La maltraitance émotionnelle est une forme de violence psychologique.

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Les maltraitances émotionnelles sont nocives pour le développement de l’enfant

Dans son livre Le manuel de survie des parents, Héloïse Junier (psychologue en crèche) rappelle que les maltraitances émotionnelles sont nocives pour le développement de l’enfant. Elles impactent la confiance en soi, la capacité à réguler les émotions et à faire preuve d’empathie. Héloïse Junier souligne un point important : c’est la répétition qui est nocive. Les violences psychologiques sont donc particulièrement toxiques quand elles sont répétées. Il peut arriver qu’une gifle parte toute seule, qu’un parent à bout laisse son bébé pleurer (pour éviter d’en venir à le secouer). Ce n’est pas la même chose que se sentir dépassé puis de s’excuser auprès de l’enfant et de chercher des solutions différentes pour les prochaines fois, que de revendiquer le droit à la violence sous couvert d’éducation sur les enfants.

Yvane Wiart, thérapeute spécialiste de la théorie de l’attachement, définit quant à elle la violence psychologique sur les enfants comme des comportements répétés par un parent (ou autre adulte en charge de l’enfant), ou d’un incident extrême, qui font comprendre à l’enfant qu’il ne vaut rien, qu’il n’est pas normal, qu’il n’est pas aimé, que l’on ne veut pas de lui, qu’il est en danger ou que sa seule valeur réside dans la satisfaction par lui des désirs des autres. Cette violence psychologique porte atteinte aux besoins fondamentaux d’estime de soi, d’amour, d’appartenance, de sécurité et d’équilibre physiologique de l’enfant qui en est victime (et même témoin).

La maltraitance émotionnelle peut prendre diverses formes

La maltraitance émotionnelle peut prendre diverses formes : 

  • isoler un enfant, l’exclure d’un groupe et le forcer à rester immobile (le mettre au coin),
  • lui faire honte, se moquer de lui (exemple : le laisser avec son pantalon mouillé pour lui faire comprendre qu’il doit demander pour aller aux toilettes),
  • lui hurler dessus,
  • le laisser pleurer, ne pas le rassurer ou le consoler ,
  • lui faire peur (par exemple, dire que les gendarmes viendront le chercher s’il n’est pas sage),
  • le mépriser et l’humilier (lui dire qu’il est nul, méchant ou vilain),
  • le soumettre à du chantage (comme le fait de le menacer de partir sans lui s’il ne se dépêche pas),
  • le priver d’amour (lui dire qu’on ne l’aime plus),
  • nier ses émotions, les tourner en ridicule (“ne fais pas le bébé, ça ne fait pas peur”, “arrête ton caprice tout de suite”).

L’autorité parentale ne justifie pas les maltraitances émotionnelles.

L’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ni psychologiques.

Rappelons par ailleurs que, depuis 2019, la loi française stipule que l’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ni psychologiques. Cela inclut notamment les fessées, les claques, les cheveux ou oreilles tirés, mais aussi les paroles humiliantes, les privations (de soins, de nourriture…) ou le retrait d’amour (comme les menaces d’abandon ou enfermer un enfant qui pleure dans sa chambre). Il existe comme un continuum de violences : cela commence par des violences estimées inoffensives qui escaladent de plus en plus quand le parent n’a pas un sens de l’interdit bien ancré et qu’il estime qu’il faut agir plus fort sur l’enfant qui n’obéit pas malgré les contraintes exercées sur lui.

Certains adultes (parents, enseignants mais aussi psychologues) s’inquiètent que cette loi de 2019 nuise aux familles car les parents seraient culpabilisés et ne pourraient plus exercer leur autorité. L’ingérence de l’Etat serait trop grande, les parents privés de leur liberté de choix éducatifs. D’une part, les parents seraient condamnés au laxisme (en conséquence, les enfants à devenir des “tyrans“), et, d’autre part, les injonctions à la non violence feraient peser un fardeau trop lourd sur les épaules des parents, menés tout droit au burnout.

Pourtant, ces mêmes personnes s’offusqueraient du fait que la loi ne les protège pas si elles étaient amenées à subir de violences. En effet, aucun adulte n’accepterait d’être tapé au travail après un retard ou une erreur, d’être isolé dans un bureau ou dans un placard en cas d’irrespect envers un supérieur hiérarchique, de se faire hurler dessus à la suite de la casse ou la perte d’un objet.

La non violence éducative n’a pas pour vocation de culpabiliser les parents.

Il peut que certains adultes se sentent culpabilisés à la lecture de ce type d’information et qu’ils tentent de justifier les maltraitances émotionnelles par le fait qu’ils en ont été la cible plus jeunes et que cela leur a servi à ne pas mal tourner. Souvent, ces adultes, devenus parents, pensent que les traitements de ce type font du bien aux enfants, dans le sens où cela les endurcit et qu’ils ont mérité de souffrir parce qu’ils ont testé les limites.

Pourtant, aucun enfant ne mérite d’être humilié, d’être privé d’interaction ou de voir ses émotions tournées en ridicule. Les adultes qui ont été victimes de maltraitance émotionnelle étaient des enfants comme les autres, traversés d’émotions intenses, qui méritaient d’être pris dans des bras rassurants, d’être cajolés et traités avec respect.

Les parents d’aujourd’hui n’ont pas besoin de justifier la manière dont leurs parents les ont traités à l’époque car ces derniers n’ont probablement pas agi par manque d’amour, mais plutôt par manque de connaissance, par manque d’alternatives disponibles dans les discours des professionnels ou dans les pratiques éducatives observables chez d’autres parents. En effet, il y a encore quelques années, nous n’avions pas les mêmes connaissances au sujet de la psychologie des enfants. On avait tendance à les penser manipulateurs, violents par nature et tyranniques. Toutefois, il est possible, à l’âge adulte, d’accueillir la tristesse et même la colère éprouvée à l’idée de ce qui s’est passé dans l’enfance. En effet, le droit de vivre sans atteinte à son intégrité et sa dignité est un droit humain à tout âge.

La non violence éducative n’a pas pour vocation de culpabiliser ou d’enfermer les parents, de trier les “bons” parents des “mauvais”, mais de consolider l’idée que la violence n’est pas une fatalité. De plus, on sait bien que la morale et le droit ne suffisent pas pour venir à bout de la violence. Une parentalité consciente aide à changer de regard sur les enfants en raisonnant en termes de besoins émotionnels et de travail sur soi. Cheminer vers une parentalité consciente reste une lourde tâche.

Lire aussi : Alice Miller : le devoir de se révolter contre les maltraitances éducatives que nous avons reçues

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Pour aller plus loin : Le manuel de survie des parents – Décrypter et accompagner l’enfant de 0 à 6 ans de Héloïse Junier (éditions Dunod). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet. 

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