Mon enfant, mon égal : un livre impertinent pour l’égale dignité entre parents et enfants (secousses garanties)

livre mon enfant mon égal

Présentation de l’éditeur

mon enfant mon égalMon enfant, mon égal ? A priori, on est prêt à admettre que les enfants et les adultes sont égaux en tant qu’êtres humains et personnes. Mais aussi bien dans les droits que dans les faits, les enfants subissent la domination adulte d’une façon si banale qu’elle est considérée comme naturelle voire justifiée et légitimée par leur prétendue vulnérabilité. Cette vulnérabilité constitue à la fois la possibilité même et le prétexte de toutes sortes d’abus.

Et si nous envisagions les choses autrement ? Renoncer à cette hiérarchie et considérer son enfant comme son égal mène-t-il réellement au chaos ? Pas si sûr. C’est ce que propose de nous montrer Évelyne Mester dans ce livre. Mais vous n’y trouverez pas de recettes pour obtenir des enfants obéissants.

Pas d’instructions pour qu’ils respectent les règles. Pas de conseils pour faire cesser leurs « crises ». Simplement une invitation à changer de perspective pour vivre ensemble sans domination et en liberté.

Dans un style percutant, léger et drôle mais avec beaucoup de finesse et de profondeur, Évelyne Mester nous entraîne dans un voyage passionnant au coeur de nos croyances, pour porter un regard neuf sur notre quotidien de parents et nous encourager à reconsidérer la place de l’enfant dans la famille, et plus généralement dans la société.

 

Lien vers le site de l’autrice : mon-enfant-mon-egal.com

Les points forts

Ce livre est une pépite (en même temps, connaissant cette maison d’édition, on ne peut s’attendre qu’à cela !). Il se lit très facilement grâce aux touches d’humour d’Evelyne Mester sans pour autant perdre de sa pertinence, voire de son impertinence ! Elle y reprend de nombreux arguments qui remettent en cause l’éducation respectueuse (j’ai le droit d’élever mes enfants comme je veux/ les enfants vont se mettre en danger ou mettre les autres en danger/ il faut bien poser des limites/ il faut bien apprendre les codes sociaux/ tous les enfants vont finir irrespectueux et mal élevés)… et les déconstruit un à un de manière efficace et illustrée d’exemples du quotidien.

Dès les premières lignes, Evelyne Mester joue franc jeu : elle nous prévient qu’elle ne citera pas de bibliographie, que sa réflexion est libre et l’aboutissement d’une longue réflexion construite à partir de sa propre expérience de mère, de coach et d’intervenante dans des groupes de parentalité respectueuse. On sent d’ailleurs la réticence d’Evelyne Mester à utiliser les termes parentalité bienveillante ou positive parce que ces expressions reflètent encore une posture où l’adulte cherche à dominer l’enfant (par exemple, en ne respectant pas son rythme biologique ou sa sensation de faim/ satiété mais en ayant recours à des expressions “positives” comme les consignes en langage affirmatif).

Ne tombons pas dans les pièges qui pourraient nous faire oublier de traiter nos enfants comme nous aimerions l’être, sous prétexte d’un décalage de capacités entre eux et nous. Si on me prouvait que mon cerveau était immature ou mes gestes peu assurés, je n’apprécierais pas pour autant qu’on me traite avec condescendance. En quoi un cerveau ou un corps différent empêchent-ils d’être traité comme égal en droits et en égards ? Ça s’appelle la dignité. – Evelyne Mester

Dans cet ouvrage, le propos est clair : on se situe dans le champ de l’égalité des droits et de l’égale dignité. Il ne s’agit jamais de trouver des astuces bienveillantes pour faire manger un enfant qui n’a pas faim ou faire dormir un enfant qui n’a pas sommeil ou encore pour stopper une crise de colère. Il s’agit de raisonner autrement pour prendre en compte les besoins de chacun. Et Evelyne Mester insiste bien sur ce point : les besoins de chacun, y compris les très jeunes enfants et y compris bien sûr les parents !

Ainsi, elle nous rappelle de prendre soin de nos propres besoins pour ne pas avoir à faire peser sur nos enfants notre propre fatigue, nos propres frustrations ou notre stress (il est toujours plus facile de s’en prendre aux plus faibles). Elle écrit : “Vous pensez que votre rôle de parent est d’être disponible tout le temps et arrivé le soir, vous avez juste envie d’avoir la paix, de vivre cinq minutes pour vous… Les cinq minutes que vous n’avez pas jugé urgent de vous octroyer en cours de journée, dommage”.

Ainsi, nous pouvons acquérir le réflexe du “jeu de piste” : je sens qu’il se passe un truc en moi, j’ai envie de donner une claque à mon enfant et ce n’est pas normal. J’ai le feu aux joues et je sens que tout mon corps se tend. C’est de la colère. Qu’est-ce qu’elle cache cette colère ? Je crois que c’est du découragement parce que j’ai besoin de… Evelyne Mester rappelle que cette attitude n’est pas simple et qu’il n’existe aucune baguette magique pour être un parent calme et zen (mais voulons-nous vraiment être un parent parfait, d’humeur égale en toute circonstance ?). C’est certes difficile mais cela “rend libre”. Ça peut être long mais c’est respectueux (de soi et des autres, quel que soit leur âge).

Evelyne Mester nous invite à parler de nos ressentis et de formuler des demandes plutôt qu’asséner les enfants d’injonctions, même “bienveillantes” (du type “c’est important que tu dormes bien pour bien travailler à l’école” ou “c’est pour que tu sois en bonne santé que je te force à manger des légumes”). Elle nous demande : pourquoi ne faisons-nous pas ce type d’injonctions à des invités par exemple ?

Pour cela, Evelyne Mester utilise une image qui m’a beaucoup plu : celle du “colocataire en rémission“. Elle nous invite à considérer les enfants comme des colocataires en rémission qui reviendraient diminués de l’hôpital après un accident. Le colocataire est certes diminué et ne peut donc pas en faire autant que nous mais cela viendra petit à petit, surtout si on a la foi dans ses compétences et qu’on respecte son rythme, tout en montrant un exemple à imiter.

Evelyne Mester est un peu taquine et se moque de certains principes érigés comme des dogmes dans l’éducation dite positive “validée par les neurosciences” (bon, j’avoue que je me suis un peu sentie visée avec le blog ahah !). Elle regrette que certaines pistes proposées soient imposées comme des solutions toutes faites dans une approche comportementale (par exemple, penser que les consignes positives vont tout changer pour qu’un enfant se mette enfin à obéir relève de la croyance et n’invite ni à changer de posture pour tendre vers l’égale dignité ni à envisager les relations comme un système dans un environnement où par exemple la mémoire traumatique des parents joue le premier rôle).

Evelyne Mester prend l’exemple de la situation du feu dans la maison. Est-ce que quelqu’un de sensé, même convaincu de l’importance de l’égale dignité, demanderait à l’enfant qui regarde la télé s’il préfère terminer son dessin animé avant de sortir de la maison en feu ? Bien sûr que non ! Il n’est pas besoin d’être responsable légalement de quelqu’un pour en prendre soin et veiller à sa sécurité et nous agirions de la même manière en compagnie d’autres adultes : nous nous précipiterions dehors en emmenant les autre avec nous, de force s’il le faut pour retenir celui ou celle qui voudrait retourner dans la maison pour chercher quelque chose de précieux.

Ainsi, Evelyne Mester nous confie quelques clés tout au long de son livre, en se défendant bien de prétendre avoir trouvé une recette miracle et en nous invitant à trouver les nôtres à tâtons :

  • se connaître soi (et en particulier ses valeurs et ce qui donne du sens à la vie)
  • assumer sa vulnérabilité et ses erreurs
  • se respecter soi
  • savoir exprimer ses limites personnelles
  • prendre sa propre responsabilité sur ses émotions
  • être conscient que l’autre a ses raisons d’agir ainsi
  • écouter sans jugement ni conseil et encore moins d’imposition de point de vue
  • entendre les besoins de l’autre derrière ses émotions
  • reformuler le tout pour voir si on a tout bien compris
  • “pinailler” pour trouver une solution gagnant-gagnant ensemble (ou “moins perdant/ moins perdant”).

C’est justement parce que le changement est avant tout à opérer dans notre attitude et notre façon de penser qu’un livre de ce type ne veut pas et ne peut pas donner de phrases à dire, de consignes toutes faites ou encore de modèles prêts à l’emploi. Je parie que vous ne serez plus tout à fait le même parent après avoir lu ce livre, secousses garanties !

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Mon enfant mon égal de Evelyne Mester (éditions Le Hêtre Myriadis) est disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet (site de l’éditeur).

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