Quand les enfants doivent faire quelque chose… mais ne veulent pas le faire !
Comment faire quand un enfant refuse d’accéder à une de nos demandes importantes ?
Même après avoir fait le tri dans nos attentes vis-à-vis de nos enfants (en fonction de leur niveau de développement, de leur maturité émotionnelle, de leurs besoins et de nos propres besoins, de notre “tamis du sens“), certaines demandes ne sont pas négociables, notamment en ce qui concerne la sécurité ou les impératifs d’horaires.
La résistance que les enfants opposent à des demandes que nous estimons fondées a de quoi nous désarçonner. Voici 9 pistes pour faire face quand un enfant doit faire quelque chose mais ne veut pas. Ces actions éducatives sont inspirées par le livre Aimer nos enfants inconditionnellement d’Alfie Kohn. (éditions L’Instant Présent).
1.Choisir la stratégie la moins intrusive possible
Alfie Kohn conseille de ne pas écraser l’enfant de notre pouvoir et de ne pas entrer dans une lutte de pouvoir.
Il se peut que l’enfant soit de mauvaise humeur, fatigué, perturbé par une raison toute autre dont nous n’ayons pas connaissance. Dans ce cas, la discussion est impossible car l’enfant n’est pas en état de raisonner.
Parfois, perdre du temps, c’est en gagner : on peut donner quelques minutes à l’enfant pour qu’il retrouve ses esprits ou de lui laisser le temps de finir ce qu’il est train de faire. Demander puis s’éloigner permet d’éviter la confrontation.
Tu penseras à ranger les jouets une fois que tu auras fini de jouer.
Je commence à me préparer, tu me rejoins quand tu es prêt.
Tu as besoin de combien de temps encore pour ton activité ?
En relâchant un peu la pression et en lui laissant de l’espace, vous lui permettez de maintenir son autonomie et sa dignité. – Alfie Kohn
Avec les jeunes enfants, nous devons nous attendre à répéter plusieurs fois une consigne et à accepter que certaines journées soient plus difficiles que d’autres.
2.Etre honnête : pas d’excuse, de justification ou de déni de responsabilité personnelle
Si ce que nous demandons de faire à l’enfant n’est pas agréable, nous avons le devoir de le reconnaître.
Nous pouvons dire les choses clairement, dans un langage personnel assumant notre responsabilité, nos besoins et nos limites.
Inventer des excuses compliquées ou impressionnantes pour justifier une demande est un abandon de responsabilité individuelle.
3.Expliquer les raisons
Expliquer ne vous garantira pas l’obéissance – pas plus que cela ne fonctionnerait avec des adultes – mais cela aide à mieux accepter la contrainte. Les individus de tout âge ont le droit de savoir pourquoi on limite leur champ d’action. – Alfie Kohn
Expliquer ne veut pas dire épiloguer : moins de mots pour plus d’efficacité !
Par ailleurs, ces explications seront d’autant plus efficaces quand elles sont accompagnées d’accueil émotionnel.
C’est vrai que c’est frustrant de devoir t’arrêter de jouer pour aller chercher ton frère à l’école. Tu préfèrerais continuer à t’amuser.
Tu n’as pas du tout envie de… Tu as plutôt envie de… et ça te met en colère.
4.Adopter une approche ludique : jouer, imaginer, inventer
C’est le principe de la parentalité ludique telle qu’envisagée par Lawrence Cohen.
Lawrence Cohen propose de réagir par le jeu et l’humour pour sortir des conflits et des jeux de pouvoir :
- camper une marâtre qui prive son enfant de dessert ou une maman qui propose de la glace en plat principal provoque le rire et dédramatise les conflits autour du repas
- animer des poupées dont l’une ne laisse jamais le dernier mot à l’autre pour permettre à l’enfant qui tient tête de jouer
- inventer une règle absurde pour désamorcer les tensions autour d’une règle de base : « il n’y a qu’une seule chose que je t’impose : interdiction de mettre deux chaussures de la même couleur ! » face à un enfant qui rechigne à s’habiller
- proférer des menaces farfelues : « si tu recommences, je danse des claquettes ! », « tu as encore renversé le lait… il va falloir que j’exécute la chanson du lait renversé ! »
- faire semblant de se mettre en colère de manière théâtrale
- faire parler la brosse à dent : “je m’ennuie tellement quand je n’ai pas de dents à brosser”…
A mon sens, les parents renoncent à l’humour et au jeu dans les situations critiques, de craintes d’encourager une mauvaise attitude. Je dois rester sévère et glacial pour qu’il comprenne qu’il a mal agi. Mais l’humour ne constitue pas une récompense. Il restaure en revanche l’élément manquant : le lien dont la rupture a justement causé le problème. – Lawrence Cohen
On peut également accorder aux enfants ce qu’ils ne peuvent pas avoir par l’imagination.
L’avantage de la parentalité ludique est qu’elle est inépuisable : on peut inventer nos propres variantes et même demander aux enfants de les inventer eux-mêmes.
5.Donner l’exemple
Si nous demandons à nos enfants de ranger derrière eux, d’éteindre, la lumière quand ils sortent de la pièce, si nous leur demandons de ne pas interrompre une discussion, de ne pas dire de gros mots ou de ne pas parler avec un ton désagréable, alors nous sommes tenus d’en faire autant. Non seulement par esprit de justice, mais aussi parce qu’il est plus facile pour les enfants d’accepter une contrainte que nous acceptons volontiers nous-mêmes. – Alfie Kohn
6.Laisser le plus de choix possible
- Sur le moment
Alfie Kohn donne cet exemple :
Bon, je sais que ce que tu fais maintenant est plus amusant que d’aller dans la salle de bain mais il faut te laver les mains pour ne pas risquer de manger des saletés. Si tes mains ne sont pas propres, ta bouche pourra être contente de ce que tu manges mais ton ventre risque de protester (option : imiter comiquement les protestations du ventre). Si tu préfères, tu peux te laver les mains dans la cuisine plutôt que dans la salle de bains.
Vous pouvez aussi proposer :
Est-ce que tu préfères les laver tout seul ou les laver en même temps que moi ?
- De manière plus générale, dans le quotidien
Les enfants qui ont l’habitude de participer aux prises de décision et d’avoir une certaine liberté ne ressentent pas le besoin de discuter chaque décision.
7.Ignorer les personnes autour en cas de conflit en public
Plus nous nous inquiétons de la façon dont les autres vont juger nos compétences parentales, plus nous risquons de répondre avec trop de contrôle et pas assez d’amour et de patience.
Ce qui est en jeu, ce n’est pas ce que les gens pensent de nous, mais les besoins de notre enfant.
8.Adopter le point de vue de l’enfant et se connecter avant de rediriger
Lors de tempêtes émotionnelles chez les enfants, l’objectif est de se mettre sur la même longueur d’onde qu’eux pour établir un lien profond avec eux et asseoir en eux le sentiment qu’ils « sont ressentis ».
Dans les moments de crise, la logique ne sert à rien (par exemple, face à un enfant jaloux, rappeler le nombre de fois où on a joué avec lui pour le rassurer sera inefficace; face à un enfant qui voulait absolument une glace à la fraise, dire qu’il reste des glaces à la vanille qu’il aime autant sera tout autant inefficace).
Les émotions des enfants peuvent nous paraître injustifiées, futiles mais elles existent en eux et ont de l’importance pour eux.
Adopter le point de vue de l’enfant et se connecter (avant de rediriger) peut passer par :
- de l’écoute (Je ne savais pas que c’était si important pour toi. /Oui , c’est difficile de…/ Tu voulais tellement cette chose !/ Tu as l’impression que…)
- des signes non verbaux (un contact physique/ une voix douce/ un visage chaleureux)
- du réconfort (J t’aime / Tu es très important pour moi. /Moi aussi, je me sens comme ça par moments. / J’ai des idées pour régler ce problème. )
Une fois qu’on est “connecté émotionnellement” avec l’enfant, on peut adopter un discours rationnel pour rediriger les actions inappropriées :
- une explication logique,
- un plan à mettre en place dans les prochains jours,
- des idées à évaluer pour résoudre le problème,
- des conséquences ou de réparations face à un acte inapproprié,
- un rappel de la règle…
9.Trouver des solutions communes ensemble quand un enfant doit faire quelque chose mais ne veut pas
Parlons de ce qui serait juste pour toi et qui tiendrait aussi compte de mes besoins. Trouvons des idées ensemble et testons-les.
Qu’est-ce qui pourrait rendre nos matinées/ soirées/ repas… plus plaisants pour tous ?
Etablir les règles et trouver des solutions aux problèmes AVEC les enfants comporte de nombreux avantages (ce qui est différent de : « les enfants ont le droit de donner leur avis mais ce sont les adultes qui décident à la fin » ou même de « votons pour retenir la meilleure solution ») :
- Les enfants sont davantage portés à appliquer ou à respecter les règles qu’ils ont contribué à établir
- Les décisions prises à plusieurs sont meilleures (2 têtes (ou 3 ou 4 ou 25) valent mieux qu’une seule tête)
- Les décisions prise en commun tiennent compte non seulement des expériences et besoins des adultes, mais aussi de ceux des enfants.
- Des relations plus étroites et chaleureuses s’établissent entre adultes et enfants quand les enfants sont intégrés au processus de prise de décision
- Ce procédé accroît l’estime de soi, la confiance et le sentiment de maîtriser son destin chez les enfants
- La participation à l’élaboration des règles collectives développe le sens des responsabilités et de la discipline chez les enfants
Ce qui compte est que les enfants sachent que leurs besoins sont importants à nos yeux et que nous prenons leurs idées au sérieux.
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Source principale : Aimer nos enfants inconditionnellement de Alfie Kohn (éditions Instant Présent). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur les sites de ecommerce (dont le site de l’éditeur)
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