Ce dont le cerveau humain a besoin pour se remettre d’un traumatisme

se remettre d'un traumatisme

Bassel Van der Kolk, expert mondial du traumatisme, décrit ce dont notre cerveau a besoin pour se remettre d’un événement traumatisant  :

  • trouver une manière de nous calmer et de nous concentrer;
  • apprendre à maintenir ce calme en réponse à des images, des pensées, des sons ou des sensations physiques qui nous rappellent notre passé;
  • trouver une façon de nous sentir pleinement vivants dans le présent et en relation avec les personnes qui nous entourent;
  • ne pas avoir à garder de secrets à notre propre égard (parler, exprimer les émotions sans retenue/ les reconnaître/ les accepter, avoir accès aux informations)

Réaliser ces objectifs revient en fait à redonner du pouvoir au cerveau rationnel (au néo cortex, siège de la réflexion), à favoriser l’intégration des souvenirs traumatiques et à diminuer l’activation du cerveau émotionnel en réponse aux situations rappelant l’événement marquant.

8 suggestions pour se remettre d’un traumatisme et cheminer vers la bientraitance (envers soi et ses enfants)

1.Passer par le corps

Différentes techniques aident à apaiser l’activation du système de stress, à éviter les moments de débordement émotionnel et à revenir dans la fenêtre de tolérance lorsque l’on est débordé par ses émotions: le yoga, les exercices respiratoires, le Tai Chi, le Qi Gong, les arts martiaux, mais aussi la pratique de la musique rythmique (percussions).

Le focusing peut également être une manière de (ré)apprendre à faire confiance au corps. Nos sensations corporelles ont en effet beaucoup de choses à nous dire et le corps possède des solutions à un grand nombre de nos problèmes. Le concept du focusing a été créé par Eugene T. Gendlin, philosophe et psychologue à l’Université de Chicago. Il appelle focusing « le fait de prendre conscience d’une perception physique interne particulière« . Avec cette approche, Gendlin a voulu redonner au ressenti corporel la place qui lui revient et parle dune « force positive et vitale » du corps. Le focusing se passe à un niveau plus profond que les sentiments. Le sens corporel n’est pas une émotion au même titre que la colère, la peur ou la joie. C’est la perception de la situation émotionnelle totale, de plusieurs éléments reliés à une émotion particulière ou de la source de l’émotion. Il s’agit de prêter une sorte d’oreille intérieure à une perception de prime abord vague (nommée le « sens corporel« ), qui se précise ensuite avant d’être ressentie physiquement. L’idée est vraiment de prendre conscience, avec le cerveau, de certains éléments qu’on ressentait uniquement dans le corps auparavant.

Lire aussi : 7 étapes pour utiliser nos émotions comme des occasions de gagner en liberté personnelle

2.La pleine conscience 

La pleine conscience permet d’être présent à ce qui se passe en soi (les sensations du corps, les émotions ressenties, l’intensité de ses émotions, les pensées qui les accompagne), sans le nier ou chercher à le réprimer. Eviter de ressentir les émotions et sensations liées à un passé douloureux ne fait qu’aggraver le risque d’être submergé par elles.

Tout ce qui favorise la pleine conscience à ce qui est aide à développer les compétences nécessaires pour ressentir les émotions et sensations douloureuses du passé sans être débordé par elles.

La pratique de la méditation par la pleine conscience peut s’avérer utile car elle pacifie. La paix intérieure n’est pas l’absence de troubles mais la capacité d’entrer en rapport, avec empathie et bienveillance, avec l’ensemble de la réalité, y compris avec sa propre colère, sa propre tristesse dont on reconnaît ainsi l’existence au lieu de les nier ou les mettre sous le tapis.

Être en paix avec soi-même, c’est être présent aux émotions fortes, douloureuses; c’est ne rien ajouter ni enlever à l’expérience vécue; c’est autoriser des vagues et admettre le tumulte intérieur… et c’est ce que propose la pratique de la pleine conscience.

Pour aller plus loin : 4 manières de cultiver la pleine attention au quotidien

3.L’importance d’un entourage présent et bienveillant

L’ocytocine, hormone de l’amour, produite lors des expériences de plaisir et de sécurité affective via des relations bienveillantes est antagoniste des hormones de stress.

La sécurité et la terreur sont incompatibles. Lorsque nous sommes terrifiés, rien ne nous apaise mieux que la voix rassurante ou l’étreinte ferme d’une personne de confiance. – Van der Kolk

C’est pour cette raison que les maltraitances infantiles sont si destructrices, en particulier lorsqu’elles viennent des parents : la base de sécurité vers lequel l’enfant devrait pouvoir se tourner pour trouver du réconfort est précisément la source de sa peur et de sa détresse. L’enfant doit donc trouver d’autres ressources pour faire face, ce qui génère des risques à long terme dont la dissociation, les conduites addictives, la dépression et les conduites suicidaires, l’auto-agressivité, la panique chronique, les difficultés relationnelles et, en dernière instance, la terreur de se laisser approcher par autrui, que ce soit physiquement ou affectivement.

Pour compléter sur la notion de dissociation en lien avec la mémoire traumatique, lire cet article : Adopter une éducation bientraitante : impossible (ou presque) sans travail sur la mémoire traumatique

4.Des activités rythmiques de groupe

Les activités rythmiques (percussions, danse, musique…) en groupe aident à la fois à se sentir inclus dans une communauté humaine (nourrir le besoin d’appartenance et de reconnaissance) et à se reconnecter avec ses sensations corporelles dans le moment présent.

5.Le contact physique et le toucher

Le contact physique peut se faire sous forme indirecte, par exemple le massage de l’eau sur son corps à la piscine, ou directe, par des massages, une visite chez le coiffeur ou même chez le pédicure pour ceux qui ont vraiment peur d’être touchés de façon trop proche ou qui ne supporte pas un contact intime avec une personne inconnue.

Le plus important est de trouver une forme de toucher qui ne provoque pas de stress, qui sera vécue comme plaisante car non menaçante. Progressivement, et avec consentement, il sera possible d’aller vers un toucher plus intense ou plus impliquant, pour regagner avec le temps la confiance envers les autres et leur contact.

6.Le mouvement et l’action

Les activités théâtrales ou d’autres pratiques expressives (danse, chant, musique…) peuvent aider à sortir des états de figement, de peur ou de prostration traversées au cours de certains moments difficiles.

Certaines psychothérapies exploitent cette idée de remettre le corps en mouvement là où il s’est figé sous l’impact de la peur, sans pouvoir évacuer le stress, notamment la thérapie sensori-motrice et la Somatic Experiencing.

7.Le fait de créer : l’art thérapie

L’art est puissant parce qu’il donne une voix à notre vie. Le fait d’écrire, de dessiner ou de gribouiller apporte un exécutoire aux émotions et aux énergies qui cherchent à se manifester et/ou qui sont coincées en nous. Des choses qui échappent au conscient peuvent ainsi être relâchées, ce qui permet de maintenir l’équilibre psychique (et même physique).

L’expression créative et artistique fait baisser le stress car avoir un canal d’expression procure une soupape de sécurité.

Par la création personnelle, des fragments de la vie intérieure prennent une forme tangible devant nos yeux. Le fait d’avoir devant nous un texte, un dessin ou un collage issu du monde intérieur créer une distance avec l’aspect de nous qui s’est exprimé.

Les arts ont un pouvoir énorme pour nous reconnecter à qui nous sommes et à notre potentiel créateur. Ils peuvent nous aider à retrouver et à exprimer nos expériences intérieures, puis à les intégrer au conscient.

8.Un accompagnement thérapeutique 

Toutes ces activités ne remplacent pas l’accompagnement d’une professionnel en cas de blocages intenses, de difficultés à vivre au quotidien. La relation thérapeutique est l’endroit idéal pour réapprivoiser en toute sécurité ses émotions, les relations avec les autres, son corps.

Dans son livre  A la rencontre de son bébé intérieur, Joanna Smith propose une approche thérapeutique qui prend soin du bébé intérieur à travers la reconnexion avec la mémoire implicite, celle des événements qui se sont produits avant 3 ans. Le concept de mémoire implicite permet de rendre compte de cette forme particulière de mémoire qui amène les humains à retenir les conclusions d’une expérience sans même se souvenir de celle-ci. Lorsque la mémoire implicite est active, nous n’avons pourtant aucune conscience d’être en train de nous remémorer quoi que ce soit, contrairement à la mémoire explicite, qui s’exprime par l’intermédiaire des souvenirs.

Prendre soin du bébé intérieur, c’est lui redonner la sécurité dont il a manqué à travers le reparentage. Le reparentage est une pratique thérapeutique qui va permettre de réparer ce qui a manqué par le passé, en allant le donner au bébé intérieur de façon « imaginaire ». Le reparentage permet d’entrer en contact avec des parties de soi qui ont manqué d’une intervention parentale suffisamment sécurisante, bienveillante ou aimante, quelle qu’en soit la raison.

Joanna Smith fait référence à l’approche proposée en ICV (thérapie des cycles de vie) pour compléter cette notion de reparentage. L’ICV permet de vivre la sensation du temps qui a passé, afin de dater des événements non digérés et de consolider la sécurité intérieure, en ne se limitant pas au reparentage, qui est parfois insuffisant pour aider à « tourner la page ».

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Source : A la rencontre de son bébé intérieur de Joanna Smith (éditions Dunod). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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