Bébés : les principes de la motricité libre
Le Dr Emmi Pickler est une pédiatre hongroise qui en 1946 fut chargée de diriger l’Institut Loczy, une pouponnière où les enfants, âgés de quelques semaines à 3 ans, vivaient 24 heures sur 24, privés momentanément ou définitivement de leur famille.
Pour éviter le risque d’hospitalisme (sorte de dépression profonde des enfants vivant en institution et privés de soins chaleureux) à Locz, Emmi Pickler y mit en place un certain nombre de pratiques qui depuis ont été adoptées par de nombreuses pouponnières et autres lieux d’accueil (crèches, garderies, etc.) :
– chaque groupe de huit enfants était confié à quatre personnes, qui en assumaient totalement la responsabilité et ne changeaient pas, de l’arrivée de l’enfant à Loczy à son départ (alors que partout ailleurs, l’enfant n’avait plus affaire aux mêmes personnes quand il passait des “petits” chez les “moyens” puis chez les “grands”) ;
– un grand effort était fait pour individualiser les enfants, grâce notamment à un travail d’observation permettant de les connaître intimement ;
– une attention particulière était apportée aux périodes de soins (change, bain, habillage, nourrissage), moments d’interaction entre l’adulte et l’enfant ;
– entre ces moments, l’enfant était laissé libre de vaquer dans un espace à sa mesure, aménagé en conséquence.
Dans cette optique, la confiance en soi et la conscience en soi sont soutenues par la motricité libre parce que le petit enfant fait à la fois ce qu’il veut et ce qu’il peut, il sait qui il est et où il est.
L’approche de la motricité libre repose sur plusieurs principes :
- Placer les bébés au sol (Un enfant qui a roulé, rampé, qui s’est retourné a vécu de nombreuses choses au niveau rythmique et corporel).
- Offrir un environnement riche en possibilité d’expériences sensorielles (regarder, toucher, sentir, goûter, entendre) et motrices
- Laisser les enfants jouer librement (sans direction du jeu par l’adulte) avec des objets ouverts (un bâton peut être aussi bien une baguette qu’une épée ou une canne à pêche) et avec la possibilité de se salir, de “patouiller” -> voir l’exemple du jeu heuristique
- Sécuriser l’espace des enfants pour permettre les mouvements et l’exploration ET, en même temps, la sécurité
- Adapter l’environnement au fur et à mesure des progrès
- Inutile d’essayer de précipiter les apprentissages des bébés
- Encourager sans faire à la place
- Respecter les temps de pause et les retours en arrière en termes de compétences (motrices ou autre)
- Faire confiance à l’enfant
- Eviter de comparer les bébés entre eux ou de se référer à des normes trop rigides
Attention toutefois, la motricité libre ne doit pas devenir un fardeau, encore moins un facteur d’épuisement parental. En tant que parent, si une information ou une idée vous parle en matière de parentalité, alors vous pouvez vous poser une question : est-ce que, dans la balance de la parentalité, le ratio charge mentale/ bénéfice est suffisant et penche en faveur d’un changement ? Si non, personne ne doit vous faire culpabiliser de passer votre chemin. Si oui, vous pouvez adopter cette idée… et, à terme, vous donner le droit de l’amender ou de l’abandonner si cela se révèle trop prenant, insatisfaisant. Même si le crédo d’Emmi Pikler est qu’il ne faut pas empêcher un enfant de se mouvoir (par exemple en le laissant attaché dans un transat, en le faisant jouer dans un petit espace clos comme un parc ou en le mettant dans un trotteur) ni le mettre dans une position qu’il ne sait pas encore prendre de lui-même, ces principes ne doivent pas devenir des obligations ou des culpabilisations. Placer un enfant dans un parc le temps de faire le ménage ne fait d’un parent un mauvais parent ou faire dormir un bébé dans un lit à barreaux ne rend pas maltraitant.
Pour aller plus loin sur la motricité libre : L’importance de la motricité libre chez les tout petits