Les apprentissages autonomes : une approche pour apprendre sans école (les enfants s’instruisent-ils eux-mêmes ?)
John Holt, pédagogue américain, affirme que les enfants s’instruisent eux-mêmes sans enseignement. Il a consacré une partie de sa carrière à étudier les apprentissages autonomes.
On peut facilement observer que les enfants sont passionnément désireux de comprendre le plus possible le monde qui les entoure, qu’ils sont très doués pour cela et qu’ils le font à la manière de scientifiques, en créant de la connaissance à partir de l’expérience. Les enfants observent, s’interrogent, découvrent, élaborent et ensuite ils testent les réponses aux questions qu’ils se posent. Quand on ne les empêche pas de faire toutes ces choses, ils continuent à les faire et ils deviennent de plus en plus compétents. – John Holt
Dans son livre Les apprentissages autonomes, il écrit : Que fait-on quand on est en train d’apprendre, quand on crée de l’apprentissage ?
Eh bien, on observe, on regarde, on écoute. On touche, goûte, sent, manipule et parfois on mesure et calcule. Et on s’interroge, on se dit : “Pourquoi cela ?” ou “Pourquoi est-ce comme ça ?” ou “Est-ce que cette chose produit cet effet ?” ou “Qu’est-ce qui fait que cette chose arrive ?” ou “Est-ce qu’on peut la faire arriver différemment ou mieux ?”; ou encore “Est-ce qu’on peut faire disparaître la larve de hanneton des plants de salade ?” ou “Peut-on produire plus de fruits ?” ou “Peut-on réparer la machine à laver ?” ou que sais-je.
Et nous inventons des théories, ce que les scientifiques nomment des hypothèses; nous avons des intuitions, nous nous disons : “Peut-être est-ce dû à ceci” ou “est-ce que cela ne pourrait pas être à cause de cela ?” ou “Peut-être que si je fais ceci, cela va se produire.” Et ensuite nous testons ces théories ou ces hypothèses.
Nous pouvons les tester simplement en posant des questions à des personnes dont nous pensons qu’elles en savent plus que nous, ou nous pouvons les tester par une observation plus approfondie.
Nous pouvons nous dire : “Je ne sais pas trop ce qu’est cette chose, mais peut-être que si je la regarde encore je vais trouver.” Ou bien peut-être allons nous planifier des expériences : ” Je vais essayer de mettre ça sur les plants de salade et voir ce que ça fait sur les larves de hanneton” ou “Je vais essayer autre chose”.
Et, à partir de tout cela, de différentes manières, nous découvrons que notre intuition n’était pas si bonne, ou au contraire, qu’elle était excellente, et nous continuons, nous observons encore, nous spéculons encore. Nous posons plus de questions, nous élaborons plus de théories et nous les testons.
Ce processus crée de l’apprentissage et nous le faisons tous. […] Et c’est exactement ce que font les enfants. Ils travaillent d’arrache pied à ce processus à chaque instant de la journée. Quand ils ne sont pas en train de manger ou de dormir (et encore), ils créent du savoir. Ils observent, pensent, spéculent, théorisent, testent et expérimente en permanence et ils sont bien meilleurs que nous, adultes, à ces tâches. L’idée même que nous pourrions enseigner à des enfants comment apprendre a fini par m’apparaître totalement absurde.
Or l’un des principaux problème de l’école est qu’on demande souvent aux enfants de répéter comme quelque chose de logique quelque chose qui ne leur semble pas du tout (ou pas encore) logique.
Ils finissent par accepter comme une vérité tout ce que l’autorité dit et ils n’essaient plus de tester ou de vérifier. Après plusieurs années sur les bancs de l’école, ils oublient même comment tester.
Quelles ressources pour s’instruire ?
John Holt a consacré beaucoup de son temps à proposer des alternatives à l’école (plutôt que des écoles alternatives). Dans son ouvrage Apprendre sans l’école, il cite plusieurs de ces alternatives :
- l’instruction en famille (unschooling ou apprentissage autonome sans enseignement),
- la fin de l’instruction obligatoire : des écoles fréquentées par choix, des professeurs choisis par des apprenants volontaires,
- les réseaux d’échange de savoirs,
- les médiathèques,
- la presse,
- les vidéos ou tutoriels sur Internet,
- la méthode Suzuki pour la musique,
- se filmer, s’enregistrer, se regarder dans un miroir pour la pratique d’un sport ou de la musique (pour avoir un feedback et s’auto corriger),
- contacter des personnes ressources.
Quel rôle des adultes ?
Pour autant, le rôle des adultes est prépondérant : ils doivent être attentifs, bienveillants et suffisamment présents pour mettre à disposition des ressources qui pourront aider les enfants, tout en restant vigilants à ne pas chercher à faire aller les enfants là où ils n’ont pas le projet d’aller.
En cela, John Holt distingue le P-rofesseur du p-rofesseur. Un P-rofesseur croit (et arrive à convaincre ses élèves) que tout ce qu’ils apprennent doit être enseigné.
Un p-rofesseur est un “coach” qui ne s’impose pas mais qui est disponible quand on le sollicite : il soutient l’apprenant en étant présent, en posant des questions, en disant à l’enfant qu’il est sur le bon chemin quand c’est le cas, en répondant aux questions qui lui sont posées. Le p-rofesseur augmente progressivement la difficulté des exercices, donne des feedbacks, encourage l’apprenant à s’auto corriger et à développer ses propres critères de réussite. La tâche primordiale de tout p-rofesseur est d’aider l’apprenant à ne plus dépendre de lui, de lui apprendre à être son propre professeur.
Le vrai p-rofesseur doit toujours être en train de travailler à sa mise au chômage. – John Holt
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John Holt est l’auteur de plusieurs livres qui proposent des ressources pour apprendre sans école à travers les apprentissages autonomes et informels (aux Editions L’Instant Présent) :
- Les apprentissages autonomes : comment les enfants s’instruisent sans enseignement
- Apprendre sans école : des ressources pour agir et s’instruire