Projet d’éducation à la paix dans les écoles : un exemple d’ateliers inspirés par l’Université de la Paix et la Communication Non Violente

On découvre dans cette vidéo les ateliers de sensibilisation à la Communication Non Violente menés par Valérie Detry, formée en Communication Non Violente, auprès d’enfants dans une école élémentaire de Belgique.

Ces ateliers s’articulent en 7 modules.

1.Développer l’estime de soi et son côté unique

Il s’agit d’amener chaque enfant à prendre conscience du trésor qu’il porte à l’intérieur de lui-même. Chaque enfant est unique et peut apporter son talent, contribuer au monde de manière positive.

Il est capital de révéler le potentiel présent au cœur de chaque personne car le meilleur inspire le meilleur et le beau suscite le beau.

Valérie Detry pose des questions aux enfants pour faire émerger leur potentiel :

  • Qu’est-ce que tu aimes faire ?
  • Qu’est-ce que tu ressens quand tu le fais ?
  • Qu’est-ce que tu peux apporter de précieux au groupe, au monde ?

On rejoint ici la notion d’Elément chère à Ken Robinson qui affirme que nous devons reconsidérer l’importance qu’il y a à nourrir le talent humain, tout en sachant que celui-ci s’exprime différemment en chaque individu. 

citation éducation positive

 

2.Coopérer : apprivoiser la confiance dans le groupe

Les jeux coopératifs favorisent la confiance et le lâcher prise.

La notion de faire ensemble sans notion de perdant ou de gagnant, de contribuer pour le simple plaisir de contribuer sans enjeu de hiérarchie entraîne de la confiance (en soi-même et dans le groupe). La coopération pose les premiers jalons de la paix.

Des exemples de jeux coopératifs facilement applicables en classe (testés et approuvés !) : 5 jeux coopératifs, des clés pour une autre éducation. 

 

3.L’écoute du coeur et du corps

Valérie Detry pose dans cet atelier les principes de base d’une communication efficace et non violente. Elle y explique que la communication est un échange : je donne (je dis) et je reçois (j’écoute). On retrouve ici des éléments développés par Jacques Salomé, psychosociologue. Il utilise l’image de l’écharpe relationnelle car une relation a toujours deux bouts (comme une écharpe). Chacun est responsable de son bout. Cette vision est très profonde car elle nous oblige à nous sentir responsables de :

  • ce que l’on envoie : messages positifs et négatifs,
  • ce que l’on reçoit,
  • ce que l’on fait des messages reçus : comment on réagit aux réponses émises par l’interlocuteur. Si je fais une proposition ou une invitation, il se peut que l’autre accepte ou qu’il refuse. Quoi qu’il en soit, sa réponse est liée à ce qu’il est, ce qu’il ressent, ce qu’il vit, ce qu’il préfère… mais pas nécessairement à qui je suis moi. Or notre égocentrisme nous pousse à rapporter tous les comportements et messages d’autrui à nous !

Valérie Detry explique aux enfants qu’une grande partie de la communication se fait sur un mode non verbal et qu’il est important d’être à l’écoute du corps (le sien et celui de l’autre) et du coeur (encore une fois le sien et celui de l’autre).

Pour être efficace, un message avant même de quitter son émetteur, doit refléter une juste synchronisation entre la tête, le coeur et le corps de ce dernier. – Ostiane Mathon

Pour aider les enfants à se mettre à l’écoute de leur corps et de leur coeur, Valérie Detry utilise plusieurs techniques :

 

4.Un regard de bienveillance

Cette étape consiste à apprendre la première étape du processus de la Communication Non Violente : observer sans juger.

Communication Non Violente par Marshall Rosenberg

Pour ce faire, Valérie Detry  utilise les références au chacal et à la girafe. C’est Marshall Rosenberg, fondateur de la Communication Non Violente, qui a le premier utilisé ces références sous forme de deux marionnettes.

Le langage chacal est fait de jugements, critiques et reproches. Il coupe de la vie.

  • Le chacal pose des étiquettes sur les gens, les rabaisse.
  • Le chacal fait des diagnostics et accuse.
  • Le chacal s’exprime par exigence, par ordre.
  • Le chacal joue sur le sentiment de culpabilité des autres pour les contrôler.
  • Le chacal n’aime pas prendre la responsabilité de ce qu’il veut faire ou faire faire.

Le langage girafe est le langage du cœur et des “tripes”.

  • La girafe écoute avec empathie.
  • La girafe élève sa vision grâce à son long cou.
  • La girafe s’exprime par requête.
  • La girafe pose des questions pour décoder ce que l’autre tente d’exprimer maladroitement et agressivement.
  • La girafe prend sa part de responsabilité dans les réactions des autres à son égard.

Valérie Detry  propose des jeux aux enfants : le jeu de la girafe et du chacal pour différencier les jugements/ critiques et les observations objectives. Les enfants rapportent des propos et ils doivent estimer s’il s’agit du langage chacal ou bien du langage girafe.

Les enfants sont également invités à travailler la capacité d’observer et à devenir conscients de leurs manières de réagir en référence à des animaux (ex : la tortue comme symbole du repli sur soi).

Un autre jeu pour travailler ces compétences : Le jeu des chacals et des girafes (pour s’entrainer à la communication non violente)

 

5.Au coeur des émotions

L’objectif de cet atelier est d’expliquer la deuxième étape de la CNV aux enfants : les émotions sont des signaux qui renseignent sur des besoins insatisfaits. Il est alors important d’identifier, comprendre et d’utiliser les émotions à bon escient.

Valérie Detry s’appuie sur les livres Un jour hérisson ou un jour papillon ? (de Vincent Mathy – éditions Albin Michel) et Homme de couleurs de (Jérôme Ruillier – éditions Mijade).

Puis les enfants sont invités à nommer leurs émotions à partir d’une roue des émotions sur laquelle apparaissent les émotions primaires et des synonymes plus ou moins intenses.

vocabulaire des émotions

Enfin, les enfants s’expriment à travers l’art (ici l’argile pour modeler leurs émotions et leurs ressentis).

 

6.L’arbre des besoins 

Cet atelier correspond à la troisième étape du processus de CNV : prise de conscience et expression du (ou des) besoin(s) non satisfaits à l’origine de l’émotion.

Valérie Detry utilise un arbre pour représenter les besoins fondamentaux qui nous animent tous : les besoins physiologiques primaires sont dans les racines et les besoins qui rendent la vie plus belle sont dans les arbres (amour, reconnaissance, coopération, sécurité…).

besoins fondamentaux cnv

 

Le livre Le conte chaud et doux des choudoudous (de Claude Steiner – InterEditions) sert de support pour insister sur l’importance des besoins relationnels (amour, harmonie, considération, respect, coopération, rire…) et physiques (toucher, protection…).

 

7. Chercher ensemble des solutions qui nous remettent en route : médiateurs en herbe

Dans ce septième atelier, les enfants sont invités à se comporter comme Gigi la girafe. C’est la mise en pratique de la quatrième étape du processus de CNV : formuler une demande positive et négociable qui satisfait les besoins de tous les protagonistes engagés.

Valérie Detry utilise le livre Gigi la girafe au pays des animaux (de Alberto Benevelli aux éditions Esserci) comme support.

Gigi, la girafe voyage par-ci, par-là. Aujourd’hui elle se ballade au pays des animaux. Qui rencontrera-t-elle ? Que fera-t-elle ? Que se passera-t-il ? C’est un mystère … à résoudre en lisant et en observant

Quand on réagit comme un chacal, la dispute commence.

Quand on réagit comme Gigi la girafe, on trouve des solutions qui conviennent à tout le monde. Gigi fait des demandes : “j’aimeras que tu…” et pose des questions : “serais-tu d’accord pour… ?”.

 

8.Semer et célébrer une terre de paix

Le dernier atelier s’appuie là-encore sur un principe important de la CNV : faire preuve de gratitude.

Rester réceptif aux cadeaux de la vie est source d’un bonheur durable. – Agnès Dutheil

Plusieurs scientifiques ont montré que la gratitude a des effets positifs sur l’être humain :

  • en 2003, deux professeurs de psychologie (McCullough et Emmons) ont prouvé que “des personnes qui écrivent au moins une fois par semaine quelques phrases à propos d’un événement qui amène chez eux un sentiment de reconnaissance, ont un niveau de satisfaction nettement plus élevé, sont plus optimistes, ont moins de symptômes anxieux ou douloureux, et ce, au bout de 10 semaines.”
  • Sonja Lyubomirsky prouve que plus une personne est capable de gratitude, moins elle est anxieuse ou dépressive, et moins elle éprouve de sentiments, de frustration, d’envie ou de solitude, plus elle est rassurée sur sa propre valeur, plus elle a confiance en elle et plus elle ressent d’émotions positives.

Faire preuve de gratitude, c’est se réjouir et célébrer ce qui va bien. Ce temps positif permet de partager d’agréables moments, de souder le groupe et de renforcer les relations interpersonnelles.

Valérie Detry y ajoute une autre notion : les pensées positives pour souhaiter du bon aux autres et envoyer de l’amour bienveillant autour de la Terre.

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L’approche proposée ici a beaucoup recours aux travers les jeux, aux livres et aux chansons comme médiateurs, le corps est sollicité pour ancrer les sensations liées aux concepts et idées évoquées. En effet, les yeux servent à observer les faits, le coeur sert à identifier les émotions pour dire comment on se sent et le ventre sert à reconnaître les besoins non satisfaits.

La visualisation positive est omniprésente. On demande souvent aux enfants de prendre contact avec leur intériorité pour penser à des choses positives (par exemple, fermer les yeux et penser à une personne qui donne confiance dans la vie et voir quelles paroles ou quels gestes font émerger cette confiance).