8 clés pour une pédagogie de la bienveillance (contribuer à un cadre valorisant et empathique en classe en tant qu’enseignant)

8 clés pour une pédagogie de la bienveillance

Le contact avec les enfants peut véritablement être un chemin de développement personnel… et Caroline Sost, créatrice de la Living School, nous convie avec enthousiasme et bienveillance sur ce chemin dans son livre S’épanouir à l’école.

Elle propose 8 clés pour une pédagogie de la bienveillance (ou comment contribuer à un cadre plus valorisant et empathique en classe en tant qu’enseignant)

1.Prendre soin de soi

Caroline Sost rappelle une idée tellement rabattue qu’elle en est devenue un poncif, une espèce de tarte à la crème du développement personnel : l’importance de prendre soin de soi. Mais comment donner le meilleur de soi-même quand on est stressé, fatigué, décentré ?

Thomas d’Ansembourg dit une phrase très puissante qui rejoint cette idée : “Quand on se néglige soi-même, on ne transmet pas le soin, on transmet la négligence”. On ne peut en effet pas donner ce qu’on ne possède pas. On comprend alors l’importance de cette notion de “soin de soi” et de remplir son propre réservoir affectif dans les métiers de l’enseignement.

 

2.Commencer un cahier des réussites

Cette idée de cahier des réussites est souvent mentionnée pour les enfants dans le cadre d’une éducation positive mais elle peut être un levier de développement personnel puissant pour les adultes également, notamment pour les enseignants. Un cahier des réussites fait appel non seulement à la créativité (en le personnalisant et le décorant) mais également à l’effet d’élargissement des émotions positives (fierté, joie, gratitude, enthousiasme, confiance, optimisme).

Un cahier des réussites peut consister en un simple cahier de feuilles blanches auquel un temps régulier (quotidien, hebdomadaire…) sera consacré pour écrire et célébrer les réussites, les fiertés (de toute nature et de tout ordre). Plus les anecdotes seront décrites avec détails et mises en valeur par des couleurs, des dessins, des décorations, plus l’effet d’ancrage positif sera puissant.

Il est bon de s’imprégner réellement, volontairement et consciemment de ce qui est bon. Cette pratique peut paraître ordinaire, trop simple ou peut-être même artificielle mais elle renforce la résilience, guérit la détresse, améliore les relations, favorise la santé physique et développe un bonheur durable.

L’idée est de prolonger l’expérience positive pendant 5 à 10 secondes, voire plus en :

  • s’ouvrant aux sensations corporelles qu’elle génère,
  • laissant l’expérience emplir notre esprit et notre coeur,
  • nommant cette expérience avec des mots (la décrire verbalement pour mieux s’en imprégner avant de la mettre par écrit),
  • encourageant l’expérience à s’intensifier.

Cette pratique peut être étendue aux enfants et adolescents à l’école (et hors du cadre scolaire).

 

3.Pratiquer le non jugement pour une pédagogie de la bienveillance

Caroline Sost insiste sur cette capacité à ne pas juger mais à accueillir les émotions et accepter les uns et les autres de manière inconditionnelle. Dans son école, elle forme les enseignants au non jugement pour qu’ils puissent se montrer proches et chaleureux même avec les enfants dans le comportement est parfois difficile.

Etre dans le non jugement ne signifie pas ignorer les problèmes. Il ne s’agit pas non plus d’excuser les gens/enfants ou de les déresponsabiliser mais de mieux les comprendre pour leur proposer des alternatives plus constructives aux actes de violence ou d’irrespect.

Caroline Sost estime que, plus les personnes sont dans le jugement vis-à-vis des autres, plus elles ont au fond un mauvaise image d’elles-mêmes. Ainsi, elle invite les adultes à pratiquer le non jugement sur eux-mêmes avant de vouloir le pratiquer dans leurs relations, à commencer par les enfants. Un adulte en contact professionnel avec des enfants peut adopter plusieurs comportements pour cheminer vers le non jugement :

  • apprendre à reformuler des critiques et jugements en observations et messages qui parlent de soi-même, des émotions ressenties (parler en “messages je“),
  • formuler au passé toute critique négative sur soi-même (exemple : “Je me sens nul.le en… jusqu’à cette minute/ jusqu’à cet instant où je parle”),
  • travailler sur ce qui est touché en soi (besoin, valeur, émotion, blessure) pour voir quelle projection négative est attribuée à un enfant jugé difficile ou insupportable,
  • accompagner l’enfant qui pose des problèmes en lui proposant des ressources, des outils et du soutien vers l’acquisition de nouvelles compétences (éduquer est synonyme d’enseignement, pas de punition ni de récompense),
  • coopérer avec les parents dans un état d’esprit de bienveillance en partant du principe que chacun fait du mieux qu’il peut avec ce qu’il a (avec des stratégies parfois maladroites, inappropriées pour satisfaire des besoins communs) et qu’il est possible de se rejoindre sur des valeurs et intentions partagées (réussite scolaire notamment).

Il est possible d’introduire le non jugement auprès des enfants en leur montrant l’exemple, en leur faisant jouer des sketchs pour montrer l’impact des jugements de valeur et voir comment transformer un jugement en observation et en demande.

La force du non jugement est qu’il permet de remonter à la source des problèmes et de les traiter. – Caroline Sost

 

4.Valoriser (soi-même et les autres) et encourager

Dans l’optique d’une pédagogie de la bienveillance, il est capital de révéler le potentiel présent au cœur de chaque enfant car le meilleur inspire le meilleur et le beau suscite le beau. Pour autant, valoriser n’est pas tromper, flatter ou être gentil. Il s’agit plutôt de faire transpirer cette intime conviction que chaque personne est un cadeau pour l’humanité, que chaque enfant peut contribuer positivement au monde  à sa façon.

De la part des enseignants, cela peut passer par :

  • des mots positifs et encourageants,
  • une communication non verbale empathique,
  • des rituels (massages, météo intérieure, quoi de neuf ?…) et un cadre bienveillant,
  • une posture qui cherche à comprendre les motivations positives derrière chaque acte même inapproprié tout en assurant un cadre garant de la sécurité de tous et toutes.

Cette capacité à valoriser est importante à appliquer aux autres mais également à soi-même en repérant ce qui est bien fait, en raisonnant en termes de temps d’apprentissage (“je ne sais pas faire pour l’instant”, “je suis en train d’apprendre) et de potentiel (“j’ai un grand potentiel à l’intérieur de moi que je suis capable de déployer”).

 

5.Pratiquer le centrage et apprendre à se recentrer

Nous sommes centrés quand nous sommes en pleine conscience de notre propre potentiel, donc de nos ressources. Nous sommes décentrés lorsque nous sommes dans notre “couche extérieure” d’ego négatif (notre potentiel frustré et contrarié). Alors nous sommes en réaction, dans l’agression, la fuite ou l’évitement par exemple. – Caroline Sost

Ainsi, il est important d’apprendre à identifier les signes annonciateurs de décentrage chez soi et chez les autres (sourcils froncés, doigt qui pointe, mâchoires serrées, tensions/ contractions dans le corps, mots accusateurs…).

Une fois cette conscience du décentrage acquise, il s’agit de se doter d’outils qui permettent le recentrage (outils qui conviennent aussi bien aux adultes qu’aux enfants) dont voici quelques exemples :

  • la respiration du ballon (gonfler le ventre à l’inspiration et le dégonfler à l’expiration)
  • des étirements et des mouvements corporels (sauter, courir, rouler, danser…)
  • la méditation
  • les massages et auto massages
  • les mandalas à colorier
  • les petits jardins zen (avec des petits râteaux pour lisser le sable, des galets à déplacer…)
  • les bouteilles de retour au calme (à retourner avec des objets à regarder tomber)
  • un changement d’activité
  • un espace de retour au calme avec des coussins tout doux, des livres à lire, des crayons et feuilles pour dessiner la colère…

 

6.Communiquer de potentiel à potentiel

Le potentiel, c’est l’ensemble des qualités que vous manifestez et c’est aussi l’ensemble des qualités en sommeil à l’intérieur de vous que vous ne manifestez pas encore. – Caroline Sost

Caroline Sost invite adultes et enfants à communiquer de potentiel à potentiel en portant leurs regards sur les capacités, les points positifs de l’autre, en se focalisant sur les ressources de l’interlocuteur.trice. Communiquer de potentiel à potentiel, c’est sortir du regard sur la limitation mais poser le regard sur ce qui est déjà là et sur ce qui va bientôt germer.

Communiquer de potentiel à potentiel et pratiquer une pédagogie de la bienveillance, c’est répondre par l’affirmative à cette question : “mon positionnement est-il porteur de plus de bonheur autour de moi ?“.

 

7.Renforcer le repère interne (l’écoute du corps)

Plus la priorité est données aux repères extérieurs que constituent les enseignants, les notes, les camarades et les parents, moins l’enfant a accès à cette dimension en profondeur. […] L’enfant prend progressivement comme référence ce que lui disent les figures d’autorité autour de lui. – Caroline Sost

Dans son école, Caroline Sost insiste beaucoup sur la question : “Que ressens-tu ?/ Qu’est-ce que tu ressens au fond de toi ?” qui est une des questions clés posées aux enfants lors de conflits ou de doute. Cette question est également fondamentale pour les adultes. Elle remet en lien avec ce qui se passe au fond de soi, au-delà des pensées, des tendance à l’action, des jugements.

Cette dimension du coeur permet de mesurer la qualité, la justesse ou non d’une situation en fonction du ressenti interne (sensations du corps, émotions). Quand il y a contraction dans le corps, il y a blocage, à prendre comme une alerte, une invitation à se recentrer sur les besoins et les valeurs importantes; quand il y a expansion dans le corps, il y a un élan vital qui circule librement, comme une invitation à évoluer, contribuer, apprendre, partager.

 

8.Démarrer ou poursuivre un travail sur soi

Caroline Sost estime que, pour bien aborder une relation, il faut toujours commencer par soi-même. Ce travail sur soi n’est ni rapide ni facile.

On pourrait illustrer ce dernier point par l’image du sachet à thé.

Notre qualité d’être donne une teinte, une coloration à tous nos savoirs, nos savoir-faire et les résultats que nous obtenons. Elle infuse véritablement à la façon d’un sachet de thé qu’on tremperait dans l’eau chaude. – Caroline Sost

Ce travail de développement personnel se poursuit toute la vie parce qu’on n’a jamais fini d’apprendre (vous y voyez un rapport avec le nom du blog ? C’est normal ;) ).

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Source : S’épanouir à l’école de Caroline Sost (éditions Robert Laffont). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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