Donner des choix aux enfants ne fonctionne pas : je propose des choix quand mon enfant refuse de faire quelque chose… mais il résiste
Une proposition qu’on retrouve souvent dans les livres ou blogs dédiés à la parentalité positive est celle de donner des choix aux enfants quand ils refusent de faire quelque chose. Par exemple, si un enfant ne veut pas s’habiller, il est conseillé de lui laisser le choix entre deux vêtements pour lui donner l’illusion d’un certain pouvoir. Pourtant, de nombreux parents de jeunes enfants ont pu le constater : propose des choix à un enfant n’est pas une baguette magique pour qu’il fasse de ce ses parents attendent de lui. Si donner des choix aux enfants ne fonctionne pas toujours, quelle est l’alternative ?
Pourquoi donner des choix aux enfants ne fonctionne pas toujours
D’une part, donner trop de choix aux enfants est générateur de stress. Même pour un adulte, il est difficile de faire des choix parce qu’on a peur de passer à côté de l’option écartée ou qu’une autre voie que celles proposées pourraient être explorée. D’autre part, cette technique des choix est une manipulation qui prive l’enfant de son autonomie et d’une relation intègre. Le but est de détourner son attention de la crise à venir. Le problème vient du fait que le choix offert n’en est pas un : le choix est fermé et le parent reste unique décisionnaire. L’idée est en réalité de contourner la manifestation de frustration de l’enfant (éviter ses larmes, ses cris plutôt que les accueillir comme un processus sain de réparation et de guérison face à la frustration). Nous pouvons chercher à mettre au jour ce qui est caché derrière ce type de conseils : l’adulte est-il prêt à entendre les oppositions et manifestations d’autonomie de l’enfant ?
Il sera plus efficace de prendre en considération le contexte et l’enfant dans son individualité. A partir du moment où les enfants sont objets de méthodes, les parents (et autres éducateurs) deviennent de simples exécutants désincarnés qui appliquent des recettes éducatives et répètent tous les mêmes phrases lues dans les mêmes livres.
Dans mon approche de la co-éducation émotionnelle, je propose de raisonner en termes d’émotions, de besoins, d’attachement, de stades de développement, de compétences et de travail sur soi pour faire preuve de plus de souplesse relationnelle. Plutôt qu’offrir des choix, nous pouvons faire un pas de côté et envisager d’autres manières de penser, qui rendent possibles d’autres manières d’agir.
Raisonner en termes d’émotions
- Prendre la responsabilité, en tant qu’adultes, de nos ressentis et les communiquer : « Moi, je suis embêtée si tu ne mets pas ta veste, je crains que tu tombes malade. »
- Exprimer de la colère de manière non violente, plutôt que se forcer à être toujours calme : exprimer avec vigueur nos émotions (« Stop ! C’en est trop, je suis vraiment excédé !»), « crier » nos besoins (« Là, j’ai un besoin urgent de respect pour mes affaires ! »)
- Connaître les raisons de l’opposition des enfants. La frustration n’est pas un affront ni une manifestation d’un manque d’éducation mais relève d’un mécanisme émotionnel commun à tous les petits humains. La frustration est une émotion saine et un enfant frustré ne fait pas un “caprice” : il est simplement traversé par une émotion puissante face à une situation où il ne peut pas obtenir ce qu’il veut. Cette émotion alimente le changement ou le processus de transformation de soi face à ce qui ne peut pas être changé. Par exemple, un enfant traversé par la frustration apprend qu’il peut survivre au fait de perdre à un jeu, même si c’est désagréable. La colère, la manifestation émotionnelle parfois bruyante et exaspérante de notre point de vue d’adulte est précisément ce qui permet à l’enfant de se remettre de la frustration.
Raisonner en termes de compétences
- Prendre doucement la main d’un enfant et rediriger son comportement, sans menace ou critique. Dans ce cas, les enfants reçoivent ce dont ils ont besoin : de l’aide, de la redirection douce et un sourire.
- Mettre le problème en commun : « Toi, tu préfères mettre tes baskets plutôt que tes bottes. Moi, j’ai peur que tu prennes froid avec les pieds mouillés. Comment pourrait-on faire, tu as une idée ? » Par exemple, l’enfant chausse ses baskets et le parent met les bottes dans un sac que l’enfant sortira si besoin.
- Laisser l’enfant assumer sa responsabilité et les conséquences, sans lui faire la morale. Les erreurs lui permettront d’apprendre.
Lire aussi : Donner des instructions claires et bienveillantes est plus efficace que proposer des choix aux jeunes enfants
Raisonner en termes de travail sur soi
- Voir ce qui est caché derrière la manipulation douce : est-ce que je cherche l’obéissance ou le développement de l’autonomie de mon enfant ? est-ce que je suis suffisamment assuré de mes compétences parentales et de ma valeur pour faire preuve d’assertivité ? qu’est-ce qui m’empêche d’exercer mon leadership de parent ? ai-je peur d’être jugé par d’autres parents ou mal aimé par mon enfant ?
- Penser nos intentions et notre dynamique familiale : est-ce que je tente de soumettre mon enfant, mais sans donner l’impression de violence ? Si je continue à utiliser des techniques éducatives qui génèrent des tensions, qu’est-ce que j’y gagne (une légitimité pour me plaindre, une acceptation dans un groupe de parents démunis, un sujet de discussion avec mon conjoint) ?
En réalité, les enfants ont besoin d’un lien sincère empreint de respect mutuel où les parents affirment des « oui » et des « non » francs. Les adultes ont le droit (et le devoir) de s’exprimer personnellement… mais aussi le droit et le devoir d’accueillir la frustration de l’enfant suite à un refus parental.
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