En éducation, mieux vaut contrôler les circonstances que les faits et gestes des enfants

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Différence entre protection et punition

Rosenberg prend l’exemple d’un enfant qui voudrait jouer avec une prise électrique. Son parent aura beau lui répéter à longueur de journée de ne pas s’approcher car c’est dangereux, les besoins impérieux de découverte, d’exploration et de compréhension de l’enfant le ramèneront vers cette prise et son danger. Ce qui est en notre pouvoir en tant que parents, c’est de modifier notre manière d’aborder la situation ainsi que l’environnement de l’enfant : poser un cache sur la prise, emmener gentiment l’enfant dans une autre pièce. Il est inutile de taper la main de l’enfant ou de le punir (via un isolement forcé par exemple). L’idée ici est de satisfaire notre besoin de protéger l’enfant, sans porter atteinte à sa dignité. La différence entre la protection et la punition réside dans l’intention : quand on contrôle les circonstances, on se comporterait de la même manière avec un adulte qui ne parle pas la même langue ou qui n’y connait rien en électricité.

Comprenez-vous ce que je veux dire : au nom de quelle loi devrais-je traiter différemment deux personnes, juste parce qu’elles sont d’un âge différent, ne parlent pas la même langue ou ne disposent pas d’un bagage de connaissances identique ? – Marshall Rosenberg

Des règles ou des besoins ?

Une règle peut être vue du côté des besoins. Par exemple, dîner à une heure précise peut correspondre à des besoins de nature différentes :

  • besoin de liens (prendre soin de la relation à travers le rituel du repas et passer du temps ensemble quand chacun a passé sa journée hors de la maison)
  • besoin de partage (célébrer le plaisir pris à être ensemble et à échanger autour de sa journée, de ses projets…)
  • besoin de reconnaissance (pour le temps passé en cuisine et l’énergie mise dans la préparation du repas)
  • besoin de bonne gestion du temps (le repas ayant sa place dans une séquence chronologique qui permet de vivre sereinement les soirées en semaine)
  • besoin d’aide et de la contribution de chacun (pour assurer le bon fonctionnement du foyer)

On pourrait même envisager de demander aux enfants « Seriez-vous d’accord de venir à table à 19 heures, afin que nous puissions nous régaler tous ensemble ? » plutôt que « Il faut être à table à 19 heures ; si tu n’y es pas, tu iras au lit sans manger ! » L’intention et l’énergie mises dans l’appel pour passer à table font toute la différence : les enfants se sentent invités, bienvenus et sentent qu’ils appartiennent à une famille unie, qui prend plaisir à passer du temps ensemble et à prendre soin les uns des autres. Il peut arriver que des membres de la famille tardent à venir pour une raison ou une autre (des devoirs à terminer, une partie de jeu en cours, une pause pipi, un coup de fil attendu…). Si c’est le cas, la compréhension, la souplesse et l’humour peuvent détendre l’atmosphère. Si les retards sont systématiques et gâchent l’atmosphère familiale, alors il est temps d’aborder le problème en raisonnant en termes de besoins mutuels pour trouver une solution (retarder ou avancer l’heure du repas ? inscrire l’enfant à l’étude pour qu’il y termine ses devoirs ?…).

Les parents bienveillants ne sont pas des parents sacrificiels.

Les parents bienveillants ne sont pas des parents sacrificiels. Nous avons nos besoins, nos limites et nos valeurs car nous sommes des humains. Nous pouvons et devons parler de nos limites personnelles aux personnes avec lesquelles nous vivons. Si nous n’exprimons pas notre impatience, notre inquiétude ou notre découragement, alors nous finirons par exploser (violence verbale et/ou physique) ou imploser (épuisement, dépression).  Nous pouvons exprimer nos émotions aux enfants de manière authentique, sans surjouer nos sentiments (pour faire peur aux enfants ou les culpabiliser) ni les minimiser. Par exemple, une phrase du type “Je ressens beaucoup d’agacement quand tu m’interromps au téléphone”. Quand nos besoins ne peuvent pas être remplis du fait du comportement d’une autre personne (quel que soit son âge), nous avons le devoir de le lui dire et de l’informer de ce que nous allons entreprendre pour respecter nos besoins.

L’affirmation personnelle et authentique permet de communiquer nos besoins aux enfants sans passer par le contrôle des enfants ou l’oubli de soi en tant que parents. Faire preuve d’affirmation personnelle nécessite de se concentrer sur nos propres besoins et sur nos limites personnelles, sur nos actions et nos mots plutôt que sur ce que les autres parent vont penser ou que d’avoir peur des réactions des enfants (refus, crise, pleurs). L’affirmation personnelle passe par le respect des droits de l’enfant et est incompatible avec les punitions, les cris, la violence physique (tape, tirage d’oreilles..) et verbale (menace, chantage, moquerie…). Pour s’affirmer en tant que parent, il est nécessaire d’être ancré dans le moment présent sans anticiper le pire ou penser à ce qui s’est passé la dernière fois dans la même situation.

Quand nos paroles ne sont pas vraiment authentiques (quand elles traduisent une leçon de morale, une habitude, une prêche, un explication rationnelle dénuée de chaleur…), alors ces paroles sont vaines. Ce n’est pas faire preuve d’affirmation personnelle que de poser des fausses questions aux enfants (“est-ce que tu veux bien monter dans la voiture ?”), de penser à la place des enfants (“mais si, tu as envie d’aller chez mamie”) ou encore d’essayer de les contrôler (“tous les enfants aiment les glaces, pourquoi tu ne les aimes pas ?”).

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Source : Dénouer les conflits par la Communication NonViolente de Marshall Rosenberg (éditions Jouvence). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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