Une question clé pour les apprentissages et la confiance en soi des enfants
Dans son livre Aider l’enfant en difficulté scolaire, Jeanne Siaud-Facchin propose une question clé à poser aux enfants : Et toi, qu’est-ce que tu en penses ?
Cette simple question est vecteur de plusieurs bénéfices quel que soit le sujet abordé (interprétation d’une œuvre d’art, compte rendu d’un film, solution à un problème mathématiques, saveur d’un plat, orthographe d’un mot…) :
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la possibilité pour l’enfant de confronter sa pensée à la réalité
Une pensée qui ne se confronte pas à l’extérieur, à la pensée des autres reste creuse. C’est en exprimant ce qu’il pense que l’enfant se construit car il va éprouver en quoi sa façon de voir le monde est adaptée, pareille que les autres ou encore différente de son entourage.
En cela, il pourra évoluer et réorganiser en interne sa pensée.
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la prise de conscience de ce qu’il sait et de comment il le sait
En posant la question “et toi, qu’est-ce que tu en penses ?“, les adultes créent un espace de pensée pour les enfants. Aucune réponse n’est suggérée, aucun “prêt-à-penser” n’est imposé, les enfants sont réellement invités à réfléchir.
L’adulte ne doit pas réfléchir à la place de l’enfant (ce serait le meilleur moyen de l’en empêcher). Le rôle de l’adulte serait plutôt d’aider l’enfant à préciser sa pensée, à l’enrichir, et non pas de lui apporter la “parole juste”. Cela peut passer par l’exemple : quand l’adulte parle avec l’enfant, il justifiera ses opinions et demandera à l’enfant de justifier les siennes.
Je me souviens d’une promenade que nous avons faite avec ma fille au cours de laquelle nous sommes tombées sur un mur recouvert de mousse. Elle m’a alors demandé ce que c’était. Plutôt que lui donner la réponse directement, je lui ai répondu : “et toi, qu’est-ce que tu en penses ?” Elle s’est alors approchée du mur, elle a touché la mousse, l’a arrachée pour l’effriter, l’a sentie et a fini par me dire : “je pense que c’est de la mousse !”. Je lui ai demandé comment elle le savait et elle m’a répondu que ça avait la couleur et l’odeur de la mousse et que ça avait des racines comme les fleurs. Les enfants sont pleins de ressources :-).
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la mesure de ce qui lui reste à apprendre et à découvrir
Quand l’enfant est encouragé à s’exprimer et que sa contribution est valorisée, il aura de plus en plus de plaisir à penser et aura envie d’acquérir de plus en plus de connaissances pour enrichir sa pensée.
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le renforcement de sa confiance en soi
Quand on reconnaît la pensée de l’enfant comme une pensée acceptable et tout autant valable que les autres (“ainsi, c’est ce que toi tu penses“), l’enfant est conforté dans son sentiment d’être capable de penser.
Je le fais souvent avec ma fille, même quand nous ne sommes pas d’accord (par exemple sur l’interprétation d’un dessin ou sur la suite d’une histoire) :
“ah oui ? toi tu penses que c’est comme cela, moi je pense que c’est plutôt comme ceci.“
Parfois, je l’incite même à trouver une “troisième voie” : “qu’est-ce qu’on pourrait trouver comme autre idée ?”
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la satisfaction de ses besoins d’importance et d’utilité
L’enfant a besoin de sentir important (c’est-à-dire qu’il a une place dans sa famille, qu’il a le droit de s’exprimer et que cette expression compte) et de se sentir utile (sentir que sa contribution personnelle est attendue et remarquée).
Demander à un enfant “Et toi, qu’est-ce que tu en penses ?” lui prouve que ce qu’il dit a de la valeur.
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le développement de son sens critique et de l’implication
Quand on dialogue avec l’enfant, on peut l’inciter à ne pas clore trop rapidement une idée et apporter des nuances à ses propos pour le faire réfléchir avec finesse.
On peut aussi l’inciter à la réflexion avec des questions commençant par “à ton avis… ?” : à ton avis, pourquoi/ comment/ quand/ qui… ?
Un pré requis pour la confiance en soi des enfants : des adultes accueillants et bienveillants
La condition pour que cette simple question “et toi, qu’est-ce que tu en penses ?” permette à l’enfant d’éprouver sa pensée et stimule son envie d’apprendre est que les adultes soient prêts à accueillir la parole de l’enfant sans jugement. L’enfant peut avoir des pensées différentes des nôtres, elles sont tout autant à respecter et à accueillir que celles d’un adulte.
Jeanne Siaud-Facchin écrit :
Si un enfant est systématiquement critiqué par rapport à sa façon de penser, que l’on se moque de lui parce que “c’est ridicule ! c’est idiot ! c’est bébé !”ou même simplement parce qu’on ne l’écoute pas vraiment, alors il renoncera à penser et se situera dans un apprentissages passif face aux apprentissages, quels qu’ils soient.
Alain Sotto et Varinia Oberto ajoutent :
Parler avec son enfant, communiquer avec lui, c’est d’abord l’écouter. On s’ouvre à son point de vue, on prend le temps de le comprendre. On abonde dans son sens, on souligne les aspects positifs dans ce qu’il exprime. On apporte des nuances, on relativise avec respect son point de vue, on aborde la question sous un autre angle.
On ne dit pas qu’il a tort, on lui demande d’expliquer sa pensée, d’argumenter. Dire à l’enfant qu’il se trompe sans prendre le temps de vraiment l’écouter est souvent ressenti par lui comme une marque de désintérêt, voire de mésestime, alors que le pousser à argumenter l’aide à se forger des idées personnelles, l’amène à la réflexion.
La question initiale “Et toi, qu’est-ce que tu en penses ?” pourrait alors être complétée par d’autres questions ouvertes :
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Mes 2 conseils lecture :
Aider l’enfant en difficulté scolaire de Jeanne Siaud-Facchin (éditions Odile Jacob poche)
Donner l’envie d’apprendre: Comment aider vos enfants à réussir à l’école de Alain Sotto et Varinia Oberto (éditions Ixelles)