[Fratrie] La parentalité bienveillante, ce n’est pas éviter les conflits ou supprimer la jalousie entre frères et soeurs.

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L’absence de disputes n’est pas forcément une garantie de bonne entente dans une fratrie ou de bonne santé mentale des enfants : ne pas oser s’affirmer, ne pas oser défendre ses limites, c’est se taire et se nier soi-même. Un enfant qui ravale sa colère et serre les dents souffre et peut nourrir du ressentiment qui se traduira en reproches ou en rupture familiale dès que l’âge permettra de prendre son autonomie.

Consolider les liens familiaux par le jeu

On peut consolider les liens dans la fratrie par les jeux et le rire. Dans leur livre Le cerveau de votre enfant, Daniel Siegel et Tina Payne expliquent que des études récentes prouvent que l’entente future entre les frères et soeurs dépend de leur degré d’amusement pendant l’enfance.

Peu importe que les conflits soient fréquents, du moment qu’ils sont compensés par le jeu et le rire. Le vrai danger apparaît quand les frères et soeurs s’ignorent. Ils subissent moins de frictions, mais risquent de nouer des relations distantes et froides une fois adultes. – Daniel Siegel et Tina Payne

Ainsi, des activités ludiques ensemble (dessiner un monstre géant à la craie, monter un spectacle, préparer une surprise ensemble, jouer à des jeux de société, cuisiner, se liguer pour pourchasser les parents avec des coussins…) consolident les liens dans les fratries.

Toutes les activités en famille sur le principe de l’amusement augmentent le plaisir d’être en famille et montrent aux enfants que les rapports humains sont gratifiants et épanouissants.

Daniel Siegel et Tina Payne proposent plusieurs idées de jeux :

  • après le dîner, crier : “Toute le monde débarrasse son assiette, va chercher une couverture, puis on se retrouver dans le salon. Surprise-partie ce soir !”
  • improviser : un des membres de la famille commence une histoire, et au bout d’une phrase, la personne suivante prend le relais puis la troisième et ainsi de suite…

Eviter la violence entre frères et soeurs 

Il est possible d’adopter une approche basée sur le jeu pour éviter les conflits violents entre frères et soeurs. L’idée n’est pas d’éviter tout désaccord mais d’apprendre à résister au recours à la violence (insultes, coups). Il y a une part de positif dans les conflits car ils offrent l’opportunité d’observer les enfants au plus près de leur réalité : c’est dans la colère et les disputes qu’ils se montrent sans barrière. Le parents peuvent alors voir ce qui touche vraiment les enfants, les déclencheurs des disputes.

L’usage de jeux d’absurdité se révèle spécialement efficace quand des frères et soeurs commencent à se disputer : le parent va en quelque sorte “chiper” le comportement des enfants, c’est-à-dire faire comme eux et les rejoindre dans leurs disputes. L’idée est toujours d’encourager le rire, en respectant l’intégrité des enfants. Il est donc primordial de s’assurer que les enfants ne se sentent ni taquinés ni tournés en ridicule.

Ainsi, face à des enfants qui se chamaillent en se donnant des coups, un parent peut intervenir en se glissant entre les enfants et en disant, d’un air enjoué : “Ben alors, vous faites une bataille de pieds et vous ne m’avez pas invité ! Je veux jouer avec vous, moi !”

Trouver un signal commun pour éviter les dérapages violents

Dans une famille, chacun peut veiller sur les autres pour éviter les dérapages. Il est possible de se réunir en famille et se mettre d’accord sur un signal (un mot, un geste, une expression rigolote…). Quand ce signal est prononcé par un des membres de la famille, les autres savent qu’ils doivent reprendre leurs esprits.

Tout est imaginable : un mot loufoque (comme “potato”), une expression inventée (comme “mange colère”) ou encore un rappel du calme (comme “bande de manchots” pour inviter à se faire un câlin qui réchauffe, comme les manchots). Un clin d’œil peut aussi être adressé à celui ou celle qui est sur le point de déraper.

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Refléter les émotions pour apprivoiser la jalousie

Jouer et rire en famille pour consolider les liens ne doit ni éliminer les désaccords ni remplacer l’écoute empathique. En effet, la jalousie et la peur que ressent un enfant est sa réalité : il estime avoir une bonne raison de se sentir ainsi. Il est alors inutile de lui dire que cette jalousie est anormale ou injustifiée. Comme tous les états émotionnels, la jalousie est à prendre comme un signal neutre qui attire l’attention sur des besoins non satisfaits, sur un mal-être qui est à entendre pour ce qu’il est.

L’idée principale est de voir la souffrance de l’enfant qui manifeste de la jalousie derrière ce qui est donné à voir ou à entendre : un enfant qui cherche de l’attention de manière détournée (“bêtise”, agressivité, insolence…) a besoin de relation et de réassurance sur l’amour que lui portent ses parents. Le plus efficace est de reconnaître ce qu’ils vivent intérieurement : “ça doit être difficile pour toi de…”, “tu aurais préféré avoir tes parents pour toi tout seul ?”…

En tant qu’adultes accompagnant les enfants, raisonner en termes de besoins permet d’accompagner efficacement les enfants qui éprouvent de la jalousie : quels sont les besoins non satisfaits qui motivent l’émergence de la jalousie (exemples : besoin d’appartenance à la famille ? besoin de reconnaissance ? besoin d’amour ? besoin d’identité ? besoin de sécurité ? besoin d’utilité ? besoin de soutien ?).

Pour aller plus loin : Quand un aîné est jaloux de son cadet et manifeste sa jalousie par de l’agressivité ou de l’insolence

Reconnaître et accueillir la jalousie sans la juger (“C’est mal d’être jaloux”) apprend aux enfants à vivre avec cet état émotionnel :

  • C’est vrai que c’est difficile de…
  • Tu te sens dur dans ton coeur, ça te fait mal dans le corps comme une grosse contraction ?
  • Tu te sens à la fois triste et en colère parce que… et tu as même peur de…
  • Tu as l’impression que…
  • Tu ressens de la jalousie parce que tu as vu que… et tu penses que…
  • Quand tu ressens de la jalousie, tu as envie de…
  • Tu aurais aimé…

L’envie est toutefois différente de la jalousie : la jalousie nécessite un besoin inassouvi à combler par les parents alors que l’envie peut être écoutée mais pas forcément comblée. L’envie n’est pas à bannir à tout prix pour autant : l’envie est le moteur pour se fixer des objectifs, pour surmonter des difficultés et se donner les moyens d’obtenir ce que l’on souhaite.

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Source : Le cerveau de votre enfant : manuel d’éducation positive pour les parents d’aujourd’hui de Daniel Siegel et Tina Payne Bryson (éditions Les Arènes). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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