Les fonctions exécutives des enfants : c’est quoi ?

enfant caillou

Les fonctions exécutives nous permettent d’agir de façon organisée pour atteindre nos objectifs.

Le Dr Adele Diamond, neuroscientifique, définit les fonctions exécutives comme un ensemble de 5 compétences :

  • la maîtrise de soi 

La capacité à résister aux tentations, à agir consciemment plutôt que par impulsion, à réfléchir avant d’agir ou de parler.

  • l’auto discipline

La capacité à rester concentré sur une tâche du début à la fin, à finir ce qui a été commencé malgré les distractions.

  • la capacité à tenir un raisonnement cohérent

La capacité à conserver une ou plusieurs informations en mémoire, à relier des idées les unes aux autres.

  • la créativité

La capacité à penser hors de la boîte, à envisager de nouvelles manières d’attaquer un problème, à faire preuve de pensée divergente.

  • la flexibilité cognitive

La capacité à accueillir la nouveauté, à faire face à des défis inattendus, à transformer un risque en une chance, à admettre ses propres erreurs.

A quoi servent les fonctions exécutives ?

Les fonctions exécutives sont nécessaires dans tous les aspects de notre vie : à l’école, au travail, en amitié, en amour, au moment de prendre des grandes décisions, pour éviter de dépendre de croyances non vérifiées, pour éviter de se faire manipuler, pour réaliser toutes sortes de tâches avec succès.

Céline Alvarez, enseignante, regroupe la maîtrise de soi et l’auto discipline sous le terme contrôle inhibiteur et la créativité est incluse dans la flexibilité cognitive. La capacité à tenir un raisonnement cohérent correspond à l’entrainement de la mémoire de travail.

  • Le contrôle inhibiteur permet de ne pas laisser les distractions nous déconcentrer, d’attendre notre tour pour parler ou pour agir, à gérer nos émotions et à faire preuve de persévérance.
  • La flexibilité cognitive permet de ré organiser les idées face à des informations nouvelles, de changer de stratégie si celle qu’on avait en tête ne fonctionne pas et d’identifier nos erreurs.
  • La mémoire de travail permet de garder les consignes en mémoire, d’organiser les idées et de se souvenir du sens des mots qu’on vient de lire

Sans ces 3 compétences clés, toutes les situations d’action ou d’apprentissage seraient rendues difficiles.

Avant même de penser à développer des compétences académiques ou scolaires (comme lire, écrire, compter), c’est l’acquisition et le renforcement des fonctions exécutives qui importent.

Entre 3 et 5 ans, l’être humain développe à grande vitesse ses fonctions exécutives par sa propre activité. – Céline Alvarez (source : Les fonctions exécutives, 3 compétences clés)

La période entre 3 et 5 ans (qui correspond aux années de maternelle en France) apparaît donc critique : c’est à ce moment-là qu’il existe une période opportune pour apprendre à se contrôler, à être attentif et à mémoriser consciemment des informations.

En tant que parents, nous avons un rôle à jouer pour offrir aux enfants les moyens de construire ces compétences à la maison.

Si vous souhaitez que votre enfant réussisse à l’école et dans la vie, aidez-le à développer de bonnes fonctions exécutives. Ces compétences sont vraiment importantes et souvent plus prédictives que le QI – Dr Adele Diamond

C’est pourquoi les fonctions exécutives nous intéressent vraiment : elles permettent aux humains d’atteindre les objectifs qu’ils se donnent dans la vie.

11 manières de développer les fonctions exécutives des enfants

fonction exécutives enfants

1. Favoriser toutes les situations dans lesquelles l’enfant déploie ses 3 besoins fondamentaux

  • Eprouver de la joie (besoin émotionnel)
  • Se sentir connecté et membre d’un groupe (besoin social)
  • Entretenir ses capacités motrices (besoin physique)

2. Amener l’enfant vers une autonomie de plus en plus maîtrisée

Quand nous laissons l’enfant faire seul (s’habiller seul, faire ses lacets seul, ranger ses affaires seul, se laver seul, se brosser les dents seul…), on l’aide à exercer ses fonctions exécutives.

Il n’y a que lui, par sa propre activité, qui puisse construire son intelligence exécutive. L’adulte ne peut que l’encourager, dès 3 ans, à faire lui-même ce qu’il peut faire lui-même, en l’accompagnant sans faire à sa place, en l’encourageant, puis en s’effaçant progressivement. – Céline Alvarez (source : Les fonctions exécutives, 3 compétences clés)

3. Fixer des objectifs et des défis à l’enfant

L’objectif doit être atteignable (ni trop facile, ni trop dur). Il doit avoir un sens pour l’enfant (aider les autres, exercer son intelligence, répondre à son besoin d’appartenance et d’utilité).

Il doit atteindre un objectif précis et pour cela il doit focaliser son attention, contrôler les gestes ou les émotions inappropriées, planifier ses actions, et rester flexible en cas d’erreur. –  Céline Alvarez

Par exemple, cela peut passer par le fait d’aider un plus petit, par le fait d’aider à la cuisine ou à étendre le linge, de prendre soin d’un animal, de faire une action en un temps plus court que la fois précédente (la compétition se fait contre sa meilleure performance)…

Les devinettes sont aussi des bons moyens de poser des défis aux enfants.

4. Encourager l’enfant et croire en lui

On pourra lui répéter des phrases pour renforcer sa confiance en lui :

Tu n’as pas échoué tant que tu continues à essayer.

Tu as eu le courage d’essayer et de prendre le risque de te tromper

Etre imparfait ne signifie pas être nul.

La joie n’est pas l’inverse du sérieux : tu peux t’éclater tout en travaillant dur.

Ce qui t’apparaît impossible devient possible quand tu continues à essayer.

Tu peux faire une différence dans ce monde. 

Je crois en toi. 

Tu en es capable : peut-être pas aujourd’hui ni demain… mais d’une manière ou d’une autre, tu vas y arriver.

Je t’aime inconditionnellement parce que tu es toi. 

Je t’aime tel que tu es. 

Tu es une partie essentielle et indispensable d’un tout. 

Tu es unique et spécial. 

C’était dur et cela représentait un vrai défi. Et tu as l’as fait, tu as réussi !

Mets ton coeur dans tout ce que tu fais. 

Ce qu’on fait avec amour et joie réussit toujours.

Ne laisse jamais rien t’arrêter.

Tu es capable de réaliser bien plus que ce que tu crois. 

5. Engager l’enfant dans des activités sportives et/ou artistiques

Le Dr Adele Diamond insiste sur l’importance des activités artistiques ou sportives dans le développement des fonctions exécutives.

Quand ces activités sont menées de la “bonne manière”, elle comblent les 3 besoins fondamentaux (joie, connexion, mouvement). Elle fait référence à des activités comme le cirque, la chorale ou l’orchestre, la danse chorégraphiée qui requièrent toutes un fonctionnement d’ensemble et un aspect de création.

Chaque personne est un rouage indispensable du groupe, chaque membre s’encourage en vue d’une réalisation collective, sans compétition mais juste avec le plaisir de partager un bon moment, d’exercer son autonomie, de prendre du plaisir.

6. Jouer

Cela peut passer par des jeux libres ou par des jeux orientés.

Dans des expériences conduites par MG Dias et PL Harris, il est apparu que de jeunes enfants pouvaient résoudre des problème logiques dans le contexte du jeu mais pas dans un contexte formel et/ou scolaire. Cela tient principalement au fait que, dans le jeu, les enfants sont capables d’imaginer ce qui n’existe pas, de se dégager des contraintes de pensée du type “il faut faire comme ça”, “on doit faire commet ça”, “on a toujours fait comme ça”.

7. Entraîner la capacité de concentration et le sens de l’observation

Des activités simples peuvent être proposées dès la maternelle aux enfants pour développer leurs fonctions exécutives :

  • le jeu des différences;
  • les labyrinthes;
  • “Jacques a dit”;
  • le jeu de Kim.

8. Développer la persévérance

Les humains persévèrent quand ils ont l’occasion de prendre des décisions.

La plupart d’entre nous voulons encourager les enfants à trouver ce qu’ils aiment faire – et les aider à déclencher cet amour. C’est très différent que de leur dire qu’ils doivent finir tout ce qu’ils entreprennent même si cela les rend malheureux. – Alfie Kohn

Notre rôle de parents, d’enseignants, d’éducateurs serait peut-être alors de permettre aux enfants de faire des essais, d’expérimenter plein de choses, de les laisser choisir, essayer, renoncer puis réessayer (peut-être, s’ils le souhaitent). Ensuite seulement, nous pourrons leur proposer de l’aide pour faire efficacement ce qui a du sens, de la valeur pour eux : une organisation soigneuse, une capacité à travailler avec autrui, du courage, un bon équilibre entre la confiance en soi et l’humilité… et la ténacité, entre autres qualités.

Pour aller plus loin : Comment cultiver la persévérance chez les enfants ?

 

9. Entraîner l’enfant à exercer ses compétences relationnelles

Cet entrainement se fait dans la vie de tous les jours quand on invite les enfants à régler leurs problèmes sans violence et à faire preuve d’empathie. En parallèle, on peut proposer des exercices aux enfants pour développer leur intelligence émotionnelle. Je vous propose quelques articles pour aller plus loin :

10. Fournir un environnement favorable à la créativité

En pédagogie Reggio, on parle de “provocations“. Ces provocations provoquent comme leur nom l’indique :-). Elles provoquent des pensées, des questions, des discussions, des intérêts ou encore des idées.

Les provocations peuvent prendre plusieurs formes :

  • une photo, une image, un livre
  • un objet naturel (une pomme de pin, une fleur séchée…)
  • un concept (le passage d’une saison à une autre, un changement de lumière)
  • du matériel connu disposé de manière inattendue
  • une réponse à un centre d’intérêt de l’enfant
  • un objet (par exemple, une carte, un tournevis…)
  • de nouveaux moyens créatifs (des pinceaux plus ou moins gros que d’habitude, des pailles pour peindre en soufflant, un appareil photo, une essoreuse à salade pour peindre…)
  • une question à explorer (par exemple, qu’est-ce que la gravité ?)
  • un événement (le début des vacances, un mariage…)

Les provocations peuvent être présentées de manière très simple (juste une photo ou un objet posés sur une table) ou plus élaborée (par exemple, une table sur laquelle sont posés des matériaux recyclés à côté d’un livre sur les robots et un schéma pour fabriquer un robot à partir de matériel recyclé). L’important est que les provocations soient présentées de manière attractive, en insistant sur la beauté de la chose.

L’objectif des provocations est d’inviter les enfants à explorer le matériel et à s’exprimer. Elles doivent être ouvertes, sans objectif particulier mais sujette à exploration, à une utilisation libre. Dans l’exemple du robot, on laissera l’enfant s’approprier les matériaux : peut-être qu’il construira au final un bateau -).

Voici quelques exemples en photo :

argile reggio

 

11. Montrer l’exemple

Un dernier point important à mentionner lorsqu’un parle des fonctions exécutives de l’enfant est de montrer soi-même l’exemple. C’est en observant les adultes autour de lui que l’enfant intègre les compétences en question : quand il est exposé à la maîtrise de soi-même, l’enfant intègre cette notion; quand il est exposé à la persévérance, l’enfant intègre cette notion; quand il est exposé à la créativité et à la flexibilité intellectuelle, l’enfant intègre cette notion; quand il est exposé à l’auto discipline, l’enfant intègre cette notion. Tout cela se fait grâce aux neurones miroir :-).

Maria Montessori écrivait qu’il faut nous éduquer si nous voulons éduquer.