Comprendre les besoins relationnels fondamentaux des humains (et leur conciliation parfois difficile)

crise terrible two

Les humains de tout âge sont mus par deux besoins fondamentaux, qui peuvent entrer en conflit :

  • Le besoin de vivre en relation,
  • Le besoin de s’individualiser.

Joël Monzée, ex-enseignant et neuropsychologue, estime que notre plus grand défi relationnel d’humains est de concilier ces deux besoins, car nous avons autant besoin d’être en relation que de nous individualiser.

Bien qu’il est soit utile de comprendre le fonctionnement affectif des enfants en général, l’observation de chaque enfant dans sa singularité permet de l’accompagner de manière bientraitante. Cette observation sans jugement a pour seul but d’aider l’enfant suite à quelque chose qui a éveillé l’attention de l’adulte chez l’enfant (exemples : un geste violent, des mots inacceptables, des comportements inappropriés…). Avant de se lancer dans une observation, il est utile de définir la motivation de ce temps d’observation (comme le fait de comprendre ce qui se passe pour un enfant qui tape ou qui “pleurniche”).

On peut avoir les meilleures connaissances, les meilleurs outils, les meilleurs trucs. Toutefois, si nous ne savons pas à quel moment il est approprié ou déconseillé de les utiliser, si l’on veut aller trop vite ou que l’on agit en retard, ce sera une intervention ratée ou du moins inefficace. Une autre clé de la réussite d’une intervention, outre notre bienveillance et notre remise en question continue, c’est l’observation ! Observer les effets de chacun de nos actes, de chacune des réactions, de chacun des effets positifs ou négatifs. Éduquer un enfant, c’est un art ! Un art à parfaire, jour après jour, pour savoir à quel moment et à quel rythme intervenir pour soutenir son développement affectif. – Joël Monzée

Ces temps d’observation permettent également d’émettre de regarder les fonctions et les causes des comportements des enfants (exemple : un enfant qui tombe souvent a peut-être des problèmes de vue).

Les crises du “terrible two” et du “fucking four” expliquées à la lumière des besoins relationnels et du processus de développement de l’enfant

La crise des deux ans

L’expression terrible two est passée dans le langage courant pour décrire  l’étape de développement où un enfant commence à comprendre qu’il ne peut pas nécessairement obtenir satisfaction alors même que ses compétences motrices se développent. Avant cet âge, le besoin de lien de l’enfant couplé à son manque d’autonomie faisaient en sorte que l’enfant était plus docile. Quand ses compétences motrices et langagière se développent, un enfant a moins envie de subir les situations et son envie d’expérimentation s’élargit. Toutefois, la réalité contrarie la satisfaction des besoins et envies des enfants. Les règles de sécurité et la réalité de la vie en collectivité (famille, garderie notamment) imposent des limites que le jeune enfant accepte avec moins de facilité.

Bien sûr, il veut encore le lien rassurant, mais il veut avec la même passion faire à sa tête. Il veut développer son autonomie. Il découvre donc que ces deux besoins peuvent, parfois, s’opposer et créer une forme de double contrainte relationnelle. Parfois, la tension intérieure entre ces deux besoins fait tellement « mal » sur le plan psychocorporel qu’il se met en situation de crise : il se jette à terre et trépigne pour avoir ce qu’il veut. – Joël Monzée

Jesper Juul, thérapeute familial danois, renomme d’ailleurs la “phase d’opposition” des enfants de deux ans en “âge de l’autonomie“.

Deux années durant, ils ont dû se tenir en permanence à la disposition de leur enfant, s’occuper de tout, et voilà que celui-ci voudrait se charger lui-même de certaines de ces tâches et soulager ses parents. Ces derniers devraient donc se réjouir de ce présent et remercier l’enfant en lui donnant la possibilité d’expérimenter son autonomie – tout en lui faisant naturellement savoir qu’il pourra toujours s’adresser à eux s’il a besoin d’aide. – Jesper Juul

La crise des quatre ans

Joël Monzée affirme que la double contrainte (lien contre autonomie) se joue aussi fortement autour de la crise des quatre ans, parfois appelée fucking four. Comme le sentiment d’existence individualisée se renforce mais que la relation est toujours aussi importante, l’enfant autour de quatre ans oscille entre réclamer l’attention du parent et s’opposer pour bien marquer son individualité. L’enfant ne fait pas cela contre les adultes, mais il se construit “avec les moyens du bord”.

Offrir aux jeunes enfants ce dont ils ont besoin 

Comprendre les motivations et les intentions des actes tant des enfants que des adultes permet d’agit avec bientraitance. Il arrive que la crise d’un enfant se déclenche parce qu’il n’a plus les moyens de réguler ses émotions tout seul. Il a besoin de décharger la pression que représente son vécu dans des bras accueillants et va chercher la relation par un moyen ou un autre (parfois, le jeune enfant cherche inconsciemment à fâcher ses enfants pour déclencher des pleurs salvateurs).

Lire aussi : Quand les enfants cherchent à attirer l’attention, c’est qu’ils cherchent de la relation

Juul affirme que les jeunes enfants ont besoin d’entraînement et de soutien pour développer des compétences émotionnelles et relationnelles. Ce soutien revient à être un “parent phare” :

  • laisser faire les enfants, sans pour autant les laisser seuls mais en offrant une présence encourageante et en montrant comment faire;
  • autoriser les enfants à faire des erreurs (en leur donnant le droit d’avoir des accidents).

Cette manière d’exercer notre responsabilité parentale requiert des ajustements de notre part : nous n’avons pas la responsabilité de veiller à ce que nos enfants ne commettent jamais d’erreurs car, s’ils n’en font pas, ils ne pourront pas apprendre à exercer leur responsabilité personnelle et savoir ce qui est ajusté/ adapté pour eux. C’est en prenant des décisions que les enfants apprennent à prendre des décisions; c’est en exerçant leur responsabilité personnelle que les enfants apprennent à affirmer leurs limites personnelles, à prendre soin d’eux-mêmes et à faire preuve d’autonomie. Par ailleurs, responsabilité personnelle et responsabilité sociale sont liées : un enfant (puis un adolescent) capable d’assumer sa responsabilité personnelle est capable d’avoir une conscience sociale élevée.

Jesper Juul prend l’exemple de l’opposition au sujet des vêtements : pour lui, il est inutile de passer des contrats avec les enfants ou de leur promettre des récompenses pour qu’ils s’habillent sans conflit. Les parents pourraient par exemple annoncer aux enfants qu’ils ne veulent plus de ces luttes matinales et que l’enfant peut décider lui-même de ce qu’il veut porter. Juul regrette que certains parents estiment les jeunes enfants incapables de s’habiller en fonction de la météo ou de manière coordonnée. Certains parent ont peur que l’enfant tombe malade ou bien qu’il soit habillé comme un “clown”. Non seulement il est tout à fait possible d’informer l’enfant qu’une robe d’été en hiver n’est pas une bonne idée (sans en faire une lutte de pouvoir) mais il est tout à fait possible de glisser un caleçon et un gilet dans le sac ou le cartable. L’enfant pourra toujours s’habiller plus chaudement au cours de la journée quand il en éprouvera le besoin (sans qu’un adulte lui fasse la morale ou l’humilie en lui disant “Je te l’avais bien dit”). L’enfant apprendra qu’en effet, une robe d’été en hiver n’est pas la tenue la plus adaptée en hiver. Par ailleurs, il est également possible de faire un tri été/ hiver et de ne laisser dans le placard que les vêtements de saison.

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Sources :

J’ai juste besoin d’être compris ! Comprendre les comportements dérangeants chez l’enfant et l’adolescent de Joël Monzée (éditions Le Dauphin Blanc). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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5 piliers pour une vie de famille épanouie : par l’expert danois de l’éducation de Jesper Juul (éditions Poche Marabout). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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