Ralentir, condition de la bientraitance ?
Les méfaits du stress en famille
Dans son livre Découvrir la parentalité positive pour être parent du cœur, Mitsiko Miller nous rappelle que, quand nous sommes stressés, nous oublions de cultiver nos relations les plus chères à notre coeur. Nous sommes nombreux et nombreuses à vivre la pression du monde professionnel qui peut prendre différentes formes (heures supplémentaires imposées, harcèlement moral, peur de la précarité financière, culte de la performance…).
Un parent en état de stress, même en présence des enfants et de son partenaire, n’est pas vraiment présent : “De l’extérieur, les enfants sentent la désertion psychique de leurs parents lorsqu’ils sont trop préoccupés par des soucis professionnels.” Le résultat est inquiétant : les partenaires se désinvestissent peu à peu d’une relation peu entretenue et les enfants, réagissant à l’absence mentale du parent, cherchent à tisser des liens, en devenant exigeants. – Mitsiko Miller
D’ailleurs, on voit bien qu’utiliser le mot “pré-occupé” nous met sur la voie : le préfixe “pré” signifie que le parent est déjà occupé et donc peu ou pas disponible pour s’occuper des enfants.
En parallèle, les enfants sont guidés par leur recherche d’attachement. La nature humaine est ainsi faite que les petits humains ont un besoin vital et irrépressible de présence, de contact, de tendresse et d’interaction. Ainsi, deux réalités opposées se rencontrent et se confrontent : des parents stressés font face à des enfants “en carence affective qui réclament de la présence, du calme et de la tendresse à coups de crises et d’agitation”.
Cette réalité est encore accentuée par le fait que de plus en plus d’enfant vivent eux-mêmes une vie stressante en passant beaucoup de temps en collectivité et en menant de nombreuses activités extrascolaires qui les privent de temps libre déjà bien entamé par la quantité de devoirs à faire pour l’école. Mitsiko Miller rappelle que les enfants stressés vont avoir tendance à relâcher leur tension par des cris, des crises et peut-être parfois des coups. Le problème devient évident : il y a fort risque d’escalade vers la violence car le stress des enfants rencontre celui des parents.
Le parent outré et déjà à bout de nerfs interprète ces gestes comme de l’opposition. S’ensuit alors une lutte de pouvoir qui finit très souvent par une punition hors de proportion de la part du parent excédé. Les défis s’additionnent pour un parent et un enfant déjà exténués. – Mitsiko Miller
L’influence de la culture dominante
Même des parents au foyer peuvent vivre ce type de situation car les valeurs dominantes de notre culture insiste sur la performance et l’organisation sociale est peu propice au soutien des parents isolés. Mitsiko Miller souligne que la solitude est un fléau de notre temps. Même en couple, il peut arriver que le ou la partenaire ne devienne plus qu’un “colocataire” parce que les échanges de coeur à coeur et les occasions de se manifester de l’affection se réduisent à peau de chagrin. Pourtant, le lien social est fondamental pour les humains : à tout âge (dans l’enfance mais aussi à l’adolescence et à l’âge adulte), nous avons besoin de regards tendres, de toucher, d’une présence aimante, des gestes chaleureux.
C’est la raison pour laquelle Mitsiko Miller (à la suite de tant d’autres auteurs) nous invite à repenser la qualité de nos relations à la lumière du temps : ralentir pour mieux vivre, prioriser le temps libre, des moments pour rêvasser et passer du temps non productif, sans visée de performance ou de représentation (ex : post sur les réseaux sociaux) en famille.
Ralentir pour évoluer, apprendre et prendre le temps de l’introspection
Ralentir permet d’accorder du temps à l’introspection et d’adopter une vision plus large des événements. Les comportements des enfants peuvent être envisagés comme des signaux, des alertes et non plus comme des affronts ou des dysfonctionnements à punir. Sans prise de recul, il nous est très difficile de comprendre la source des difficultés (ex : recherche de relation) au-delà des symptômes (ex : rébellion). Ralentir, c’est aussi savoir que les apprentissages prennent du temps (les apprentissages des enfants comme ceux des parents !). Nous pouvons nous considérer nous-mêmes comme des “parents apprenants”.
Ralentir, passer plus de temps en famille est bien plus facile à dire qu’à faire car les obstacles sont nombreux, ne serait-ce que financier. Chaque famille peut trouver ses ajustements au quotidien en plus d’un changement d’état d’esprit :
- l’un ou les deux parents passent à temps partiel ou changent de travail
- un déménagement pour se rapprocher du lieu de travail et limiter le temps passé dans les transports
- diminuer le nombre d’activités des enfants
- créer une communauté de parents voisins afin d’organiser un tour de rôle pour aller chercher les enfants à l’école ou à leurs activités
- déléguer/ simplifier certaines tâches domestiques (aide ménagère, courses au drive…)
- réorganiser la répartition des tâches pour que chaque membre de la famille fasse sa part
- désencombrer la maison pour passer moins de temps à ranger et faire le ménage…
Pour évoluer, il est important de ralentir : ralentir nous permet de sortir du mode stress; ralentir nous permet même de prendre le temps d’observer nos incohérences et nos angles morts avec détachement; ralentir permet de faire de l’introspection. Cette introspection est primordiale pour enrichir nos relations. – Mitsiko Miller
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Source : Découvrir la parentalité positive pour être parent du cœur de Mitsiko Miller (éditions Le Courrier du Livre ). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.
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