12 principes clés pour favoriser l’épanouissement des enfants hypersensibles (mais pas que)
1.Placer la sensibilité et l’émerveillement au centre de la vie quotidienne.
L’expérience émotionnelle d’admiration et d’émerveillement sublime l’ordinaire en extraordinaire et rend la vie plus savoureuse, pleine de ces micros moments de bonheur. Cette expérience émotionnelle repose sur l’aptitude à trouver, à reconnaître et à prendre plaisir à s’émerveiller face à toute forme de beauté et face à ce qui touche la sensibilité.
Que ce soit par la reconnaissance d’un beau paysage, d’une pièce de musique, d’une oeuvre d’art, d’un talent particulier chez une personne, apprécier la beauté et l’excellence permet à l’être humain de se connecter à quelque chose de plus grand que lui. – Julie Bazinet
Placer l’émerveillement et la sensibilité au coeur du quotidien, c’est accepter de prendre le temps, de ralentir, c’est faire entrer la lenteur dans la vie quotidienne… s’arrêter regarder un escargot, une coccinelle, écouter le chant d’une mésange, sentir le vent dans les cheveux ou la chaleur des rayons du soleil sur le visage.
Respecter la sensibilité des enfants, c’est accueillir les émotions des enfants sans les nier, les moquer, en diminuer l’intensité, c’est rejoindre l’enfant dans ce qu’il est et ce qu’il vit.
Saverio Tomasella, spécialiste de l’hypersensibilité et auteur de J’aide mon enfant hypersensible à s’épanouir, écrit que les adultes qui souhaitent aider un enfant très sensible pourront valoriser sa sensibilité et l’encourager. L’hypersensibilité n’est pas une maladie et les caractéristiques d’une grande sensibilité ne sont pas des symptômes à faire disparaître.
Il est bienvenu de porter un regard positif et optimiste sur la sensibilité. Les enfants sensibles sont souvent très intuitifs. Ils sont foncièrement créatifs. Leur empathie leur permet de mieux comprendre les relations entre les individus, et de concevoir favorablement les liens avec leurs amis et camarades, avec leurs frères et sœurs, et même avec les adultes. – Saverio Tomasella
2.Parler avec son enfant, développer la relation, chercher ensemble.
Parler avec son enfant et renforcer le lien parent/ enfant consiste à écouter vraiment, à comprendre ce que l’enfant veut dire, ce qu’il ressent, ce dont il a besoin, ce qu’il veut et que l’adulte respecte l’enfant dans son ensemble.
L’écoute empathique et bienveillante implique d’écouter au-delà des mots prononcés par l’enfant en cherchant à comprendre :
- quels sentiments l’enfant ressent-il ?
- quels besoins l’enfant essaye-t-il d’exprimer au-delà de ce qu’il donne à voir et à entendre ?
Quand le parent adopte une communication empathique et bienveillante, il est centré sur le monde intérieur de l’enfant, il se « branche » sur ce que l’enfant a sur le coeur. Au lieu d’envoyer un message d’adulte (raisonner, critiquer, conseiller, faire la morale…), le parent cherche à faire confirmer par son enfant qu’il a bien compris ses besoins et ses émotions, tels qu’ils sont réellement.
Cette écoute peut passer par des mots du type :
Tu me sembles bien en colère ? J’imagine que…
Tu es inquiète ? Tu aimerais te sentir… ?
Oh ! J’ai l’impression que tu es bien fâché ! Cela semble important pour toi, tu veux m’en parler ?
On dirait que cela te préoccupe. Cela te rend triste ?
Tu semble décidé à…
Adopter l’écoute empathique et bienveillante nécessite une certaine connaissance des émotions et des besoins qui nous animent tous, adultes et enfants.
Quand un enfant a l’impression que son parent essaye de le comprendre et qu’il le respecte (avec éthique pour un lien fort et sain mais sans chercher à faire preuve d’empathie en vue de manipuler), il est enclin à s’ouvrir avec confiance.
Une fois que le parent a deviné ce que l’enfant ressent et ce dont il a besoin, il attend le retour de l’enfant et l’écoute à nouveau entre les lignes sans diriger la conversation dans un sens particulier : quelles émotions et quels besoins s’y cachent ?
Les enfants qui acceptent de se livrer sur leurs problèmes, leurs émotions, leurs besoins n’ont pas tant besoin de solutions que simplement d’être entendus sans jugement et d’être compris. Le simple fait de partager les difficultés et les déceptions avec quelqu’un peut déjà suffire.
Quand bien même les enfants souhaiteraient effectivement de l’aide pour trouver des solutions, ils apprécient d’abord un peu de compréhension et d’empathie.
Apporter une aide utile et efficace tout en laissant à l’enfant la responsabilité du problème et en le prenant au sérieux peut paraître compliqué. Pour y parvenir, nous pouvons poser des questions centrées sur une solution au lieu de proposer nos propres solution.
Ces questions seront orientées autour de deux thèmes :
- que peux-tu faire ?
- si tu fais cela, que se passera-t-il ?
Ces deux questions convoient des messages positifs à l’enfant de la part de ses parents : de l’intérêt, de l’engagement, de la bienveillance, de la confiance. Ici, le ton, la posture et tous les éléments de communication non verbale sont important pour que l’enfant perçoive que l’objectif du parent n’est pas la manipulation ni l’ironie mais une profonde aspiration à le comprendre et à prendre soin de la relation.
3.Chaque jour, prendre du temps seul.e avec elle ou avec lui.
Le réservoir affectif de l’enfant est vidé par la faim, la fatigue, l’isolement, la séparation, le stress, les disputes, des blessures, des écorchures… Et une personne dont le réservoir affectif est vide aura tendance à être plus sensible, à chercher de l’affection et de l’attention par des moyens plus ou moins efficaces, à être plus irritable, moins coopérative.
Remplir le réservoir affectif des enfants peut passer par le fait de s’intéresser à eux, de parler, de les regarder tendrement, de passer du temps exclusif avec eux dès que possible.
Les enfants n’ont pas besoin d’un parent parfait et disponible partout, tout le temps. On ne peut pas être toujours détendu, disponible, empathique. On peut en revanche réparer la relation quand on se rend compte que l’enfant a été blessé.
Remplir sans cesse le réservoir de l’enfant est le fondement des relations cœur à cœur parent/ enfant. Il ne s’agit pas de le remplir pour toujours mais d’y revenir au fil d’innombrables micro-interactions sur une durée qui se compte d’années en années. – Lawrence Cohen
4.Favoriser la détente, le bien-être, le jeu et l’amusement.
La parentalité ludique peut nous donner des pistes pour mettre du jeu dans nos interactions avec les enfants. La discipline telle que le conçoit la parentalité ludique est une occasion de renforcer les liens entre parents et enfants, au lieu d’élever des murs de plus entre eux.
Je vous propose deux jeux pour donner de l’attention à un enfant, inspirés par la parentalité ludique :
- Moi prems, je veux jouer avec toi !
Ce jeu pourra être proposé à un enfant qui a besoin d’attention (par exemple, un aîné qui montre de la jalousie envers son cadet ou un enfant qui revient d’une longue séparation d’avec ses parents – vacances, déplacement professionnel, journée à la crèche…).
Un des parents pourra annoncer à l’enfant qu’il a absolument envie, et même besoin, de jouer avec lui. Ce besoin est irrésistible et doit être comblé maintenant, tout de suite !
Le parent se mettra à courir après l’enfant en disant : « Je veux jouer avec toi !« . L’autre parent se mettra alors en travers du chemin et manifestera lui aussi un désir immense de jouer avec l’enfant : « Non, moi d’abord ! »
Les parents pourront alors simuler une chamaillerie pour savoir qui jouera en premier avec l’enfant :
Non, c’est moi qui jouerai avec lui/ elle en premier !
– Non, moi prems !
– Pas question, c’est mon tour !
L’enfant devrait alors rire et sera amené à reconquérir la certitude dont il a besoin sur l’amour que ses parents lui portent.
Source : Peps magazine – printemps 2015
- L’oeuf d’amour
J’en ai parlé à plusieurs reprises sur le blog mais j’aime particulièrement cette idée pour « recharger » l’enfant en amour.
C’est un jeu que propose Lawrence Cohen dans son livre Qui veut jouer avec moi ? (éditions Poche marabout).
Il le propose notamment pour charger les aînés en amour lors de l’arrivée d’un petit frère ou d’une petite sœur qui « accapare » le temps des parents : installez les aînés sur vos genoux et annoncez leur que vous allez les remplir d’amour de papa et/ou de maman; commencez par tapoter les orteils, remontez tous le long du corps et finissez par un bisou sur le sommet de la tête.
Vous pourrez même ajouter « l’œuf d’amour. » Faites semblant de casser un oeuf sur la tête de votre(s) enfant(s) puis suivez le mouvement de l’oeuf qui coule avec vos doigts. L’amour dégoulinera alors tout le long de la tête et du corps de l’enfant 🙂
5.Faire des pauses, bien dormir et boire de l’eau régulièrement.
Bien dormir et en quantité suffisante est essentiel au bien-être.
Le sommeil joue un rôle important dans les apprentissages, la régulation des comportements, du système biologique et psychique.
Par ailleurs, la seule boisson indispensable dont le cerveau a besoin est de l’eau. Le cerveau a besoin d’eau pour faciliter la création de nouvelles connexions neuronales. Non seulement la déshydratation peut augmenter le niveau de stress mais le fait de boire de l’eau fraîche peut avoir un effet apaisant.
6.Laisser l’enfant découvrir par lui-même.
Une aide utile n’est pas synonyme de « faire à la place ». Quand nous faisons quelque chose que notre enfant sait déjà faire à sa place ou quand nous empêchons notre enfant d’apprendre à faire tout seul, nous entravons son développement naturel. Aider utilement l’enfant, c’est le faire seulement quand il est en difficulté, s’il est d’accord pour être aidé et en montrant plutôt qu’en faisant à la place.
Si l’enfant se débrouille seul, aidons-le en le laissant faire tout seul.– Emanuelle Opezzo (éducatrice Montessori)
Pour autant, limiter nos interventions ne veut pas dire laisser l’enfant faire tout et n’importe quoi. Quand l’enfant se met en danger, s’excite au point de s’énerver, manque de respect (aux autres, au matériel, aux règles de vie) ou montre de la peur, notre intervention est justifiée.
Nous pouvons avoir quelques indications en tête quand il s’agit d’aider utilement les enfants (hypersensibles ou non) :
- montrer aux enfants que chaque chose a un début, un déroulement et une fin pour les inciter à entreprendre jusqu’au bout et ne pas abandonner en chemin.
- nous exercer à limiter nos interventions verbales et physiques.
- observer l’enfant sans parler avant d’intervenir. On gagnera toujours à ne pas intervenir trop rapidement (sauf en cas de danger bien sûr).
- si nous constatons que notre enfant est en difficulté et qu’il ne demande pas d’aide, nous pouvons lui dire que nous observons ses efforts, lui proposer de lui remontrer comment faire pour qu’il essaye à nouveau.
- demander à l’enfant s’il est d’accord pour que nous l’aidions et lui décrire ce que nous allons faire.
- passer du temps avec les enfants pour leur enseigner comment s’y prendre et mettre en mots nos attentes (verbaliser et expliciter les consignes) pour ne pas risquer de créer de malentendus entre adultes et enfants.
7.Encourager la curiosité de l’enfant.
On fait une faveur aux enfants quand on les engage dans la construction du savoir plutôt que leur servir le savoir de manière passive. Cultiver l’esprit de curiosité et l’art de poser des questions permet de maintenir ardentes les braises de l’apprentissage que chaque enfant porte en lui.
Pour aller plus loin : Gardons intacte la curiosité naturelle des jeunes enfants, le reste suivra ! (8 idées pour y parvenir)
8.Développer le respect mutuel.
Amener les enfants aux respect des autres (et d’eux-mêmes) passe par le nécessaire respect de leurs limites personnelles par les adultes qui les entourent. Le respect ne se prêche pas par des leçons de morale mais se transmet par démonstration (sinon, nous n’apprenons pas aux enfants à faire preuve de respect mais à… prêcher).
Nous manquons parfois de respect envers les enfants sur les points suivants et tout le monde (adultes et enfants) gagnerait à y être plus attentif :
- Le respect des limites corporelles
- Le respect de leurs affaires personnelles et de leur budget
- Le respect de leur espace vital
- Le respect des émotions (par exemple, « mais non, ça ne fait pas peur »)
- Le respect du temps personnel
- Le respect des apprentissages et des échecs
9.Se mettre à son écoute.
Accorder un moment où l’enfant peut parler sans interruption permet de se concentrer sur la version de la réalité de l’enfant qui parle. En écoutant sans commentaire, nous laissons nos propres pensées, opinions, jugements, conseils, solutions, expériences ou réconforts en dehors du processus de communication.
On pourra encourager l’enfant à continuer de parler avec des « hum hum« , « continue« , « je vois« , « ah oui ?« . L’idée principale à garder en tête est que l’enfant a surtout besoin de se sentir entendu.
Le risque quand les adultes s’approprient les temps de parole des enfants est que ces derniers cessent de se confier aux premiers.
Le concept de l’écoute active telle que développée par Thomas Gordon consiste à paraphraser ce que l’enfant a dit – reformuler l’essentiel des propos, en utilisant nos propres termes, sans ajouter nos commentaires.
Enfant : C’était mon ballon, mais ils ne voulaient pas me laisser l’utiliser. Tous les autres ont joué avec, et moi je ne l’ai même pas touché.
Parent : Alors, ils ne voulaient pas te laisser jouer quand c’était ton tour.
Dans cet exemple, l’enfant se sentira compris et libre de continuer à dire ce qu’il veut plutôt que d’avoir à répondre à une question sur ce qui s’est passé , à une critique sur le fait qu’il devrait s’imposer ou un conseil non sollicité sur le fait d’aller jouer avec d’autres enfants.
10.Stimuler sa créativité et proposer des activités artistiques.
Saverio Tomasella écrit que les enfants très sensibles aiment souvent pratiquer une activité artistique. Elle leur offre un cadre favorable pour mieux connaître leurs émotions et les exprimer. Elle permet aussi d’en enrichir la palette. Une forte sensibilité offre des perceptions à la fois plus vives, plus fines et plus nuancées. Elle enrichit le regard, l’écoute, le goût, tous les autres sens, sans oublier les capacités d’expression.
11.Ne pas le juger et respecter son vécu émotionnel.
Parfois, les préoccupations qui perturbent un enfant sont ridicules aux yeux d’un adulte. Pourtant, les problèmes des enfants (comme la perte d’un caillou ou un monstre sous le lit) sont plus que sérieux pour eux (surtout pour les enfants hypersensibles).
De notre point de vue d’adulte, il nous est parfois difficile de mesurer la gravité que ce problème revêt pour l’enfant. Pourtant, ces problèmes nous offrent l’opportunité de pénétrer dans son monde intérieur et de prendre au sérieux ses préoccupations.
Les expressions qui nient la réalité de l’enfant (comme « ne sois pas bête », « ne fais pas ton bébé », « ne pleure pas », « ne sois pas si sensible ») sont à proscrire car elles lui donnent l’impression que sa version de la réalité est sans importance, dépourvue d’intérêt, voire que cette réalité n’existe pas l’empêchant de se fier à ses propres impressions.
12.Être fiable et juste.
Pour Saverio Tomasella, la fiabilité est véritablement la fondation nécessaire à toute relation saine, quelle qu’elle soit et à tout âge, mais plus encore pour un enfant.
Lorsque les deux parents sont fiables, l’environnement quotidien de l’enfant est suffisamment porteur pour favoriser sa maturation. Un tel environnement propice lui apporte l’aisance, la confiance et la sérénité nécessaires pour qu’il puisse mener à bien les nombreux apprentissages de son quotidien. L’enfant y trouve aussi le réconfort et la réassurance dont il a besoin lorsqu’il est perturbé. – Saverio Tomasella
Il peut bien sûr arriver que des moments de solitude face à l’inconnu surviennent, que les adultes ne soient pas toujours disponibles (physiquement et/ou affectivement). Quand ces moments ne durent pas trop longtemps, l’enfant peut en sortir grandi car il aura eu l’opportunité de développer des capacités nouvelles pour se débrouiller seul dans une situation inédite, voire difficile. Cela est d’autant plus vrai quand l’enfant aura été entraîné à développer des compétences de régulation émotionnelle en amont (revenir au corps, aux sensations, à la respiration) et que les situations difficiles sont “travaillées” en aval par le moyen de l’écoute active.
Ces principes pour aider les enfants hypersensibles à s’épanouir sont d’autant plus importants qu’une sensibilité étouffée, peu valorisée, peut entraîner certains enfants vers des conduites répétitives (jeux vidéo, Internet, plus tard cannabis…) et augmenter les risques d’addictions.
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Source : J’aide mon enfant hypersensible à s’épanouir : du tout-petit à l’adolescent, comment apprivoiser son hypersensibilité de Saverio Tomasella (éditions Leduc S.)
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