5 phrases à ne pas dire à un enfant harcelé (et que dire – et faire – à la place)
Dans leur livre Les blessures de l’école – Harcèlement, chahut, sexting : prévenir et traiter les situations, Jean-Pierre Bellon et Marie Quartier citent quelques phrases que les élèves intimidés ou harcelés par leurs camarades ne supportent pas d’entendre, ainsi que des phrases empathiques qui vont les aider. Les auteurs ne prétendent pas à l’exhaustivité mais proposent ces exemples pour comprendre l’esprit, plus que la lettre, de leur approche pour prévenir les souffrances à l’école.
- Ça va passer, ils ne le font pas exprès, ne fais pas attention.
- -> En effet, ils te maltraitent, c’est intolérable, il ne faut pas qu’on laisse passer ça.
- Tu n’exagères pas un peu ? Tu ne crois pas que tu y es un peu pour quelque chose ?
- -> Je mesure à quel point cela est dur pour toi, du point de vue qui est le tien. Et je comprends que tu essaies par tous les moyens de réagir, même maladroitement.
- À ta place, je ferais…
- -> Je n’aurais pas été capable de mieux réagir à ta place.
- Te laisse pas faire ! (Injonction)
- -> Tu as le droit de te défendre, je sais que c’est dur, mais je suis de ton côté. (Autorisation)
- Arrête de te plaindre !
- -> Je te trouve très courageux.
Jean-Pierre Bellon et Marie Quartier estiment que ces réactions alternatives permettent la construction d’une relation d’alliance entre l’enfant en souffrance et l’adulte. La relation d’alliance repose sur une écoute empathique, respectueuse, qui renforce la confiance en lui-même de l’enfant intimidé et l’aide à sortir de la solitude et de la peur. Ce type de relation vise la mobilisation des ressources de l’élève, dans un soutien bienveillant et efficace qui lui permettra de se libérer du cercle vicieux de la souffrance. Dans l’approche de Bellon et Quartier, la relation d’alliance est initiée par un adulte formé à la méthode de la préoccupation partagée (MPPFR). Dans cette optique, la famille de l’élève a également besoin de bénéficier d’une relation d’alliance, afin de se sentir soutenue et de pouvoir constituer une ressource bienfaisante pour l’enfant. En parallèle, des entretiens avec les intimidateurs sont organisés pour décourager les brimades.
En associant les deux leviers du changement — entretiens avec la cible et entretiens avec les intimidateurs présumés —, la plupart des situations peuvent être dénouées par les personnels qui, constitués en équipes ressources, exercent au sein même des établissements scolaires. – Jean-Pierre Bellon et Marie Quartier
La méthode de la préoccupation partagée (MPPFR) de Jean-Pierre Bellon et Marie Quartier
La méthode de la préoccupation partagée (MPPFR) est un dispositif complet de traitement des situations d’intimidation élaboré par Jean-Pierre Bellon et Marie Quartier et expérimenté dans plusieurs académies françaises ainsi qu’en Suisse romande. Il intègre une intervention auprès de tous les protagonistes impliqués dans une situation de harcèlement :
- les intimidateurs afin de les faire changer de posture.
- l’élève cible afin de l’aider à sortir de sa posture de victime.
Ce modèle d’intervention nécessite la constitution d’une équipe de professionnels spécifiquement formés au traitement des situations d’intimidation. La MPPFR se décompose en quatre phases principales:
1. Une première rencontre avec la cible au cours de laquelle un membre de l’équipe l’assure de l’entier soutien de l’établissement, la rassure sur les éventuels risques de représailles qui seront évités grâce au protocole utilisé et lui demande quels sont les élèves ayant pris part à l’intimidation. Il s’agit au cours de cette première rencontre d’accompagner la victime en lui offrant une relation d’alliance qui la sécurise et restaure sa légitimité comme sa dignité.
2. Une série de rencontres individuelles avec chacun des intimidateurs présumés au cours desquelles un membre de l’équipe adopte une posture très particulière : il n’évoque aucunement les faits, il expose simplement l’inquiétude qui est la sienne pour l’élève cible des brimades (c’est le principe de la préoccupation partagée). Sitôt que l’intimidateur a reconnu que la cible n’allait pas bien, l’intervenant lui demande ce qu’il pourrait lui-même faire pour venir en aide à la cible. Les entretiens sont brefs (pas plus de cinq minutes) et ils ont deux objectifs :
- amener l’intimidateur à partager une préoccupation pour la cible
- rechercher ensuite avec lui quelles suggestions il peut faire pour lui venir en aide.
3. D’autres rencontres avec la cible au cours desquelles on s’enquiert de savoir si les brimades ont cessé. On recherche également avec elle comment elle réagit face au groupe des intimidateurs. Au cours de cette rencontre, le professionnel qui a instauré avec la cible une relation d’alliance vérifie qu’elle a changé de posture envers ses camarades et qu’elle n’a plus peur.
Les étapes de cette rencontre, qui succède aux interventions auprès des intimidateurs, doivent suivre rigoureusement ce schéma:
• Consolidation de la relation d’alliance qui a déjà été installée lors des précédents entretiens;
• Observation de la posture de la cible pour vérifier qu’elle n’est plus dominée par la peur;
• Consolidation. Cette dernière étape consiste essentiellement à anticiper une éventuelle rechute. Consolider revient à s’assurer auprès de l’élève cible que si la situation se renouvelait, il ne le vivrait pas comme un échec personnel, mais solliciterait à nouveau l’aide des adultes qui l’ont accompagné.
4. Des rencontres de suivi au cours desquelles on s’assure auprès de la cible que les brimades ont pris fin et auprès des intimidateurs que leurs suggestions ont bien fonctionné. Ce suivi peut s’étaler sur plusieurs mois, voire sur plusieurs années.
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Source : Les blessures de l’école – Harcèlement, chahut, sexting : prévenir et traiter les situations de Jean-Pierre Bellon et Marie Quartier (ESF éditions). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.
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