Idée reçue : L’éducation sexuelle et affective incite les enfants à passer à l’acte et leur donne des “idées”

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Les bénéfices de l’éducation affective et sexuelle

Dans son fabuleux livre Osez en parler ! – Savoir parler d’amour et de sexualité avec ses enfants, Maëlle Challan Belval (conseillère conjugale et formatrice en éducation sexuelle et affective) consacre une longue partie aux inquiétudes de certains adultes en lien avec l’éducation sexuelle et affective : en parler aux enfants et adolescents, ce serait les inciter et leur donner des “idées”.

Maëlle Challan Belval rapporte une anecdote entendue lors d’une conférence qu’elle animait : une mère s’inquiétait du fait que son fils ait déclaré “J’ai hâte d’être grand pour faire l’amour”. Or, pour l’autrice, cette remarque de l’enfant met en lumière que les parents ont su trouver les mots justes pour parler de sexualité :

  • le jeune garçon a envie de grandir,
  • il se fait une idée positive des relations sexuelles, vues comme agréables et heureuses,
  • il a compris que les relations sexuelles sont pour les grands.

Maëlle Challan Belval est convaincue que les paroles des adultes peuvent offrir aux enfants (et adolescents) un cadre, une sécurité et une ouverture. Elle estime qu’une éducation sexuelle et affective adaptée aux besoins des enfants et des adolescents, respectueuse, conduite dans un climat ouvert, les nourrit et les apaise.

Ce ne sont pas des enfants qui “perdent leur innocence” mais des enfants qui prennent confiance. – Maëlle Challan Belval

Des études menées au Canada sur l’impact de l’éducation sexuelle et affective ont montré qu’elle leur permet de choisir le moment de passer à l’acte avec plus de conscience et de liberté (la liberté se fondant sur la connaissance).

Il s’agit de programme où l’on valorise le libre choix et l’affirmation. L’éducation sexuelle ne professe pas le sexe : elle proclame la vie ! – Francine Duquet

“Ce qui n’est pas dit est souvent agi”

Maëlle Challan Belval a remarqué, lors de ses nombreuses interventions en milieu scolaire, que les enfants qui n’ont pas les mots pour parler du corps, des organes sexuels ou de la vie affective passent à l’acte pour apaiser leurs questionnements. Elle résume cette idée dans cette phrase : “ce qui n’est pas dit est souvent agi”.

L’absence d’information est préjudiciable

L’éducation affective et sexuelle est une entreprise de réflexion, exigeante, une éducation à la liberté, un outil de connaissance du monde mais aussi un outil pour être acteur de ses choix. – Maëlle Challan Belval

Ainsi, parmi de nombreux autres, on peut lire l’exemple d’une écolière qui, après avoir compris ce qu’était une érection après une séance d’éducation sexuelle, a pu faire le lien avec la “bosse” qu’elle sentait sous ses fesses quand le chauffeur de bus l’invitait à monter sur ses genoux.

Par ailleurs, Maëlle Challan Belval cite des croyances que certains élèves de lycée lui ont confiées et en déduit à quel point l’absence d’information est préjudiciable :

  • le premier rapport est infertile,
  • les fellations sont seulement des préliminaires et pas des actes sexuels (définis comme tels par la loi),
  • quand une fille/ femme dit “non”, ça veut dire “oui” (sous entendu qu’il faut forcer les filles parce qu’elles aiment se faire désirer),
  • un garçon ne peut pas être victime de viol.

Dans un monde complexe, où les repères sont floutés, des jeunes sous-informés auront du mal à protéger leur santé, à respecter les lois en matière de sexualité, à penser leur fécondité et la responsabilité sexuelle, à identifier une IST, à mesurer l’engagement que représente la maternité/ paternité, à reconnaître des situations de violences. – Maëlle Challan Belval

Quand parler de sexualité est trop difficile pour les adultes

Pour autant, Maëlle Challan Belval reconnaît que parler de vie affective et sexuelle peut être difficile pour nombre d’adultes. Nous sommes en effet nombreux à être empreints de tabous sur la sexualité. Pourtant, les enfants risquent d’être victimes de nos propres retranchements car leurs interpellations (parfois moqueuses, sous formes de blagues salaces ou de sous-entendus mettant les adultes mal à l’aise) restent sans réponse et leurs inquiétudes sont esquivées.

Maëlle Challan Belval propose quelques pistes pour que nous puissions (re)devenir des éducateurs qui ne se dérobent pas, qui sont capables d’entendre les questions, de voir les inquiétudes derrière les interpellations des jeunes, de nommer les choses explicitement et de leur offrir un cadre sûr :

  • Nommer pour nous-mêmes (si l’adulte ne sait ou ne peut pas nommer pour lui même, il ne peut pas nommer pour l’enfant)
    • lire les mots qu’on n’arrive pas à dire (ex : éjaculation, masturbation, érection, vulve, clitoris, orgasme…)
    • nommer pour soi-même (devant un miroir par exemple)
    • oser ces nouveaux mots devant quelqu’un en qui on a confiance
    • entendre les mots du corps, de la sexualité, prononcés par une autre personne
  • Faire un travail sur soi (son histoire, ses propres émotions, ses tabous)
    • seul comme une promenade bienveillante et progressive dans notre “appartement intérieur” pour une relecture de vie
    • avec des proches
    • dans le cadre d’une thérapie accompagnée

Ainsi, Maëlle Challan Belval nous invite à réhabiliter la curiosité sexuelle infantile comme un sain désir de savoir et nous rendre capables d’y répondre dans un échange ouvert.

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Source : Osez en parler ! – Savoir parler d’amour et de sexualité avec ses enfants de Maëlle Challan Belval (InterEditions). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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