[Surconsommation et enfants] Même les publicitaires savent pertinemment que le bonheur se trouve dans les plaisirs simples de la vie

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Discuter du lien entre argent et bonheur avec les enfants

Dans son livre Tout le monde en a un, sauf moi ! Libérer nos enfants de la surconsommation, Valérie Halfon revient sur les émotions des parents qui craignent de faire souffrir leurs enfants en ne leur achetant pas tout ce qu’ils veulent. Elle estime que certains parents ont peur, en disant non à leurs enfants, que ces derniers croient que la famille est pauvre puisqu’ils ne peuvent pas obtenir la même chose que les autres (un Smartphone dernier cri, un vêtement de marque…) et qu’ils souffrent d’une exclusion sociale (particulièrement vraie à l’adolescence).

Pourtant, Valérie Halfon affirme que ce type de situation est une occasion idéale d’aborder le sujet de l’argent et du bonheur. Il est possible d’expliquer que certains adultes font le choix de s’endetter pour s’acheter s’acheter une chose qu’ils n’ont pas les moyens de payer tout de suite et que cet endettement peut entraîner des problèmes financiers à long terme (difficulté de remboursement, surendettement, privation sur des choses plus essentielles, charge mentale des soucis financiers…). On peut expliquer aux enfants que chacun est libre de faire ce qu’il veut de son argent et que, dans notre famille, nous avons fait un autre choix.

La simplicité peut-elle concurrencer les activités onéreuses ?

Valérie Halfon est conseillère en gestion de budget et relate des témoignages de familles modestes sereines tandis que d’autres familles plus aisées sont obsédées par la question de l’argent. Elle raconte que de nombreuses mères solos modestes dont les enfants sont gâtés par leur père culpabilisent et ont l’impression que leurs enfants préfèrent leur père. Pourtant, les enfants finiront par intégrer des valeurs d’authenticité et de simplicité si elles sont elles-mêmes persuadées que l’essentiel ne réside pas dans le matériel. C’est souvent quand on doute soi-même (par comparaison, par pression publicitaire, par peur de faire souffrir les enfants parce qu’on a précisément intégré les discours sur le lien entre dépense et bonheur) qu’on est fragilisé et que les enfants vivent mal la situation.

Pourtant, Valérie Halfon relate la condition d’une femme divorcée avec peu de moyen dont l’ex-mari gagnait très bien sa vie et qui a entrepris d’organiser avec ses enfants des pique-nique, des soirées pyjama et des jeux de société pour concurrencer les activités onéreuses et les montagnes de jouets qu’ils recevaient de leur père.

Les publicitaires savent utiliser nos émotions à nos dépens

Comment en arrive-t-on à croire que le bonheur se résume à une dépense et que l’intensité du bonheur dépend de la somme dépensée ?

Valérie Halfon regrette que le combat publicitaires/ citoyens soit celui de David contre Goliath. Les grandes entreprises déploient d’importants moyens financiers et intellectuels (payant des fortunes pour des études de marchés et utilisant les recherches en psychologie pour renforcer l’efficacité de leurs stratégies marketing). Cela fonctionne si bien que la majorité des gens finit par croire que le bonheur se résume à une dépense et que l’intensité du bonheur dépend de la somme dépensée. De l’autre côté, les personnes qui vantent la simplicité ont peu de moyens et de visibilité. Ils ne peuvent que compter sur l’exemple pour faire passer le message que le bonheur, notamment des enfants, n’est pas lié à la profusion des biens.

Ironiquement, Valérie Halfon constate que les publicitaires savent pertinemment que le bonheur se trouve dans les plaisirs simples de la vie : le fait d’être ensemble, de partager, d’aimer. En effet, la plupart des publicités qui s’adressent aux familles glorifient les bons moments passés ensemble. C’est ainsi que les biscuits Z rendent le goûter absolument fabuleux, comme si c’est à ces biscuits en particulier qu’on doit le bonheur et quand, sans eux, la vie serait bien fade.

Pour faire entrer un produit dans nos vies, elles vont nous convaincre que c’est LUI qui crée les instants privilégiés que nous vivons.- Valérie Halfon

De même, les publicités nous font croire que plus on dépense d’argent pour une sortie, plus les enfants seront heureux. Il n’est pas question ici de dire qu’il faut priver les enfants ou créer de la frustration exprès. Tout est question de fréquence et il n’y a rien de mal à faire une activité payante de temps en temps. L’idée est simplement de prendre conscience des effets de la publicité et que dépenser de l’argent par culpabilité ou comparaison avec les autres familles n’est pas une bonne motivation. De même, offrir de cadeaux pour compenser le peu de temps passé ensemble ne construit pas des relations familiales saines.

Le temps de qualité en famille prime sur le reste

Cela semble banal de dire que le plus cadeau qu’on puisse faire à un enfant est peut-être de lui montrer à quel point on apprécie de passer du temps avec lui. Pourtant, l’influence de la publicité peut nous faire perdre de vue cet aspect. Valérie Halfon estime qu’un enfant avec qui son parent prend du plaisir à être aura le sentiment d’avoir de la valeur. Une des raisons pour laquelle un enfant tombe dans les filets de la société de surconsommation est qu’il croit qu’il n’a pas de valeur en dehors des produits qu’il possède, des marques qu’il porte ou des sorties dont il peut se vanter.

Si l’on veut réenchanter l’enfance, on devrait arrêter de gâter les enfants. Car les conséquences de l’adoption d’un mode de vie plus simple sont quasiment toujours positives : des enfants qui ne s’attendent pas à ce qu’on leur offre la lune sont heureux de tout ce qu’ils reçoivent. Et habitués à ressentir de la gratitude et de l’empathie, ils sont bien plus heureux. – Valérie Halfon

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Source : Tout le monde en a un, sauf moi !: Libérer nos enfants de la surconsommation de Valérie Halfon (éditions Albin Michel). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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