Trois devises de la résistance non violente : comment la pratiquer face à des enfants opposants ?

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La résistance non violente est la forme de résistance qui exprime le mieux l’attention et l’amour des parents. – Haim Omer

1.L’ennemi n’est pas l’oppresseur, l’ennemi est l’oppression

Ce principe est fondé sur l’idée qu‘on accepte l’enfant mais pas sa violence. Au sein des familles, la violence peut escalader par palier en fonction des demandes des enfants opposants. Ce principe de non violence invitent les parents à ne pas entrer en guerre contre l’enfant, mais bien contre la violence qui s’exerce au coeur de leur foyer.

L’objectif premier des parents sera donc de lutter contre toutes les formes d’escalade (attaques/ contre attaques, demandes sous forme de chantage, menace, culpabilisation, plainte de la parte des enfants/ parents qui finissent par céder…)  et de désamorcer les comportements de violence des enfants opposants. Cela suppose que les parents s’engagent également à lutter contre leur propre violence.

C’est l’élément fondamental: on ne peut pas s’attendre à ce qu’un enfant n’utilise plus la violence si les adultes qui l’entourent l’utilisent eux-mêmes, quelle que soit la forme que prenne cette violence : violence physique (fessé, tape, claque, tirage par le bras…), violence émotionnelle (retrait d’amour, punition, isolement, mépris…), violence verbale (cri, critique, chantage, menace, humiliation…).

Dans l’approche de la résistance non violente, il est important de souligner l’importance de garder toujours en considération la part de l’enfant qui n’est pas violente, qui aspire au calme et à la paix et qui va aider le parent à atteindre ses objectifs de sérénité familiale.

L’enfant n’est pas seulement violent ou agressif, il y a plusieurs voix en lui comme un parlement qui est constitué de différents partis. Aujourd’hui les voix positives sont en minorité mais le recours à la résistance non violente va les renforcer. – Nathalie Franc et Haim Omer

L’objectif est de faire basculer l’enfant et de permettre à ce qui est doux en lui de reprendre le dessus. Cela peut passer par :

  • des formulations bienveillante à « la bonne partie » de leur enfant (pratiquer le renforcement positif, valoriser les progrès même minimes, remarquer les efforts plutôt que les résultats, encourager les plus petits pas possibles…)
  • le refus des services motivés par des “mauvaises” raisons (peur des réactions de l’enfant, culpabilité, honte, usure émotionnelle, harcèlement de l’enfant…). Un parent peut dire à son enfant opposant :”Je ne veux plus te rendre service par peur comme je le faisais jusque-là, mais par contre cela me fait plaisir de te faire plaisir.” Ce plaisir est interne au parent et permet de remettre du positif dans la relation sans que cela soit le résultat d’une exigence ou d’une obligation (par exemple préparer le plat préféré de son enfant, lui acheter un livre ou un magazine qui lui plaît mais qu’il n’a pas demandé…)
  • un positionnement clair pour ne pas se laisser entraîner dans des spirales d’accusation et de culpabilisation. Les parents doivent délivrer un message clair à l’enfant (aussi bien verbalement que dans leur communication non verbale). Par exemple en disant « Je refuse d’être attaqué et culpabilisé, j’ai compris que rien ne pourra te convaincre alors je ne rentrerai plus dans ces discussions. Ce qui m’intéresse c’est ce qui se passe aujourd’hui et ce qui se passera demain ».
  • une conscience tranquille et un raisonnement en termes de besoins pour chaque membre de la famille (ne plus agir par culpabilité ou peur des comportements futurs de l’enfant, voire des représailles).

2.Il faut battre le fer quand il est froid

Ne jamais réagir à chaud sous le coup de l’émotion. La capacité à différer une réponse éducative quelle qu’elle soit va renforcer le parent dans sa place et donner de la force à cette réponse.- Nathalie Franc et Haim Omer

Quel que soit le comportement de l’enfant opposant, les parents peuvent apprendre à décaler leurs décisions pour en faire part dans un moment de « froid » émotionnel et non dans un moment de crise, “à chaud”. Cela doit pouvoir s’appliquer dans les situations de provocation de la part de l’enfant, d’agressivité verbale voire physique, et aussi dans les situations où l’enfant exige une réponse immédiate pour telle ou telle demande (et lorsque son comportement peut s’apparenter à du harcèlement en vue d’obtenir gain de cause).

Là encore, le défi des parents va être de ne pas succomber à la violence. Lutter contre sa propre impulsivité n’est jamais une chose facile dans les situations conflictuelles. Il s’agit souvent d’un véritable travail sur soi. Le silence est une arme puissante face aux comportements de violence ou de provocation de l’enfant, pour autant il ne s’agit pas d’un silence de soumission mais d’un silence d’action.

Refuser d’entrer dans l’escalade de violence et dans les jeux de pouvoir avec les enfants opposants ne signifie pas ne rien faire et juste subir (d’être insulté, dénigré, malmené ou violenté). Il s’agit d’éviter de réagir à chaud pour ne pas renforcer la violence et d’utiliser une réaction non violente différée.

Lors des actes de violence de l’enfant, le parent doit adopter une attitude calme tant que possible, mais il doit également faire savoir à l’enfant qu’il ne va pas en rester là. C’est ainsi qu’il annonce déjà sa réaction différée. « Je n’accepte pas ce qui vient de se passer, je vais y réfléchir et voir ce que nous pouvons faire par rapport à ça ». Cette annonce montre que le parent ne démissionne pas et ne se soumet pas. – Nathalie Franc et Haim Omer

“Battre le fer quand il est froid” nécessite donc une action différée, dirigée vers l’enfant. Cela présuppose que les parents aient identifié ce qu’ils acceptent de faire pour l’enfant par crainte. Cette action différée, dont le temporalité peut dépendre du contexte – de quelques heures à quelques jours, peut prendre la forme d’un temps calme avec l’enfant au cours duquel les parents vont annoncer qu’ils n’acceptent pas ce qui s’est passé et qu’ils veulent trouver une solution commune pour résoudre ce problème. Les parents parleront d’eux-mêmes, de leurs émotions, de leur inconfort, des valeurs qui leur sont chères : « Je ne me sens pas à l’aise de te rendre ce service. J’ai décidé de ne pas le faire car j’ai l’impression d’être obligé de le faire alors que j’aimerais vivre plus de joie dans notre vie de famille.» (plutôt que  « Avec tout ce que tu fais, tu ne mérites vraiment pas que l’on te rende ce service »).

Ce temps est l’occasion pour l’enfant de proposer ses propres solutions et de s’engager à les mettre en oeuvre (voir : La solution gagnant-gagnant pour favoriser l’adhésion des enfants aux règles de la vie collective).

C’est une étape qui permet aux parents de gagner en force et en présence: ce n’est pas un duel qui doit se conclure par le fait de trouver une solution ou pas, il n’y a pas de camp victorieux mais c’est bien une manifestation de présence qui a une signification positive profonde. – Nathalie Franc et Haim Omer

3.Il ne faut pas vaincre, mais persister

Le parent ne doit pas s’imaginer qu’en modifiant ponctuellement son comportement et en adoptant une attitude non violente, la partie sera gagnée et la paix retrouvée. L’efficacité de la méthode ne pourra s’inscrire que dans la durée car tout retour en arrière (avec recours à la violence) va décrédibiliser les démarches entreprises. – Nathalie Franc et Haim Omer

La non violence invite à une modification durable de nos comportements en tant que parent et à la construction d’une nouvelle dynamique familiale stable. Cheminer vers la non violence éducative est un long processus et il se peut que l’agressivité d’un enfant opposant augmente dans un premier temps. La persévérance et la détermination seront les ressources essentiels des parents.

2 compétences utiles pour la résistance non violente

1.Apprendre à utiliser le silence 

La résistance non violente est utile quand les paroles cessent d’être efficaces et se transforment en dialogues de sourds. Plus un parent est dans la discussion ou l’explication avec son enfant violent, moins ce dernier est prêt à agir et à modifier son propre comportement.

Pour aller plus loin : Parentalité : agir plus, parler moins et donner moins de choix aux enfants

2.La non-violence sera votre force mentale

Le simple fait qu’un parent adopte une attitude cohérente avec ses valeurs va lui permettre de se retrouver.

Résister à la tentation d’avoir recours à la violence, différer ses réactions, utiliser le silence et garder un cap ferme sont autant de défis que le parent doit relever pour l’intérêt de sa famille. Le fait d’y parvenir va constituer une première victoire. – Nathalie Franc et Haim Omer

La non violence invite les parents à se décentrer du comportement de leur enfant pour se recentrer sur leurs propres comportements et réactions en fonction de leurs émotions, de leurs besoins et de leurs valeurs. Cette reconnexion avec les valeurs donne de la force mentale.

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Source : Accompagner les parents d’enfants tyranniques : programme en 13 séances (Les ateliers du praticien) de Nathalie Franc et Haim Omer (éditions Dunod).

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