Une nouvelle approche de l’estime de soi liée à l’optimisme chez les enfants

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Martin Seligman, auteur de L’École de l’optimisme, a une approche plutôt à contre courant de l’estime de soi : selon lui, le bien-être est un “sous-produit” de la réussite. Plutôt que d’intervenir pour que les enfants se sentent mieux dans une perspective de bien-être, ce psychologue américain propose une “approche de la réussite”.
Les adultes s’appuyant sur cette approche de la réussite des enfants sont eux aussi prêts à intervenir mais de manière différente :

  • pour modifier la façon de penser des enfants à propos de l’échec,
  • pour encourager la persévérance plutôt que la simple réussite.

A cette fin, deux clés peuvent nous guider :

  1. changer le pessimisme en optimisme,
  2. changer l’impuissance en maîtrise.

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Pourquoi se soucier de l’optimisme et du pessimisme ?

Au cours de ses recherches scientifiques, Martin Seligman a constaté que les pessimistes réussissent moins bien que les optimistes. Or, comme vu dans le premier paragraphe, la réussite est mère du bien-être.

La bonne nouvelle est que le pessimisme se combat et que l’optimisme s’apprend. L’optimisme ne repose pas sur des phrases positives ou des images de victoires mais sur la façon dont on considère les causes des événements qui nous arrivent.

Chacun de nous a des habitudes de réflexion sur les causes des événements qui surviennent dans notre vie. Seligman les nomme les “styles explicatifs“. Le style explicatif s’acquiert dans l’enfance et, sans intervention explicite, il dure toute la vie.

Nous utilisons (adultes et enfants) trois dimensions pour expliquer les causes des événements positifs ou négatifs qui nous arrivent :

  • la permanence,
  • l’omniprésence,
  • la personnalisation.

Un enfant dont le style explicatif est pessimiste a plus de chance de tomber en dépression. Un enfant dont le style explicatif est optimiste se remet mieux d’un échec et résiste mieux à la dépression.

 

Les 3 traits de l’optimisme

La permanence

Le style explicatif pessimiste réside dans le fait de croire que les causes des événements négatifs sont permanentes. La cause subsistera éternellement donc l’événement négatif se reproduira toujours. Un enfant qui pense ses échecs en termes de “toujours” ou de “jamais” est de style pessimiste.

Le style explicatif optimiste est fondé sur la croyance que les causes des événements négatifs sont temporaires. Un enfant qui pense à ses échecs en termes de “parfois” ou de “dernièrement” est de style optimiste.

Par ailleurs, les enfants qui croient que les événements positifs ont des causes permanentes sont plus optimistes que les enfants qui croient en leurs causes temporaires. Les pessimistes pensent en termes de causes éphémères pour expliquer leurs succès (“cette fois-ci”, “parfois”, “aujourd’hui”). pour les pessimistes, le succès parait ne tenir qu’à la chance alors que les optimistes l’attribuent à des aptitudes et traits de caractère qu’ils auront toujours (ex : la persévérance, la fiabilité, l’altruisme…).

 

L’omniprésence

Les enfants qui s’accrochent à des explications générales pour leurs échecs baissent les bras dans tous les domaines lorsqu’ils échouent dans un seul (“je suis nul dans telle matière donc je suis nul dans tout”).

Les enfants qui croient aux explications particulières peuvent se sentir impuissants dans un domaine précis, néanmoins ils poursuivent leur vie et peuvent entreprendre dans d’autres domaines.

 

La personnalisation

La personnalisation est le fait de décider qui est fautif.

Le premier objectif pour tenter de changer le style explicatif d’un enfant est de s’assurer qu’il assume des responsabilités réalistes. Le second objectif est de l’inciter à blâmer son comportement, plutôt que lui-même en général.

 

Les sources de l’optimisme et du pessimisme

D’où vient l’optimisme ?

Seligman écrit que l’optimisme est héréditaire dans une proportion de moins de 50%. Pour autant, cela ne signifie pas qu’il existe des gènes de l’optimisme ou que l’expérience appropriée dans l’enfance n’a aucune valeur pour engendrer un style explicatif optimiste.

En tant que parents et enseignants, nous avons le devoir d’aider les enfants à accumuler les succès.

Un bon encadrement de votre part soutiendra et maintiendra son optimisme, et les expériences cruciales appropriées cristalliseront son optimisme. – Martin Seligman

 

D’où vient le pessimisme ?

Seligman explique que le pessimisme peut provenir de quatre sources :

  • la génétique,
  • le pessimisme des parents,
  • les critiques pessimistes des parents, des enseignants et/ou des entraîneurs,
  • les expériences liées à la maîtrise ou à l’impuissance.

 

Comment favoriser l’optimisme chez les enfants ?

L’exemplarité des adultes

Étant donné que les enfants apprennent en partie leur style explicatif de leurs parents, il importe que nous changions de style si nous sommes pessimistes.

Pour ce faire, Seligman propose le modèle ABC (Adversity-Belief-Consequence). Le A représente l’élément déclencheur de pensées et émotions négatives, le B les croyances et l’interprétation de la situation, le C les conséquences émotionnelles (la façon dont on se sent et se comporte face à l’événement déclencheur).

Un biais de confirmation pousse les gens à ne voir que la preuve qui confirme l’opinion qu’ils se font d’eux-mêmes et du monde. Ce biais de confirmation renforce les croyances pessimistes. Le modèle ABC sert à le remettre en question. Le tableau ABC comporte 3 colonnes : événements déclencheurs, croyances, conséquences. Une fois que les 3 colonnes sont remplies, il s’agit de relier chaque émotion et chaque action à une croyance qui explique pourquoi nous avons réagi ainsi. Ce travail est d’autant plus important qu’un enfant ne tarde pas à se critiquer en utilisant le style explicatif des critiques reçues des adultes qu’il respecte.

 

Acquérir les compétences qui alimentent le style explicatif optimiste

Il s’agit de travailler sur chaque dimension de l’optimisme :

  • temporaire (la cause de l’échec est modifiable ou transitoire)
  • ciblée (la cause de l’échec ne touche que quelques situations)
  • impersonnelle (la cause est liée à des circonstances particulières)

Seligman propose dans son livre des petits scénarios et des BD pour travailler avec les enfants sur la transformations des pensées “permanentes” en pensées “temporaires”. Quand ils croient que la situation est provisoire et modifiable, les enfants se sentent dynamisés et s’efforcent de trouver une façon de la changer. Par ailleurs, identifier tous les facteurs qui ont contribué à un problème en particulier permet de le résoudre en se focalisant sur les aspects que les enfants peuvent contrôler.

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Il est aussi possible de s’appuyer sur des anecdotes personnelles pour mener ce travail.

 

Des questions à se poser pour remettre en question et dédramatiser

Quand un enfant connaît un événement négatif, il lui est possible de se poser des questions pour dédramatiser et trouver des solutions d’action :

  • Quelle est la pire chose qui peut arriver ensuite ?
  • Cite une chose que tu peux faire pour empêcher le pire d’arriver.
  • Quelle est la meilleure chose qui pourrait arriver ?
  • Cite une chose que tu peux faire pour que le meilleur se produise.
  • Quelle est la chose qui a le plus de chance de se produire ?
  • Que peux-tu faire si la chose la plus probable se produit ?

 

Reconnaître et contester ses pensées automatiques pessimistes

Martin Seligman conseille d’apprendre aux enfants à reconnaître leurs pensées automatiques internes, c’est-à-dire les critiques qu’ils s’adressent à eux-mêmes de manière inconsciente.

Les pensées automatiques sont des idées fugitives que nous nous adressons à nous-mêmes : il s’agit de les rendre conscientes et d’en évaluer l’exactitude.

Les enfants pourront endosser le rôle d’un détective dont la tâche consiste à juger de la pertinence de leurs propres pensées pessimistes et de leurs auto accusations.

Cette tâche peut passer par des indices pour remettre en question les pensées automatiques pessimistes :

  • Quelle est la preuve en faveur de ta croyance ?
  • Quelle preuve va à l’encontre de ta croyance ?
  • De quelles autres façons pourrait-on considérer cette situation ?

 

Résoudre des problèmes relationnels grâce à de nouvelles aptitudes sociales

Seligman propose 5 étapes pour encourager les enfants à résoudre leurs problèmes relationnels eux-mêmes :

  1. Ralentir : remplacer des pensées à chaud par des pensées à froid (cela peut passer par le modèle ABC inculqué aux enfants)
  2. Prendre du recul : comprendre ce que pensait l’autre personne et pourquoi elle a agi comme elle l’a fait
  3. Fixer des objectifs (ex : rester ami avec la personne) et énumérer les choses à faire pour les atteindre
  4. Choisir une voie : quelle est la meilleure solution parmi les choses à faire envisagées ? (cela peut passer par un tableau des “plus” et des “moins”)
  5. Appliquer la solution et adapter en fonction de la réaction d’autrui si nécessaire (dans un mode de pensée “gagnant-gagnant”)

 

Des rituels positifs : les découvertes du soir

Seligman écrit que ce qui compte le plus n ‘est pas tant ce qui entoure les enfants que leur vie mentale. C’est la quantité de “positivité” qui se trouve à l’intérieur de la tête de l’enfant.

Des études ont montré que les gens non déprimés ont deux fois plus de pensées positives que de pensées négatives. On peut donc mettre en place un rituel pour les enfants obtiennent un coefficient de 2 pour 1 en matière de pensées positives et négatives. Seligman écrit que les quelques minutes passées avec les enfants juste avant qu’ils ne s’endorment peuvent être les plus précieuses de la journée grâce au rituel des “découvertes du soir“.

Qu’as-tu aimé faire aujourd’hui ? D’autres choses ?

Est-ce que quelque chose de mauvais est arrivé aujourd’hui ?

Combien de bonnes choses ?

Et demain ?

 

Les limites de l’optimisme

Martin Seligman écrit lui-même :

L’optimiste juste pense : “Que pouvons-nous faire concrètement pour améliorer les choses ?”. L’optimisme n’est pas une panacée et ne se substituera pas à un bon parentage, ni à l’acquisition de solides valeurs morales par l’enfant, ni à l’ambition et au sens de la justice. L’optimisme n’est qu’un outil, mais un outil puissant. Appuyé par de solides valeurs et de grandes ambitions, il rend possible l’accomplissement individuel et la justice sociale.

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Source : L’école de l’optimisme : développer la résilience chez l’enfant de Martin Seligman (éditions Poche Marabout). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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