9 principes pour apprendre à communiquer à l’école et à la maison
Jacques Salomé est un psychosociologue qui prêche l’enseignement de la communication à l’école.
Dans son livre T’es toi quand tu parles, il propose une méthodologie et un vocabulaire pour mieux se parler et apprendre à communiquer.
Jacque Salomé utilise l’image de l’écharpe relationnelle pour montrer qu’une relation est semblable à un tuyau, une passerelle sur lequel circulent des messages dans les deux sens.
Une relation a toujours deux bouts (comme une écharpe) : chacun est responsable de son bout. Cette vision est très profonde car elle nous oblige à nous sentir responsables de :
- ce que l’on envoie : messages positifs et négatifs,
- ce que l’on reçoit,
- ce que l’on fait des messages reçus : comment on réagit aux réponses émises par l’interlocuteur. Si je fais une proposition ou une invitation, il se peut que l’autre accepte ou qu’il refuse. Quoi qu’il en soit, sa réponse est liée à ce qu’il est, ce qu’il ressent, ce qu’il vit, ce qu’il préfère… mais pas nécessairement à qui je suis moi. Or notre égocentrisme nous pousse à rapporter tous les comportements et messages d’autrui à nous !
Quels sont les principes fondateurs d’une communication vivante ?
Reconnaître autrui dans sa différence
Les croyances d’autrui lui appartiennent. Celui qui exprime une difficulté veut surtout être entendu, reçu, amplifié, parfois confirmé dans ce qu’il a fait ou vécu. Cette position est valable aussi bien pour les enfants que pour les adultes.
Me reconnaître dans ma différence
J’ose me définir dans ce que je ressens, éprouve, crois ou sais. Se définir, c’est se situer, se positionner, ce n’est pas s’imposer ni même convaincre. Les enfants ont aussi le droit de s’affirmer en dehors de l’approbation de leurs parents.
Reconnaître mes résistances au partage et celles d’autrui.
Quand nous communiquons, nous devons accepter le risque d’une réponse différente de celles que nous attendons. Nous devons lutter contre le sentiment que nous savons tout mieux que l’autre, surtout quand il s’agit d’enfants.
Reconnaître les possibles de l’autre, notamment des enfants.
Tout enfant a un savoir, un ressenti, une expérience de vie. C’est dans l’échange que se font les ajustements successifs.
Quels seraient les 9 principes de base à enseigner à l’école pour apprendre à communiquer ?
1. “Je ne parle plus sur l’autre, je ne le laisse plus parler sur moi.”
J’apprends à mettre fin aux relations “klaxon” : tu, tu, tu. Jacques Salomé conseille de remplacer les tu (“Tu me mets en colère“) par des messages-je (“Je suis en colère”).
2. “J’accepte de parler à mon bout de la relation.”
Je parle de moi en exprimant mes désirs et mes ressentis, sans les transformer en :
- demandes ou exigences
Dire “Je suis dérangé, je te demande d’arrêter la télé. C’est vrai, j’ai ce désir-là” plutôt que dire “Tu m’énerves avec cette télé. Éteins-là !”
- pensées à la place des autres
Supprimer les “JE pense que TU…”.
C’est ce que Marshall Rosenberg, père de la communication non violente, conseille également dans la vidéo à ce lien : Comment identifier un besoin non satisfait derrière un reproche ?
- fausses questions
Demander “Tu n’as pas faim ?”… alors que c’est nous qui avons faim :-). Nous pouvons exprimer notre besoin sans le projeter sur l’autre.
- reproches ou répression (auto-répression ou répression contre autrui).
3. “Je parle de ce que je ressens et j’invite l’autre à parler de lui.”
Au lieu de penser collectivement avec des on/ nous factices et impersonnels comme “NOUS avons aimé ce film”, plutôt dire :“J’ai aimé ce film parce que….. Et toi, qu’en as-tu pensé ?”. L’enfant n’est pas un déclinaison annexe ou un prolongement de ses parents.
Par ailleurs, les on/ nous évacuent la responsabilité des pensées de chacun. Le “je” permet de se les réattribuer et invite au dialogue, à l’argumentation.
La question “et toi, qu’est-ce que tu en penses ?” est fondamentale pour la construction de la confiance en soi des enfants. J’en parle Une question clé pour les apprentissages et la confiance en soi des enfants.
4. “Bien s’entendre ne signifie pas avoir ensemble le même avis, les mêmes sentiments, le même point de vue.”
Je reconnais et verbalise les différences : “Nous différons beaucoup sur ces questions, je souhaite avoir plus de temps pour en parler avec toi.”
5. “J’essaie de mieux différencier ce qui vient de moi (et qui m’appartient) de ce qui vient de l’autre.”
“Tu sembles de mauvaise humeur”, ” je ne suis pas sur la même longueur d’onde que toi”.
6. “Je n’ai plus besoin d’entraîner l’autre dans la soumission, l’opposition ou la répression.”
Je ne nie pas les émotions ou les pensées de l’autre, même des enfants : “On ne dit pas des choses comme ça !” devient “Tu as le droit de trouver que cette femme est laide. Moi, je la vois autrement.”
J’abandonne la répression sur autrui car je l’enferme dans mes propres limites quand je lui transmets mes peurs. Je dis à ma famille et mes amis : “Si tu vis un jour quelque chose de difficile, je me sens capable de t’écouter.”
7. “Je suis seul responsable de mon écoute.”
C’est moi et moi seul qui donne un sens au message reçu et qui me blesse avec. Eleanor Roosvelt écrivait justement :
Personne ne peut nous contrarier sans notre consentement.
8. “Je pratique l’écoute participative plutôt que le système questions/ réponses.”
Les questions d’autrui sont souvent une amorce à un échange espéré. Il faut prendre le temps de se relier à la personne quand je veux communiquer avec elle. C’est celui qui parle qui a quelque chose à dire : il vaut mieux se centrer sur la personne et pas sur le problème.
Quand un enfant demande à ses parents s’ils vont mourir quand il sera grand, les parents ont le devoir de donner du sens à la question : mon enfant
- a-t-il peur d’être seul ?
- cherche-t-il confirmation de la solidité de la relation ?
- essaie-t-il d’attirer mon attention sur un autre enjeu en gestation chez lui ?
9. “Je demande que soit respectée ma longueur d’onde.”
Je ne dévie pas les échanges trop impliquant sur le terrain sensible de l’autre ou je ne formule pas de reproches. Je recadre mon interlocuteur s’il tente de le faire.
“Tu me vois comme [maladroit/ égoïste/ lâche/ paresseuse…]. Je t’invite à ne plus parler sur moi. Je ne me reconnais pas dans cette définition. Dis moi plutôt ce qui se passe pour toi quand tu me voir agir/ parler de telle façon…”.
Cette dernière recommandation de Jacques Salomé est d’autant plus importante qu’il estime à 80% la part des enfants victimes d’agression sexuelle qui ne disent rien à leurs parents de crainte de provoquer une réaction de peur, de défiance ou de violence.
Pourquoi recommander le livre “T’es toi quand tu parles” ?
J’ai particulièrement aimé la lecture de T’es toi quand tu parles car :
- il est court et synthétique : il va directement au cœur du sujet sans jargon incompréhensible par des non initiés,
- il est intelligemment illustré aussi bien avec des exemples écrits de situations qu’avec des images pertinentes et bourrées d’humour,
- il est résolument positif et engagé sans être moralisateur.
On y lit qu’apprendre à communiquer commence toujours par se demander et demander à autrui :
- comment as-tu ressenti cette parole/ cette situation/ cette note/ ce jugement/ ce reproche… ?
- qu’est-ce qui s’est passé en toi ?
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Source : T’es toi quand tu parles, jalons pour une grammaire relationnelle de Jacques Salomé
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