Le parentage centré sur les forces des enfants

 

Dans son livre Cultiver ses forces, Lea Waters propose d’envisager l’éducation par le prisme des forces telles qu’elles ont été conceptualisées par la psychologie positive. La notion de forces est une clé de la psychologie positive et Lea Waters en a déduit un “parentage centré sur les forces des enfants”.

Le postulat de départ est que chaque humain a des points forts. Nous sommes tous équipés de talents particuliers (sur le plan physique, mental, social, technique ou créatif) ainsi que de traits de personnalité positifs (par exemple le courage, la gentillesse ou le sens de la justice), à des niveaux plus ou moins élevés. Le parentage centré sur les forces met les enfants au contact de leur propre constellation de talents (définis par la performance) et traits de caractère (définis par la personnalité) qui se retrouvent dans une combinaison unique.

Les forces selon la psychologie positive

Une force est une qualité :

• qui nous donne de l’énergie, que nous pratiquons avec aisance et sur laquelle nous nous appuyons fréquemment
• qui participe à l’atteinte de nos objectifs et à notre épanouissement
• construite à partir d’une capacité innée puis, au fil du temps, développée grâce à nos efforts enthousiastes
• reconnue par les autres comme digne de louanges, pour sa contribution positive au développement d’autrui

La psychologie positive a identifié 24 forces universelles qui peuvent être réparties en six domaines (appelés vertus) auxquels elles permettent de contribuer.

• La sagesse et la connaissance : créativité, curiosité, discernement, goût de l’apprentissage, perspective
• Le courage : vaillance, honnêteté, persévérance, enthousiasme
• L’humanité : gentillesse, amour, intelligence sociale
• La justice : justice, leadership, esprit d’équipe
• La tempérance : pardon, humilité, prudence, autorégulation
• La transcendance : appréciation de la beauté, gratitude, espoir, humour, spiritualité

Identifier les forces des enfants

Une force se repère à ses trois composantes. Pour les besoins d’un parentage centré sur les forces, Lea Waters propose de garder un œil sur chacune des trois :

• La performance : l’enfant est bon dans l’activité
• L’énergie : il s’y sent bien
• Une utilisation intensive : il la choisit souvent de nombreuses fois.

A partir de ces trois composantes, trois questions peuvent être utiles pour repérer les forces d’un enfant :

1. Est-ce que je constate une performance ? On cherche ici ces moments où l’enfant accomplit des choses au-dessus du niveau moyen de son âge, où il apprend vite et enchaîne les succès.

Exemples : une fillette, qui peu de temps après avoir touché à une batte de baseball pour la première fois, réalise de magnifiques frappes; l’élève du primaire qui a le nez dans les livres et utilise davantage de mots ou de structures de phrases complexes que ses pairs; l’adolescent qui affiche systématiquement une compréhension plus sophistiquée des émotions que la plupart des adultes.

2. Est-ce que je vois de l’énergie ? Les forces se renforcent d’elles-mêmes : plus nous nous servons d’elles, plus elles nous donnent de vigueur. Quand un enfant déploie une force, il est rempli d’énergie et paraît infatigable.

3. Est-ce que je remarque une utilisation intensive d’une force ?

En parallèle, d’autres éléments vont permettre de confirmer l’identification des forces d’un enfant : ce que l’enfant choisit de faire pendant son temps libre, à quelle fréquence il pratique une activité spécifique et la façon dont il parle de cette activité.

Il existe un questionnaire en ligne pour les adultes : viacharacter.org

 

S’appuyer sur les points forts des enfants dans l’éducation pour faire preuve d’empathie, comprendre les enfants et rediriger les comportements

Développer les forces des enfants

Le parentage centré sur les forces des enfants tel que conceptualisé par Lea Waters invite à tourner notre attention sur le développement des forces des enfants, plutôt que sur la réduction de leurs faiblesses afin d’accompagner la construction d’une identité solide. Cette identité  fournit aux enfants une base stable à partir de laquelle ils peuvent reconnaître leurs points faibles et travailler à ce qu’ils souhaitent améliorer.

Faire une fixation sur le comportement inacceptable de l’enfant est contre-productif. Il est nettement plus positif de lui demander si par hasard il  n’aurait pas sous-utilisé une de ses forces.- Lea Waters

En lui montrant où il sous-utilise une force, nous aidons l’enfant à prendre conscience de ses comportements et à en assumer la responsabilité : il comprend qu’il n’est pas « méchant », mais plutôt qu’il n’a, pour une raison ou une autre, pas fait le meilleur choix et quel levier il peut activer pour mieux agir la prochaine fois.

L’objectif du parentage centré sur les forces est que l’enfant développe son sens de la responsabilité individuelle et une estime de soi saine : « J’ai fait ça, mais cela ne veut pas dire que je suis une mauvaise personne. J’ai juste oublié d’utiliser certaines forces. Je sais que j’ai ces forces à l’intérieur de moi. Si je les sollicite la prochaine fois, cette situation ne se reproduira pas. »

Rappeler aux enfants leurs forces personnelles pour qu’ils redirigent leur comportement

Lea Waters propose quelques exemples de conversations parents-enfants qui s’appuient sur les forces  :

•  Je suis étonné que tu te sois moqué du nouvel élève aujourd’hui, à l’école. Je vois tellement de gentillesse et de générosité en toi, si souvent ! La semaine dernière, tu t’es levé du canapé pendant que tu regardais la télévision et tu as aidé ta grand-mère à monter les escaliers et à porter ses paquets. Cela m’a touché, j’étais fier que tu aies remarqué à quel point elle avait besoin d’un coup de main. Tu t’es proposé volontairement. Ta gentillesse est une belle qualité en toi. Y a-t-il une raison pour laquelle tu ne l’utilises pas avec ce nouvel élève ?

 

• Je ne comprends pas ce qui t’a décidé à abandonner ton équipe après avoir perdu le match. Cela ne te ressemble pas. Que se serait-il passé si tu avais sollicité un peu tes forces et notamment ton discernement, ton esprit d’équipe ou ton sens de l’équité ?

Lea Waters raconte une anecdote de parents qu’elle a accompagnés lors de ses consultations : alors qu’un garçon avait rendez-vous avec un ami mais qu’il voulait finalement annuler, ce garçon a demandé à sa mère quelle excuse elle préférait. La mère lui a rappelé que d’habitude, il tirait beaucoup de fierté de son authenticité, de son honnêteté et du respect qu’il montre aux autres (sa force : l’intégrité). Elle lui ai dit à quel point elle trouvait ces qualités attachantes et elle l’a encouragé à les utiliser dans cette situation. Il a décidé de ne pas inventer d’excuse mais a choisi de s’appuyer sur son intégrité et de donner suite à son engagement. Il a pu alors rediriger sa créativité : il s’est débrouillé pour qu’un parent l’y dépose en voiture. Le garçon était alors soulagé de ne pas avoir eu à inventer d’excuses pour ne pas y aller.

Relire les comportement des enfants à la lumière des forces

Il est également possible de repenser certains comportements des enfants à la lumière des forces. Par exemple, un enfant qui semble avoir un “toc” de rangement peut avoir en tête de la liste de ses forces « reconnaissance de la beauté et de l’excellence ». Le fait que cet enfant veuille tout ranger ou critique la pagaille peut être envisagé à la lumière de son goût pour la beauté et l’excellence. Le parentage centré sur les forces permet donc de faire preuve d’empathie en raisonnant du point de vue de l’enfant et de savoir comment renforcer le lien (par exemple, en sollicitant son intérêt pour les jolies choses et l’ordre pour décorer la maison à l’occasion d’une fête ou en  en arrangeant tout dans la maison pour que ce soit joli, comme il aime).

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Source : Cultiver ses forces : L’éducation positive au quotidien de Lea Waters (éditions JC Lattes). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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