Le “jeu-écoute” face aux comportements d’agressivité des enfants (enfant qui tape)
Patty Wipfler est la fondatrice de l’approche « Grandir Main dans la Main ». Elle a conçu l’expression “jeu-écoute” qui est une forme d’écoute dans laquelle les parents montrent leur désir de savoir ce que l’enfant pense et ressent en lui donnant clairement le rôle le plus puissant dans le jeu.
Le jeu-écoute permet aux enfants de montrer leurs soucis et leurs problèmes à leurs parents de manière non douloureuse et non violente.
Une des clés fondamentales pour écouter profondément et attentivement un enfant est une forme de réponse active assez différente de ce que nous considérons ordinairement comme un jeu. Quand vous assumez le rôle du plus petit, du moins compétent, votre enfant se sent assez confiant pour vous montrer ses pensées et ses sentiments sur les questions importantes. En tant qu’écoutant, vous cherchez des opportunités de l’aider à résoudre ses tensions autour d’un problème particulier par le rire, en jouant avec lui.- Patty Wipfler
Patty Wipfler prend l’exemple d’un enfant qui veut taper un des ses parents. Cet enfant montre à ses parents qu’il a un problème. Patty Wipfler conseille de jouer à se tortiller et à essayer de s’échapper, ou à glapir et à dire de manière théâtrale “Non ! Ne me tape pas ! A l’aide !” Dès lors, l’enfant peut rire et continuer sur un mode ludique.
Ce jeu de renversement permet à l’enfant de laisser paraître ses sentiments et ses problèmes, tout en déchargeant son énergie dans un cadre protecteur.
Un jeu qui commence par beaucoup de rires sur le thème de taper papa qui essaye en vain de s’échapper, peut ensuite évoluer vers un jeu consistant à faire des bruits très forts tandis que papa sursaute de peur simulée, puis finir en le faisant basculer en lui lançant un oreiller chaque fois qu’il se remet tant bien que mal à quatre pattes, le tout avec énormément de rires et d’allégresse. – Patty Wipfler
Les conditions pour que le jeu-écoute soit efficace
Patty Wipfler formule quelques conditions pour que le jeu-écoute soit efficace :
- Le parent ne doit pas paraître une menace (exemple : si l’enfant dit qu’il veut que son parent soit un monstre, l’adulte jouera le rôle d’un monstre stupide, maladroit et incapable, pas un gros monstre menaçant).
- Le parent est attentif à ce que montre l’enfant à travers son comportement et à ce qu’il demande (par exemple, si l’enfant veut que son parent le poursuive, le parent ne décidera pas d’être un monstre mais courra simplement après l’enfant avec des efforts bruyants et surtout sans succès : l’enfant réussira toujours à éviter son parent décidément maladroit ou trop lent).
- L’enfant reste gagnant (en cas de course poursuite, il doit toujours finir par s’échapper).
Quand un enfant est tout petit, il faut que les adultes jouent un rôle très impuissant pour l’amener à rire. Quand l’enfant grandit, devient plus fort et plus sûr de lui, il faut qu’il rencontre plus de résistance et de compétition pour continuer à rire. Si vous jouez en le forçant trop, l’enfant va pousser des cris frénétiques, parce que ses peurs l’empêchent d’être sûr de vos bonnes intentions. Si votre enfant crie au lieu de rire, ralentissez et devenez plus incapable, afin qu’il puisse reprendre l’initiative. Pour pouvoir relâcher le tension liée à son problème, il faut qu’il soit complètement en sécurité et en contrôle. – Patty Wipfler
Les bénéfices du jeu pour écouter, comprendre et se connecter aux enfants
Patty Wipfler regrette que certains parents aient peur que, s’ils prennent le rôle le moins puissant dans le jeu, leurs enfants perdent leur respect pour eux. Cette inquiétude n’est pourtant pas fondée.
C’est même plutôt le contraire qui arrive : un enfant peut effectivement être excité par le jeu et va probablement vouloir beaucoup plus de jeu-écoute (peut-être même plus que ce que les parents sont prêts à accorder). Pourtant, après un temps de jeu-écoute et de rires, l’enfant sera détendu et adoptera probablement des comportements plus affectueux.
Certaines fois, des sentiments plus profonds feront surface qui peuvent mener l’enfant aux larmes (des pleurs qui viennent du fond du coeur). Ces pleurs peuvent précisément émerger parce que le jeu et les rires ont profondément rassuré l’enfant et qu’il se sent suffisamment en confiance pour montrer ses émotions les plus douloureuses.
Les freins au jeu-écoute
Patty Wipfler reconnaît qu’il n’est pas facile pour la plupart des adultes de jouer activement et de manière sécurisante avec les enfants.
Nous sommes en effet peu nombreux à avoir eu des parents qui jouaient avec nous de cette manière (sans rentrer dans la domination et en y consacrant autant de temps que nécessaire).
Patty Wipfler conseille aux parents pour lesquels le jeu-écoute paraît difficile d’essayer de trouver quelqu’un pour les écouter et parler de ce qui est difficile.
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Source : Je t’écoute et ça change tout : les outils indispensables pour dénouer les situations de crise de Patty Wipfler (éditions Poche Marabout). Disponible en librairie, en médiathèque ou sur les sites de ecommerce.