander de faire des paires.

On pourra par la suite proposer 25 images et demander de les classer en groupes logiques (soit imposés – 5 groupes par exemple, soit libres).

On demandera systématiquement de justifier : quelle est la logique ? quel est le point commun ? 

 

On pourrait aussi proposer aux enfants de combiner deux images au hasard et d’imaginer quelles innovations pourraient naître de ces rencontres. Par exemple, un chat et une bague : des bijoux pour animaux ? ou encore une bague en forme de chat qui ronronne quand on la caresse ?

 

 

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Source : L’école des illusionnistes de Elisabeth Nuyts (Prix Enseignement et Liberté 2002). Disponible chez votre libraire, dans votre médiathèque ou sur Internet.

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