3 facteurs qui empêchent la résilience face à un traumatisme
Boris Cyrulnik estime qu’il existe 3 facteurs qui empêchent la résilience chez les humains. La résilience est la reprise d’un type de développement après un traumatisme.
1.L’isolement
Si on est seul, on a peu de chance de reprendre un développement. Le soutien (ou le manque de soutien) des proches a un effet déterminant. Le soutien d’une communauté revêt une dimension émotionnelle (accueil des émotions, respect du temps du deuil…) et matérielle (soutien financier, présence…).
Une mauvaise santé, le stress, la fatigue, une mauvaise nutrition sont aussi des éléments importants.
Dans son livre Cultiver l’intelligence relationnelle, Daniel Goleman cite plusieurs études pour illustrer la dimension sociale du stress :
- Une étude de personnes âgées hospitalisées à la suite d’une défaillance cardiaque a montré que l’absence d’un soutien émotionnel multipliait par trois le risque de récidive entraînant une nouvelle hospitalisation.
- Parmi des hommes dont le traitement pour une maladie coronarienne impliquait de passer une angiographie, ceux dont l’entourage ne les soutenait pas avaient environ 40% d’obstructions de plus que ceux qui étaient entourés d’affection.
- Des chercheurs travaillant sur l’ADN de mères s’occupant d’un enfant malade chronique ou handicapé ont montré que plus elles avaient dû subir cette charge sans se sentir soutenues par leur entourage, plus elles vieillissaient au niveau cellulaire (l’âge biologique de ces mères était, en moyenne, de dix ans supérieur à celui d’autres mères du même âge chronologique).
Les problèmes apparaissent quand l’isolement (au même titre qu’une relation toxique) s’installent pendant des années. Des niveaux de stress biologique peuvent alors accélérer le déclenchement d’une maladie ou en aggraver les symptômes.
L’influence d’une relation donnée sur notre santé dépendra de la somme totale de ses effets bénéfiques ou toxiques au cours des mois et des années. Et plus nous sommes fragilisés – par un début de maladie, les suites d’une crise cardiaque, ou par l’âge -, plus l’impact de nos relations sur notre santé sera puissant. – Daniel Goleman
Daniel Goleman affirme que les relations émotionnellement toxiques constituent un facteur de risque pour la santé humaine aussi important que le tabagisme, l’hypertension artérielle ou le cholestérol, l’obésité et l’inactivité physique.
Ainsi, nos relations sociales interviennent de deux façons :
- soit elles amortissent les effets de la maladie ou du traumatisme,
- soit elles intensifient les ravages de l’âge et de la maladie ou du traumatisme,.
2. Le non sens
Le non sens relève de l‘impossibilité et/ou de l’incapacité à faire un récit de ce qui s’est passé.
Certains ont besoin de l’aide d’un thérapeute pour construire ce sens. Nous pouvons aussi le faire seuls en réfléchissant attentivement à notre vie, comment les expériences nous ont façonnés, ce que nous avons perdu et gagné. Cela peut passer par l’écrit ou l’art.
Dans son livre Tous enthousiastes (éditions Horay), Andre Stern rapporte les trois piliers de la salutogenèse. Stern regrette que nous connaissions plus la notion de pathogenèse (la manière dont nous tombons malades) que la salutogenèse (la manière dont nous acquérons ou conservons la santé).
Nous sommes trop souvent encastrés dans une vie qui ne nous appartient pas, dans un travail que nous détestons, dans des relations qui nous dessèchent. Voilà, selon moi, ce qui est réellement dangereux pour notre santé ! – Andre Stern
1.La compréhensibilité de notre monde à nos propres yeux
Ce premier pilier est le contraire de “Je ne comprends rien à ce monde”. La nouveauté et l’imprévisibilité conduisent à penser que tout est inconnu et donc danger. Une source d’angoisse principale est un déficit d’information.
Ne pas comprendre le monde, c’est ne pas pouvoir anticiper et c’est être soumis au stress.
2.La malléabilité de notre monde à nos propres yeux
Ce deuxième pilier est le contraire de “Quoi que je fasse, rien ne change”. Plus on considère avoir de contrôle et du pouvoir personnel, moins nous sommes sujets au stress et plus la santé est préservée.
Pour être en bonne santé mentale, les humains ont besoin de se sentir en sécurité et de pouvoir agir.
3.Le sens dont est chargé notre monde à nos propres yeux
Ce troisième pilier est le contraire de “Rien de tout cela n’a de sens”. Les humains ont un besoin fondamental de sens et de trouver leur place.
3. La honte
La personne elle-même s’empêche de résilier en éprouvant de la honte car elle se met en situation de désocialisation. Pour Boris Cyrulnik, la honte est la preuve de notre condition humain car ce sentiment est la preuve de la prise en compte d’autrui, de son monde mental, de ses représentations verbales, de son regard social . La honte incite à se cacher, à se protéger du regard des autres par peur des représentations mentales que l’autre va faire sur nous tels que les jugements moraux ou les condamnations sociales de tel ou tel comportement.
Les hontes sont des poisons de l’âme et empêchent la reprise d’un processus de développement. Une personne agressée va par exemple avoir une représentation d’elle même diminuée, amoindrie parce qu’elle a été agressée et va subir une sorte de “double peine” du fait de l’agression et de la honte ressentie alors qu’elle n’est coupable de rien.
On peut sortir de la honte comme on sortirait d’un terrier pour s’exposer à nouveau au regard des autres. Cela demande un travail sur soi pour se renforcer et, souvent, un changement de mentalités dans la société (on peut penser à la honte des Juifs sous le régime nazi ou à la honte des femmes violées encore aujourd’hui du fait de la culpabilisation des victimes qui n’auraient pas dû s’habiller comme ceci ou qui n’auraient pas dû se trouver seules à tel endroit, à tel moment…). L’art peut être d’une grande aide dans ce processus : l’art comme thérapie individuelle et l’art comme outil de dénonciation militante des injustices sociales (cinéma, littérature, musique…).
Pour compléter : Connaître les facteurs qui prédisent si une personne va être traumatisée ou non après un événement difficile est important
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Pour aller plus loin : Mourir de dire (la honte) de Boris Cyrulnik (éditions Odile Jacob Poche).