Mettre en place des Cercles Restauratifs à l’école : un outil de non violence et de régulation des conflits

Dominic Barter est le créateur de la pratique des Cercles Restauratifs. Dans le système restauratif, tout membre de la communauté (dans notre cas, la communauté scolaire) peut faire appel à l’organisation d’un Cercle Restauratif. Les Cercles Restauratifs à l’école permettent de traiter les conflits d’élève à élève, d’élève à enseignant mais également d’adulte à adulte. Les élèves savent alors à quoi s’attendre en cas de problèmes car le même processus est alors engagé.

Les principes des Cercles Restauratifs

Dans un établissement scolaire, on sait qu’à un moment les personnes vont avoir faim. On n’attend pas qu’il soit midi pour construire une cantine. Et on trouve normal qu’une cantine existe, même si elle ne sert pas tout le temps. Dans toute communauté, il y a forcément des conflits. Installer un système restauratif, c’est prévoir un espace, une structure qui permet de vivre les conflits quand ils se présentent. – Dominic Barter

Avec l’instauration de Cercles Restauratifs à l’école, chaque personne de l’établissement, quels que soient son âge et son statut, est traitée de la même façon et aucune situation douloureuse ne reste sans réponse. Ce processus est source d’empathie, de partage des responsabilités, de sentiment de sécurité et d’appartenance à la communauté scolaire.

Un protocole précis pour les Cercles Restauratifs à l’école

Dans un Cercle Restauratif, la formulation des problèmes se base sur des actes et des comportements et non pas sur des personnes ou personnalités. On ne s’adresse pas à un coupable mais à une personne « auteur » qui a dit ou fait quelque chose qui a causé du tort. Ce regard « restauratif » permet la recherche de solutions même si on souffre/est touché par ce qui a pu être dit ou fait. Il y a toujours celui qui initie le cercle (l’initiateur) et celui qui le facilite (le facilitateur). Le mode de fonctionnement en système restauratif permet à n’importe qui d’être légitime à faire appel au Cercle Restauratif et à en devenir ainsi l’ « initiateur ». L’initiateur sollicite un « facilitateur », qui est celui qui prépare et aide au déroulement du Cercle Restauratif.

Par ailleurs, la reformulation des propos de l’autre est au coeur du processus. La reformulation par le récepteur du message est une condition pour éviter les problèmes d’interprétation. Pour éviter les malentendus, celui qui reçoit un message vérifie avec son interlocuteur la bonne compréhension de son contenu.

Les Cercles Restauratifs repose donc sur des piliers de non violence :

  • avoir des propos réfléchis (un temps de silence est parfois nécessaire pour la réflexion) ;
  • être soutenu par la présence de personnes rassurantes ;
  • écouter le point de vue de chacun (appréciation et respect) ;
  • relier pensées, sentiments et comportement ;
  • essayer de se comprendre mutuellement ;
  • relier l’acte et son effet ;
  • se concentrer sur le préjudice et sa réparation ;
  • identifier les besoins individuels de chacun ;
  • se responsabiliser pour la réparation ;
  • partager des solutions et la prise de décisions.

Une fois passée la période d’installation du système restauratif au sein de la communauté scolaire et la formation des premiers facilitateurs, qui nécessitent la compétence de professionnels formateurs, le but est que la communauté ait son propre système de régulation des conflits.

Toute personne souhaitant contribuer au bien-être dans la communauté peut être facilitateur, y compris des élèves.

Les 3 étapes de la démarche : Avant-Cercles, Cercle(s), Après-Cercle

La démarche nécessite qu’un adulte référent au moins dans l’établissement soit formé à la mise en place des Cercles Restauratifs. Car celle-ci ne se limite pas aux trois étapes présentées ci-dessous, mais implique une préparation en amont pour introduire ce système dans l’école ou l’établissement scolaire.

Les Avant-Cercles

Le facilitateur rencontre séparément l’(les) auteur(s) de l’acte, le(s) receveur(s) de l’acte et les personnes de la communauté touchées par l’acte. Ces Avant-Cercles permettent au facilitateur d’aider l’initiateur à préciser l’acte à propos duquel il demande un Cercle Restauratif et d’offrir cette même écoute à l’ensemble des participants. Le facilitateur offre son écoute empathique aux personnes, pour qu’elles se sentent entendues dans ce qu’elles ont vécu et arrivent au cercle dans une ouverture à la rencontre et à la construction.

Rencontre avec l’initiateur

  • Qu’est-ce qui a été dit ou fait que tu aimerais amener à un Cercle Restauratif ?
  • Comment te sens-tu ?
  • De quoi as-tu alors besoin ?
  • Est-ce que tu veux aller de l’avant grâce à l’organisation d’un cercle et trouver les meilleures solutions ?
  • Qui devrait être là selon toi ?

Rencontre avec les personnes invitées par l’initiateur (auteurs de l’acte, personnes de la communauté touchée par l’acte)

Le facilitateur explique la démarche: « On va essayer de parler ensemble pour que chacun puisse être écouté et compris dans sa manière d’avoir vécu cette situation. L’objectif est de trouver ensemble un moyen d’améliorer la situation en construisant un plan d’action avec votre accord . » Le facilitateur se met à l’écoute sans porter de jugement :

  • Qu’est-ce qui a été dit ou fait qui t’amène dans ce Cercle Restauratif ?
  • A quoi pensais-tu lorsque tu t’es rendu compte de ce qui s’est passé ?
  • Quel a été l’impact de ces actions sur toi et sur les autres ?
  • Quelle a été la chose la plus difficile pour toi ?
  • Qu’est-ce qui pourrait t’aider ?
  • Est-ce que tu veux aller de l’avant grâce à l’organisation d’un cercle ?
  • Qui devrait être là selon toi pour trouver une issue positive à ce conflit ?

Suite à ces questions, la facilitateur conclue sur la tenue prochaine d’un Cercle Restauratif : “Pour conclure avec chacun, nous allons nous réunir en cercle à tel moment, chacun aura l’occasion de parler, d’être entendu et respecté, de questionner et de répondre, en se souciant des règles que l’on vient d’évoquer. Nous pourrons savoir où vous en êtes, comment chaque personne a vécu la situation et ce que vous voudrez faire. Voici les prochaines étapes… Avez-vous des questions ?”

Mise en place du Cercle Restauratif 

Le facilitateur réunit ensuite l’initiateur et toutes les personnes invitées, il les installe en cercle.

Exemple d’introduction par le facilitateur : Bienvenue à ce cercle. Pour la plupart d’entre vous, ce n’est pas facile d’être là et je vous remercie d’être venu. Quand tout le monde sera prêt, nous finirons par discuter à un plan d’action pour sortir de ce conflit.”

Le facilitateur anime le Cercle Restauratif en 3 temps :

• le premier permet à chaque personne d’exprimer et d’être entendue dans ce qu’elle vit en relation avec le conflit en jeu et de recevoir de l’écoute empathique pour ce qu’elle vit ;

• le second permet la compréhension de ce qui a amené chacun à agir comme il l’a fait et la responsabilisation de chaque personne ;

• le troisième permet la décision d’actes de restauration sur le plan relationnel, d’éventuels actes de réparation et de prévention de conflits similaires, avec un échéancier précis pour leur réalisation et la décision de la date de l’Après-Cercle.

Exemples de questionnement à poser par le facilitateur pour enclencher le Cercle Restauratif :

  • Qu’aimerais-tu faire savoir et à qui de ce que tu vis actuellement en relation avec ce qui s’est passé et ses conséquences ?
  • Que voudrais-tu faire savoir et à qui de ce que tu recherchais au moment où tu as choisi d’agir ?
  • Qu’aimerais-tu voir se passer prochainement ?
  • Qu’aimerais-tu proposer ?
  • Qu’aimerais tu demander ?
  • De quoi aurais-tu besoin ?
  • Qu’aimerais-tu voir se passer prochainement ?
  • De quoi aurais-tu envie/besoin pour te sentir mieux ?

Le facilitateur n’intervient que pour faciliter l’écoute mutuelle : quand un participant s’adresse à un autre, le facilitateur invite l’interlocuteur à reformuler les propos, puis il invite la personne qui a parlé à confirmer si elle a été entendue ou à repréciser si besoin ce qu’elle voulait dire. Lorsqu’une personne (l’émetteur) s’adresse à une autre (le récepteur), le facilitateur demande au récepteur de faire savoir ce qu’il a compris avec ses propres mots : Pourrais-tu lui dire ce que tu as compris de ce qu’il t’a dit ? Que l’as-tu entendu dire ?” Cela permet à chacun de se mettre à la place de l’autre, de mieux comprendre et d’éviter les malentendus. L’émetteur confirme si c’est bien ce qu’il a voulu dire ou reformule si le sens de ce qu’il a voulu dire n’a pas été bien compris. Le facilitateur peut le relancer si besoin : est-ce bien ça ?.

Et cela jusqu’à ce que les choses soient explicites entre l’émetteur et le récepteur. Le facilitateur laisse les solutions émerger dans le cercle et a confiance au processus, il reste impartial car il est juste là pour proposer le cadre. A titre exceptionnel, si faute de temps, un cercle peut s’organiser en plusieurs fois, sur plusieurs semaines en fonction de l’avancée de celui-ci. A chaque étape, le facilitateur s’assure ainsi : “Vous avez envie de poursuivre ?”. Enfin, le facilitateur conclut en synthétisant les solutions envisagées, en actant sur papier le plan de réparation décidée en commun et accepté par chacun.

L’Après-Cercle

Il est programmé dans un délai décidé par les membres du cercle, qui laisse le temps d’expérimenter le plan d’action. Il permet à chacun d’exprimer comment il se sent avec la manière dont les actes de réparation et de restauration ont été réalisés et de célébrer la qualité de relation retrouvée, si tout le monde est satisfait de ce qui s’est passé, ou de réajuster s’il reste des insatisfactions.

Un exemple de Cercle Restauratif à l’école

Des ressources pour s’initier à la mise en place de Cercles Restauratifs