Le mythe de la violence rédemptrice

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Dans son livre Quand l’école s’adapte aux enfants, Donna Bryant Goertz (éducatrice Montessori) expose les dangers du mythe de la violence rédemptrice qui oppose les bons et les méchants, présentant la violence comme une solution pour résoudre les désaccords.

En cela, elle rejoint Marshall Rosenberg, fondateur de la Communication Non Violente (CNV). Selon lui, une culture de domination n’a pas d’autre choix que de rendre la violence agréable, divertissante.

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Le mythe de la violence rédemptrice : quelles en sont les causes ?

Nous avons été éduqués à oublier à ressentir de la joie à donner et à prendre soin de l’autre.

Quand on ne donne pas pour recevoir en échange mais simplement pour vivre l’amour qu’on ressent pour l’autre, la vie devient merveilleuse !

Pourtant, au lieu de jouer au jeu « Rendons-nous la vie merveilleuse les uns les autres », nous avons été éduqués à jouer au jeu « Qui de nous deux a raison ? ». Ce jeu ne fait que des perdants car il porte en lui deux principes sournois :

1. la punition : si vous avez tort, vous méritez de souffrir, d’être puni.

2.  la récompense : si vous avez raison, vous méritez une récompense.

Ce mode de pensée est exclusivement binaire et engendre par essence de la violence :

  • qui a raison ? qui a tort ?
  • qui est bon ? qui est mauvais ?
  • qui est normal ? qui est anormal ?

Il est fait de critiques, de manipulations, de définitions et de jugements.

Donna Bryant Goertz rapporte dans son livre une discussion avec des élèves de primaire qui venaient de se battre :

-Pourquoi y-a-t-il toutes ces choses dans le monde des adultes ? a demandé un des enfants. 

– Parce que, lorsqu’ils étaient enfants, ils n’ont pas appris comment arrêter leur propre violence, ni comment voir qu’elle découlait de la colère. Ils pensaient que nos soldats étaient bons et que les autres étaient méchants.

Quand ils étaient enfants, ils s’attendaient à ce que leurs parents et enseignants soient des soldats et des policiers pour eux, dans leur travail et dans leurs jeux de tous les jours. On leur avait appris à attendre que les adultes les empêchent de faire mal à d’autres enfants et empêchent les autres enfants de leur faire mal.

Quand ils étaient enfants, personne ne leur a dit que chacun d’eux avait en lui la lumière, la force et la paix qui arrêtent la violence – pour mettre fin au mal que peuvent faire les adultes et les enfants, et pour les empêcher de faire du mal aux autres.

Et les parents ne peuvent pas enseigner aux enfants ce qu’ils n’ont pas appris.

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Le mythe de la violence rédemptrice : quelles en sont les conséquences ?

Walter Winkn activiste américain chrétien et non violent a écrit :

En Amérique, la tendance à laisser l’intérêt des spectateurs déterminer le contenu des programmes fait en sorte que l’intrigue des bandes dessinées, émissions de télévision et films s’aligne sur le plus bas dénominateur commun de la simplicité mythique…

Le mythe de la violence rédemptrice est l’illustration du mal la plus simple, la plus paresseuse, la moins compliquée, la plus irrationnelle et la plus primitive que le monde ait jamais connue. De plus, son orientation  vers le mal est celle dans laquelle presque tous les enfants modernes (surtout les garçons) sont socialisés au cours de leur évolution vers l’âge adulte…

Les enfants choisissent cette structure mythique parce qu’ils ont déjà été préparés, par des signes et des modèles renforcés par la culture, à trouver un écho dans la perspective simpliste de ce mythe.

 

Le mythe de la violence rédemptrice : comment le surmonter ?

Pour Donna Bryant Goertz, il est urgent d’apprendre aux enfants à arrêter leur propre violence sans demander de l’aide extérieure.

Quand nous faisons appel à un pouvoir externe au lieu de celui qui est en nous, nous abandonnons notre pouvoir. Nous nous remettons, pour être sauvés, à un pouvoir supérieur, à une personne plus âgée qui, le cas échéant, va recourir à la force pour nous sauver. Quand nous arrêtons notre propre cycle de violence sans demander de l’aide, nous brisons le cycle de la violence et nous enseignons l’action non violente.

 

Lors de bagarres ou de conflits, Donna Bryant Goertz propose aux élèves de son école Montessori de dire : “Je m’arrête. Arrêtons-nous. Arrêtons maintenant. Regardez, j’ai arrêté.” Pour elle, attendre qu’un adulte ou un enfant vienne stopper ou chercher de l’aide ne peut pas mener à la paix.

Elle tient ce discours aux enfants :

Il est très dangereux pour vous et vos amis de dépendre des autres pour vous empêcher d’être violents. Vous devez tous vous exercer à vous arrêter seuls. Si vous ne vous arrêtez pas seuls, et n’évitez pas de susciter votre propre violence et celle des autres, vous serez en danger. Vous devez vous exercer à sentir quand quelqu’un peut devenir violent, et apprendre à désamorcer la situation

 

Pour y parvenir, nous avons besoin d’outils et d’une posture :

  • encourager les enfants à développer les pouvoirs pacifiques qui existent en eux
  • minimiser les expositions à la violence divertissante (télé, cinéma, lecture, jeux vidéos, informations…)
  • enseigner comment exprimer la colère et les sentiments désagréables sans violence
  • éviter les étiquettes et divisions en “bons” et “méchants” mais faire confiance au temps et à la bonté des enfants
  • être nous-mêmes des modèles de gestion de notre colère pour qu’elle ne dégénère pas en violence

 

10 phrases à dire aux enfants pour encourager la résolution pacifique des conflits

Ce n’est pas bon pour toi d’avaler ton irritation et ta colère, et de faire croire que tu ne les ressens pas. C’est important de reconnaître tes sentiments. Ici, tu peux être en colère sans danger. Tu peux dire ce que tu ressens à haute voix, et tu seras toujours la bonne personne que tu es

C’est la première fois que tu t’es retenu de frapper pendant une crise de colère. Tu dois être fier(e) de toi.

Tu es assez intelligent(e) pour trouver une meilleure façon de répondre au comportement irritant des autres. C’est ton travail : trouver des solutions non violentes et je vais t’aider si tu en as besoin.

Il est temps que tu arrives à reconnaître l’émotion que tu ressens juste avant de te mettre à détruire. Viens me parler quand tu ressens l’envie de tout casser et nous réfléchirons ensemble à ce que tu pourrais faire d’autre. Tu pourras bientôt obtenir ce dont tu as besoin sans t’en prendre aux autres.

Je vois deux enfants en colère et en total désaccord ! L’un veut… et l’autre veut… Qu’est-ce qu’on peut faire ?

Fais ceci/ cela (par exemple donner le rasoir/couteau à un adulte) pour que nous soyons en sécurité. Je suis sûre que tu vas faire la bonne chose, je te fais confiance.

A 2 enfants qui se “cherchent” (X. suivant et embêtant Y. qui finit par le pousser malgré les avertissements qu’il a adressés à X.) :

– Y., c’est à toi de rester loin de X. si tu ne peux pas résoudre les problèmes sans violence. Dans notre communauté, il n’est pas acceptable de pousser ou frapper ni de menacer. 

– X., c’est ta responsabilité de rester loin du danger et de susciter le meilleur chez les autres. Quand Y. s’éloigne de toi, tu dois respecter ses besoins. 

A un enfant qui a provoqué un autre enfant et s’est fait taper :

Z. est aux prises avec sa colère et il mérite ton respect et ton soutien. Tu sais qu’il n’y a jamais d’excuse pour provoquer la violence. Ou pour te faire battre. Tu dois apprendre à faire de ton mieux pour éviter ce qui peut le provoquer à te frapper, jusqu’à ce que nous arrivions à l’aider à maîtriser sa colère.

A un enfant qui tape ou crie quand quelqu’un lui demande quelque chose :

Allons dire sur quel ton tu voudrais qu’on te parle lorsqu’on te communique quelque chose.

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Source : Quand l’école s’adapte aux enfants, entraide et excellence à l’école Montessori de Donna Bryant Goertz (éditions DESCLEE DE BROUWER). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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