3 mythes au sujet de la construction de l’estime de soi des enfants

mythes estime de soi des enfants 

Mythe n°1 : Il faut protéger les enfants des erreurs et des échecs.

Ce mythe est lié à l’idée que les enfants ne pourraient pas supporter la déception. Pourtant, un acte (=un raté) n’est pas identité (=je suis un raté). Nous pouvons choisir d’accompagner la déception des enfants et de repenser les erreurs comme des opportunités d’apprentissages, plutôt que comme une faute. Les erreurs peuvent donner des indications sur les conceptions qu’un enfant a développées, sur les liens qu’il a fait entre des informations et sur les compétences qui lui manque mais qu’il peut acquérir avec le temps.

La déception des enfants n’est pas quelque chose que les adultes doivent contrôler ou éliminer mais plutôt quelque chose à accompagner. Un enfant déçu a surtout besoin de se sentir compris et cru dans ses émotions. Il n’a pas besoin de solution ou d’avis car la déception ne peut pas être réparée ni balayée par des conseils. La déception a juste besoin d’espace pour exister. C’est important pour un enfant d’être autorisé à éprouver de la colère et de la tristesse quand il a perdu quelque chose ou n’a pas obtenu ce qui lui faisait envie. Quand on ne peut pas avoir ce que l’on souhaite, il n’y a rien d’autres à faire que de pleurer dessus.

Trouver les bons mots pour accueillir la déception des enfants n’est pas toujours aisé mais dire “je te crois”/ “je te vois”permet déjà de créer une connexion émotionnelle. Quelque soit le motif de la déception (une mauvaise note, une défaite dans une compétition, un bonbon refusé…), valider les émotions de l’enfant peut passer par des phrases du type :

  • Je vois que tu es vraiment déçu. 
  • Je crois que je comprends à quel point tu es frustré.
  • Ça te donne envie de pleurer tellement tu es déçue.
  • Tu aurais tellement aimé que cela se passe autrement. 
  • Ta déception te parle de ce qui est important pour toi : elle raconte que tu avais à coeur de réussir/ obtenir ce que tu n’as pas eu.
  • Est-ce que tu as besoin juste d’une écoute ou d’un conseil ?
  • Est-ce que tu voudrais une proposition de solution après un câlin de ma part ?

Mythe n°2 : Il faut féliciter les enfants pour tout ce qu’ils font.

Carol Dweck, psychologue américaine, distingue féliciter (“Tu es le meilleur”, “Tu as fait un beau dessin”) et encourager (“Tu t’es beaucoup entraîné et c’est grâce à cela que tu as réussi à marquer un but aujourd’hui”). Porter notre attention sur les efforts et le processus, ainsi que faire des remarques descriptives sur le résultat (les couleurs, les formes, l’intention de l’enfant) n’a pas le même effet que porter un jugement sur le résultat (un joli dessin, une belle peinture…) ou une étiquette sur l’enfant (intelligent, doué..).

Carol Dweck a d’ailleurs mené une étude aux Etats-Unis au cours de laquelle elle a montré qu’un seul compliment maladroitement formulé (en insistant sur les capacités intellectuelles fixes : “Bravo, tu as bien réussi, tu es tellement intelligent” plutôt que sur le processus intellectuel : “Tu as réussi, tu as dû beaucoup réfléchir et essayer plusieurs fois avant d’y arriver”) a suffi à rendre certains enfants peu sûrs d’eux au point de mentir pour se conformer à leur statut d’enfants intelligents.

Elle a conçu le concept de “growth mindset” (ou état d’esprit de développement en français) pour expliquer que les seules capacités et le talent ne suffisent pas pour réussir. Le plus important pour relever et réussir des défis est de les aborder avec un état d’esprit de développement. Il s’agit de penser en termes non seulement d’efforts et de travail mais également de stratégies. Encourager, ce n’est pas récompenser l’intelligence ou le talent, mais plutôt valoriser les efforts, les progrès et les stratégies à mettre en place pour le futur. Carol Dweck insiste sur le pouvoir des “pas encore” et des “bientôt” : “Tu n’y arrive pas encore; tu y arriveras bientôt“. Quand un enfant pense que ses capacités peuvent être développées, il s’implique en profondeur, il traite les erreurs, il apprend d’elles et peut les corriger.

Lire aussi : Complimenter : des effets négatifs à haute dose + des alternatives aux compliments

Mythe n°3 : Il faut expliquer les erreurs des enfants par des raisons extérieures à eux pour préserver leur image.

Mieux vaut reconnaître les erreurs pour ce qu’elles sont (plutôt qu’accuser les autres ou les circonstances) afin de les analyser et en tirer des stratégies plus efficaces pour les prochaines fois.

Au cours de ses recherches scientifiques, Martin Seligman, psychologue américain, a constaté que les pessimistes réussissent moins bien que les optimistes. Or l’optimisme ne repose pas sur des phrases positives ou des images de victoires mais sur la façon dont on considère les causes des événements qui nous arrivent.

Chacun de nous a des habitudes de réflexion sur les causes des événements qui surviennent dans notre vie. Seligman les nomme les “styles explicatifs“. Le style explicatif s’acquiert dans l’enfance et, sans intervention explicite, il dure toute la vie.

Nous utilisons (adultes et enfants) trois dimensions pour expliquer les causes des événements positifs ou négatifs qui nous arrivent :

  • la permanence,

Le style explicatif pessimiste réside dans le fait de croire que les causes des événements négatifs sont permanentes. La cause subsistera éternellement donc l’événement négatif se reproduira toujours. Un enfant qui pense ses échecs en termes de “toujours” ou de “jamais” est de style pessimiste. Le style explicatif optimiste est fondé sur la croyance que les causes des événements négatifs sont temporaires. Un enfant qui pense à ses échecs en termes de “parfois” ou de “dernièrement” est de style optimiste. Pour les pessimistes, le succès parait ne tenir qu’à la chance alors que les optimistes l’attribuent à des aptitudes et traits de caractère qu’ils auront toujours (exemples : la persévérance, la fiabilité, l’altruisme…).

  • l’omniprésence,

Les enfants qui s’accrochent à des explications générales pour leurs échecs baissent les bras dans tous les domaines lorsqu’ils échouent dans un seul (“je suis nul dans telle matière donc je suis nul dans tout”). Les enfants qui croient aux explications particulières peuvent se sentir impuissants dans un domaine précis, néanmoins ils poursuivent leur vie et peuvent entreprendre dans d’autres domaines.

  • la personnalisation.

La personnalisation est le fait de décider qui est fautif. Le premier objectif pour tenter de changer le style explicatif d’un enfant est de s’assurer qu’il assume des responsabilités réalistes. Le second objectif est de l’inciter à blâmer son comportement, plutôt que lui-même en général.

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Pour aller plus loin :