Comprendre ce que vit l’enfant qui passe du temps loin de ses parents toute la journée
Dans son livre Une journée Montessori, Audrey Zucchi rappelle l’importance de se reconnecter émotionnellement les soirs en famille. En semaine, généralement, les enfants passent la journée loin de leurs parents, chez la nounou, à la crèche ou encore à l’école.
Loin de leurs parents, les enfants vivent toutes sortes d’expériences (heureuses et moins heureuses) : ils apprennent, découvrent, reçoivent des marques d’affection, jouent mais peuvent aussi connaître des frustrations ou des moqueries, tomber et se faire mal, être stressé par un rythme qui ne leur convient pas. Quand nos enfants sont en collectivité, beaucoup de choses nous échappent :
- ont-ils ressenti péniblement le manque de notre présence?
- ont-ils eu leur quota de sommeil au moment de la sieste?
- ont-il faim/ soif quand on les récupère en fin d’après-midi ?
Audrey Zucchi note que les jeunes enfants (et les moins jeunes également !) n’ont pas encore les clés pour apprivoiser leurs émotions ni exprimer leurs besoins. Par ailleurs, le mécanisme d’attachement entre parents et enfants implique que le simple fait pour un enfant de voir un de ses parents ouvre chez lui les vannes qui permettent de décharger toutes ces choses accumulées loin d’eux.
Ses cris, ses pleurs, son refus de vous saluer ou d’obtempérer sont le signe de l’attachement profond et de la confiance totale qu’il vous porte. Pour vous qui vous faisiez une joie de le retrouver, cette douche froide n’est pas facile à gérer (surtout quand elle se produit au milieu d’autres parents ou dans la rue), mais l’envisager comme un signe d’attachement vous aidera probablement à mieux vivre ces retrouvailles parfois bien mouvementées. Vous êtes le seul à pouvoir recevoir cette décharge!- Audrey Zucchi
En ayant en tête quelques notions autour de la théorie de l’attachement, nous pouvons décider d’accueillir véritablement les émotions de l’enfant, de poser pour lui des mots sur ce qu’il ressent (“La journée a été longue, on dirait que ça été difficile aujourd’hui/ Il y a plein de choses qui se passent dans ta tête on dirait/ Je suis là, je t’aime/ Je suis content.e de te revoir.”), de ralentir le rythme pour se caler sur le sien, de le câliner. L’empathie et le contact physique font du bien tant aux adultes qu’aux enfants.
Si on en ressent le besoin (notamment si le comportement de l’enfant paraît être un signal pour une situation particulièrement difficile), il est possible d’aborder le sujet à un moment plus calme. Cela peut passer par le fait de poser des questions à l’enfant sur sa journée, d’essayer d’identifier ce qui s’est passé afin de vérifier qu’il n’y a pas un problème. Les jeunes enfants sont cependant plus réceptifs aux jeux qu’à la parole : il est alors possible d’engager le jeu à l’aide de personnages ou de doudous en jouant le rôle d’un enfant qui est en crise à la sortie de la crèche ou de l’école et de voir comment l’enfant embraye sur le jeu. Cela pourra également être l’occasion de faire endosser le rôle du parent à un autre personnage pour montrer à l’enfant ce que ses parents font quand il est à la crèche/ chez la nounou/ à l’école. Nous pouvons également verbaliser : “Je suis au travail et j’aime ça. Dans une heure je vais chercher mon fils/ ma fille d’amour. J’ai hâte de le/ la revoir, je l’aime tellement. Quand on sortira de la crèche/ de l’école, on pourra chanter une chanson.”.
Des rituels pour se reconnecter
Audrey Zucchi propose plusieurs pistes pour mettre en place des rituels de reconnexion les soirs au moment des retrouvailles :
- inventer un code de « reconnexion » (un mot, un geste, une danse, une chanson…) utilisé chaque soir,
- porter les bébés collés contre vous au lieu de l’attacher dans sa poussette (même les plus grands ont besoin de toucher via un câlin, un bisou esquimau, le faire sauter en l’air ou tout autre contact physique),
- apporter un caillou (présenté comme un trésor) sur lequel vous aurez versé quelques gouttes d’huiles essentielles de lavande vraie ou de camomille romaine. Le respirer calmement l’aidera à s’apaiser (ça marche aussi avec un foulard doux ou une écharpe),
- selon l’heure, apporter un petit en-cas à grignoter (du pain, des fruits à coque, un fruit frais, une gourde de compote),
- apporter une petite bouteille d’eau ou un biberon. Boire est un remède très puissant contre les crises de larmes ou de colère, surtout quand on boit la bouche serrée (à la bouteille, à la paille ou au biberon),
- à la maison, prévoir des jeux et activités de reconnexion comme des rituels juste pour le plaisir d’être ensemble et remplir le réservoir d’amour de toute la famille (ex : une partie de petits chevaux, un tour dans le jardin pour ramasser des fleurs et faire un bouquet, un moment de coloriage ensemble…),
- le matin, au moment de quitter l’enfant, dessiner un coeur sur le poignet de l’enfant et un sur le vôtre en lui expliquant: «Toute la journée, quand j’aurais une contrariété, une joie ou que je me sentirais un petit peu triste ou rêveur, je regarderai mon poignet, ça me fera du bien de penser à toi et je sais que toi aussi, tu m’enverras de belles pensées dans la journée.»
Échanger sur la journée le soir en famille
Nous sommes tous tentés de demander aux enfants quand nous les retrouvons à la sortie de l’école : Qu’est-ce que tu as fait aujourd’hui ?.
La plupart du temps, nous sommes déçus car les enfants ne peuvent ou ne veulent pas nous répondre : «Je ne sais pas… », «Je me souviens plus» ou, pire encore: « Rien!».
Non seulement les enfants n’ont pas forcément la capacité de se souvenir de ce qu’ils ont fait (la notion de temps et de chronologie étant en construction) mais ils peuvent avoir envie de séparer ce qui se passe à l’école de ce qui se passe à la maison. Par ailleurs, selon leur humeur et le plaisir pris, les enfants auront envie de raconter certains jours, d’autres non.
Au moment de se retrouver, à la sortie de l’école ou le soir, nous pouvons tenter une autre approche pour nous connecter émotionnellement : «Tu sais ce que j’ai fait aujourd’hui/ de ma journée/ au travail ?» / «Tu veux que je te raconte ma journée? .
Audrey Zucchi conseille de faire un résumé compréhensible par un enfant, pourquoi pas avec une pointe d’humour, mais surtout de rester sincère (il s’agit de donner des détails véridiques, pas de s’inventer une journée aseptisée, dans laquelle on n’éprouve ni joie ni colère ou tristesse).
Une fois ce récit effectué, nous pouvons enchainer : «Et toi, tu veux me raconter ta journée ?». Il se peut que l’enfant refuse et c’est OK. Après quelques essais, il prendra peut-être goût à cet échange, à ce moment de confidences, d’égal à égal.
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Source : Une journée Montessori : Mettez en pratique la parentalité positive au quotidien ! de Audrey Zucchi (éditions Marabout). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.
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