Donner des instructions claires et bienveillantes est plus efficace que proposer des choix aux jeunes enfants
Dans son livre L’autorité bienveillante, Kim John Payne, thérapeute familial, regrette que, bien attentionnés, nous noyions les jeunes enfants sous des choix, des demandes et des suggestions qu’ils ne sont pas capables de gérer. Il affirme que les jeunes enfants (moins de 5 ans) ont avant tout besoin d’instructions claires et bienveillantes.
Il mentionne des choses utiles à savoir au sujet des consignes formulées sous forme de suggestions et des choix proposés systématiquement aux jeunes enfants :
- il se peut que la réponse de l’enfant ne soit pas celle attendue et que cela mette parents et enfants dans l’embarras, menant à une escalade désastreuse (le parent est de plus en plus impatient et en colère, l’enfant résiste de plus en plus);
- les jeunes enfants peuvent se sentir angoissés du fait de ne pas savoir quoi répondre et du fait de sentir une incohérence entre les mots formulés (“veux-tu bien monter dans la voiture ?”) et la volonté du parent (que l’enfant monte dans la voiture immédiatement);
- avec l’âge, les enfants comprennent de mieux en mieux que les choix et les suggestions sont en fait des ordres déguisés et que ce sont des faux choix (minant leur volonté de coopérer dans le cadre familial).
Des instructions claires et bienveillantes pour plus d’efficacité
Kim John Payne donne des conseils pour formuler des instructions claires et bienveillantes à destination des jeunes enfants.
Capter l’attention et établir la connexion
Capter l’attention de l’enfant peut passer par ce que Payne appelle “un stationnement en parallèle“. Il s’agit de se placer à côté de l’enfant (pas en face donc) sans s’imposer tout en montrant qu’on comprend que l’enfant traverse un moment difficile. Mieux vaut ne pas trop parler (une simple phrase comme “C’est difficile pour toi on dirait” peut suffire) et attendre que l’enfant se détende. Il est possible de s’asseoir en faisant quelque chose (comme coudre ou feuilleter un livre).
Les enfants vont associer cette attitude calme et compréhensive à un sentiment de sécurité.
Donner une vision d’ensemble et des repères (séquence d’actions logiques)
Une vision d’ensemble permet à l’enfant de se positionner dans le temps et dans l’espace. Les fonctions neurologiques des jeunes enfants (qui permettent de mettre les choses en perspective et de planifier) ne sont pas encore bien développées : ils ont besoin de l’aide d’adultes pour comprendre ce qui se passe autour d’eux, pour donner du sens au monde extérieur et y prendre une place en comprenant ce qui est attendu d’eux.
Donner une vision d’ensemble prépare le terrain et facilite les transitions en les anticipant.
Les enfants, jusqu’à l’âge de 5 ou 6 ans, ont besoin qu’on leur dise précisément comment procéder. Il est essentiel de dire quelle est la direction prise puis de donner des instructions aussi claires que possible, dans le bon ordre. Pour autant, inutile de bombarder l’enfant de trop d’informations : mieux vaut donner les consignes les unes après les autres, au moment voulu (plutôt qu’annoncer une suite de consignes que l’enfant oubliera dans le feu de l’action).
Par exemple :
Direction (vision d’ensemble) : Nous allons partir bientôt parce que nous devons aller chercher ton frère au basket.
Instructions (vision détaillée) : Viens m’aider à mettre ton goûter dans le sac à dos. Ensuite, nous mettrons les chaussures dans l’entrée et le manteau.
Clarifier les attentes
Une instruction efficace explique ce qui est attendu de l’enfant en donnant des détails sur les actions attendues et leur enchaînement. Les consignes données à la volée, entre deux portes ou du bas de l’escalier, par dessus l’épaule sont condamnées à être inefficaces.
Par exemple :
C’est l’heure de ranger le vélo et de monter en voiture. Allons mettre le vélo dans l’abri et assurons-nous de fermer la porte.
C’est l’heure de ranger. Commençons par les cubes : ils vont dans le coffre à jouets, comme ça. Ensuite, les doudous dans la caisse des doudous. Maintenant, les vêtements dans la balle de linge sale. C’est ça.
Un bras passe par cette manche. Et maintenant, l’autre bras dans l’autre manche. Maintenant, remontons cette coquine de fermeture éclair.
Pratiquer l’écoute empathique en cas de refus
Les enfants ne voudront pas toujours coopérer. L’écoute empathique qui consiste à reformuler ce que l’enfant pense et vit à l’intérieur est utile pour l’apaiser et comprendre ce qui bloque. Le simple fait de nommer les émotions de l’enfant participe à l’apaiser et à créer une connexion favorable à la coopération. Une dose d’humour et d’imaginaire peut également aider les enfants à faire ce qu’on leur demande.
Par exemple :
Tu préférerais continuer à faire du vélo. C’est vrai que c’est difficile d’arrêter quelque chose qu’on aime bien faire.
Tu n’as pas envie de ranger ces cubes parce que tu as construit une grande tour. Je suis sûre qu’on peut voir de loin du haut de cette tour. Nous allons garder la tour et ranger les cubes autour dans le coffre à jouets.
Réaffirmer les valeurs familiales
Réaffirmer les valeurs familiales permet de nourrir le besoin de sens et d’appartenance des enfants : Dans notre famille, on ne fait pas ça/ ce n’est pas un mot que nous utilisons. Dans notre famille, nous parlons gentiment.
Miser sur la communication non verbale
Les jeunes enfants apprennent en observant nos actions, nos mouvements et en les copiant. Payne conseille donc d’associer mots et gestes afin de donner des indications complémentaires sur ce qu’on attend d’eux.
Ainsi, il est possible d’ouvrir le coffre à jouer en annonçant que c’est le moment de ranger.
De plus, nous avons souvent tendance à trop parler. Quand nous nous surprenons à trop parler, nous pouvons faire une “pause-pose-questions” : pourquoi suis-je en train de parler ? qu’est-ce que je veux vraiment communiquer ? comment le dire avec moins de mots mais porteurs de plus de sens ?
Dégager un espace-temps tranquille
Plus les instructions sont données lors de moments tranquilles, plus elles seront efficaces. Il peut être utile de se retirer dans un coin éloigné des distractions, des bruits, du tumulte familial.
Certaines familles peuvent décider qu’un endroit de la maison sera dédié aux consignes particulièrement importantes (par exemple la première marche de l’escalier). Par ailleurs, plus la distance est proche entre l’adulte et l’enfant lors de la passation de consigne (moins d’un mètre), plus celle-ci sera susceptible d’être suivie.
Enfin, Payne nous conseille d’être bien “‘ancrés” dans la terre avant de passer une consigne importante, bien solides sur nos jambes et pleinement conscients dans l’instant présent. L’ancrage physique peut avoir un impact sur notre état mental et donc sur la conversation.
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Source : L’autorité bienveillante : rassurer et soutenir l’enfant du tout petit à l’adolescent de Kim John payne (éditions ). Disponible en librairie, en médiathèque ou sur internet.
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