FAQ : ma fille de 9 ans oublie systématiquement les consignes du quotidien (comme le fait de se laver les mains). Comment la rendre plus autonome ?

enfant oublie les consignes comment rendre autonome

Dans le cadre de la sortie de mon essai “La co-éducation émotionnelle : s’élever en même temps qu’on élève les enfants” aux éditions Hatier, j’ai eu le plaisir de répondre à des questions fréquentes de parents.

Je vous propose de découvrir quelques éléments de réponse que j’ai apportés à une mère démunie face aux oublis répétés de sa fille de 9 ans au sujet des consignes du quotidien (comme le fait de penser à se laver les mains avant de passer à table). Cette mère a affiché des pictogrammes et des rappels écrits des consignes dans la maison mais sans succès. Elle se demande comment rendre sa fille plus autonome.

Je développe dans mon livre l’idée selon laquelle chercher à faire autrement avant de penser autrement est voué à l’échec. Vouloir plaquer des outils ou astuces de parentalité bienveillante sur des situations sans chercher les causes et motivations des comportements au-delà des symptômes ne va pas nous rendre les relations familiales plus belles. Je pars du principe que les conseils de “choses à faire” ou “phrases à dire” de la parentalité positive tombent à plat quand on ne se place pas dans une démarche de co-éducation où les parents ont beaucoup à apprendre des enfants. La co-éducation émotionnelle, c’est apprendre à raisonner en termes de :

 

1. Vraie nature des émotions

2. Besoins humains fondamentaux

3. Attachement

4. Empathie

5. Auto-empathie

6. Histoire personnelle

7. Stades de développement (moteur, émotionnel et cognitif)

8. Aménagement de l’environnement

9. Enseignement de compétences

10. Droit à l’erreur

 

A partir de ces éléments, je peux formuler quelques hypothèses et propositions. L’idée est de s’appuyer sur une manière de raisonner différente de celle qui a été utilisée jusqu’à maintenant et de proposer des pistes qui ne sont pas des prescriptions mais des idées à tester si on en a l’élan, à personnaliser en fonction de la situation familiale et de la personnalité des parents et des enfants. Une ligne directrice est la dimension bientraitante de ces approches à toujours garder en tête : la violence, sous n’importe quelle forme, n’a pas de place dans la co-éducation émotionnelle.

Nous pouvons chercher la “motivation positive” de ce comportement, dans le sens  où cela nous permet de comprendre ce qui bloque. Première hypothèse : peut-être que la manière dont les consignes sont formulées induit une résistance chez l’enfant. Plus les adultes insistent, plus l’enfant va avoir tendance à résister. Quand un enfant se sent contraint ou contrôlé, il va vouloir protéger son intégrité en refusant ce qui lui est demandé. Un enfant s’opposera plus fortement à ses parents si ces derniers ne font pas l’effort de créer de la connexion émotionnelle, de l’empathie lors de leurs demandes ou consignes.

Si cette hypothèse s’avère juste (l’enfant résiste parce qu’il se sent contraint), alors plusieurs pistes sont envisageables :

  • Il est possible de simplement montrer les pictogrammes en disant juste “Mains” avec un clin d’œil
  • Refléter l’émotion de l’enfant va permettre de désamorcer les jeux de pouvoir : il est possible de lui dire quelque chose comme “oui, c’est vrai que tu n’aimes pas ça quand je te dis quoi faire/ quand j’insiste” ou “tu préfèrerais encore jouer”
  • Solliciter les idées de l’enfant va développer ses compétences et favoriser la coopération : “De quoi aurais-tu besoin pour te souvenir de te laver les mains avant le repas ? Essaye de trouver trois idées et on teste.”
  • Donner quelques minutes supplémentaires pour une transition en douceur diminue la résistance (par exemple, régler un minuteur et l’enfant vient à la sonnerie, poser la question “De combien de temps as-tu encore besoin ?”, utiliser la formule “dès que tu es prête” -> rejoins nous à la cuisine)
  • Expliquer quelles sont les attentes en détail et créer une image mentale chez l’enfant : “Dès que tu arrives dans la cuisine pour manger, tu te diriges vers l’évier, tu prends le savon et tu te laves les mains. Ensuite, tu pourras passer à table avec nous.” L’important est de résister aux leçons de morale et d’utiliser le moins de mots possibles.
  • La résistance et l’attachement ont une relation complémentaire : plus l’attachement entre le parent et l’enfant est fort, moins la résistance de l’enfant est forte. Il paraît opportun de cultiver l’attachement au quotidien. Cela peut passer par le fait de valoriser ce que l’enfant fait bien (ex : s’habiller seul, préparer le cartable la veille…), même les (toutes) petites choses.
  • Passer par des astuces de parentalité ludique va aussi créer du lien et faire passer des messages sans passer par la contrainte ou les leçons de morale. On pourrait imaginer acheter un savon avec un petit objet à l’intérieur et, au fur et à mesure que le savon diminue, l’objet deviendra accessible (il existe des tutoriels sur internet pour créer ce type de savon et cela peut être l’occasion d’une activité familiale partagée). On pourrait aussi dédier une chanson au lavage des mains (dès qu’elle retentit dans la maison, c’est le signal du lavage de mains avant de passer à table) ou, avec les plus jeunes, changer les paroles d’une comptine pour décrire le lavage de mains.
  • Le parent peut rappeler ses valeurs et expliquer en quoi c’est important pour lui que l’enfant applique cette consigne. Concernant le lavage de mains, le parent peut évoquer des questions d’hygiène, de respect de soi, de respect des autres (se laver les mains, c’est casser la chaîne de transmission des maladies). L’idée est d’utiliser un langage personnel et non moralisateur (“C’est important pour moi parce que…”). Ces explications ne garantiront pas l’exécution de l’enfant mais permettent un échange vivant et authentique (plutôt que des remontrances ou des injonctions rigides).

Une autre hypothèse qui pourrait être explorée consiste à se demander si l’enfant se sent traité à part (infériorisé) car seul lui doit se plier à la règle. Cette enfant voit-elle les adultes se laver les mains eux aussi ? Il est possible de créer du lien et de l’attachement par le jeu en initiant un “chacun son tour” ludique : le parent annonce avec enthousiasme “Moi prem’s et deuz” (ou l’inverse).

Un autre point à explorer serait l’aménagement de l’environnement : est-ce facile pour l’enfant de se laver les mains ? a-t-il accès au lavabo ? peut-il se laver les mains sans avoir à se mouiller les manches ? le savon est-il accessible ? l’eau chauffe-t-elle assez vite ? Ces questions paraissent triviales mais la manière dont est aménagé l’environnement peut présenter de réels obstacles aux enfants.

 

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Pour aller plus loin, la lecture de mon livre vous donnera des pistes pour raisonner autrement face aux comportements des enfants qui nous mettent en difficulté (avant de chercher à plaquer des astuces et conseils au risque de constater que “l’éducation positive, ça ne marche pas”).

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