8 réactions non punitives face aux comportements inappropriés des enfants
Chaque fois qu’un enfant fait un geste ou a un comportement qui nous empêche de satisfaire un de nos besoins (besoin de calme, de silence, de respect, d’ordre…), ce comportement est inacceptable pour nous car il nous cause un problème.
C’est donc à nous qu’appartient le problème.
Dans son livre Éduquer sans punir, Thomas Gordon cite des exemples de problème appartenant aux parents : l’enfant fait du bruit quand le parent est au téléphone, il tape son frère avec des jouets, il joue quand ses parents sont pressés…
Voici 8 réactions non punitives face aux comportements des enfants qui posent problème aux adultes tirées du livre Eduquer sans punir.
1. Découvrir le besoin de l’enfant
Au delà des besoins physiques et physiologiques des enfants (faim, soif, envie de faire pipi, besoin de se dépenser et de bouger, sommeil, chaleur ou froid…), il existe des besoins affectifs forts chez les enfants. Jane Nelsen en voit deux fondamentaux : le besoin d’appartenance (se sentir comme membre actif et qui compte dans la famille) et le besoin d’importance (sentir que la contribution personnelle est souhaitée et utile dans le groupe). Les enfants ont également un fort besoin d’attention et de contact physique, de tendresse et de respect, de jeu et de rire.
Les psychologues pour enfants parlent de la théorie de l’attachement. Lawrence Cohen utilise l’image du réservoir à remplir chaque fois qu’il est vide : les parents sont alors la station d’essence de l’enfant. C’est auprès de cette station que l’enfant revient entre deux sorties dans le monde extérieur : charge aux parents de se montrer attentifs aux tentatives de communication (parfois maladroites) des enfants :-).
Le réservoir peut être vidé par la faim, la fatigue, l’isolement, le stress (suite à une punition ou une dispute à l’école par exemple) ou encore une blessure. Les parents pourront alors remplir le réservoir vide en aimant l’enfant, en lui donnant du contact physique, de la tendresse, en le consolant et le calmant ou encore en jouant avec lui.
Pour ma part, je sais que la plupart des crises de “décharge” de ma fille viennent de l’école (punitions, stress). J’arrive maintenant assez bien à décoder les émotions de ma fille par des questions ou de l’écoute active : “J’ai l’impression que ta journée s’est mal passée. Tu veux m’en parler ? / Que s’est-il passé ?/ Tu t’es fait punir par la maîtresse ?“. Dans ces cas là, elle a besoin de se “recharger en amour” et le gros câlin est toujours la meilleure option.
En essayant de découvrir ce besoin, au lieu de punir l’enfant pour sa “mauvaise conduite”, les parents peuvent habituellement trouver la cause du comportement inacceptable ou fournir à l’enfant ce dont il a besoin et qu’il ne peut se procurer lui-même. – Thomas Gordon
2. Faire un échange
Il s’agit là de substituer au comportement que nous considérons comme inacceptable un comportement que nous considérons comme acceptable.
Par exemple, quand un enfant lance des objets défendus, proposer une séance de lancer de doudous : l’enfant les lance, le parent les rattrape et les lui relance. Chez nous, c’est un singe en peluche avec une longue queue qu’on s’amuse à faire tournoyer en l’air avant de lancer.
>>> 6 autres manières de canaliser l’agressivité des enfants par le jeu ici.
3. Modifier l’environnement
Il est plus facile et efficace de changer l’environnement que l’enfant. Un enfant qui s’ennuie, qui est sur stimulé (par exemple avant d’aller se coucher), qui est mis en situation d’échec ou découragé par un environnement inadapté (chaises trop hautes, jouets inaccessibles en autonomie…) ou alors qui a trop peu d’espace pour jouer/ se dépenser va souvent adopter des comportements inacceptables.
Parents et enseignants peuvent se simplifier la vie en mettant les objets que les enfants utilisent à leur portée, en affichant les règles là où les enfants peuvent les voir, en mettant à leur disposition un petit escabeau (ou une tour d’observation), en étiquetant les tiroirs, les meubles de rangement, les classeurs et les armoires. – Thomas Gordon
Lire aussi : 10 manières de préparer l’environnement familial pour des enfants épanouis
4. Émettre un message-Je de confrontation
Thomas Gordon définit le message-Je de confrontation comme un message qui ne véhicule ni reproche ni jugement et exprime ce que l’adulte ressent face à un comportement inacceptable pour faire cesser ce dernier. Les messages-Je incite l’enfant à changer son comportement de lui-même, par égard pour les autres, sans entamer son estime de soi. Voici quelques exemples :
“Quand le volume de la télé est trop fort, je ne peux pas parler avec ta mère/ ton père/ ta soeur…” au lieu de “Cesse ce bruit ou je t’envoie dehors”
“Je crains de ne pas pouvoir profiter des fleurs que j’ai plantées si on les piétine” au lieu de “Tu dois bien savoir qu’il ne faut pas faire cela”
“Quand j’attends aussi longtemps que tu te prépares pour l’école, j’arrive en retard au travail” au lieu de “Tu me rends folle/ fou.”
A l’inverse des messages-Je, les messages-Tu véhiculent une charge de reproches, de jugements, de critique et de contraintes. Le “tu” juge, culpabilise et étiquette : ces types de messages mettent les enfants sur la défensive et les incitent à résister.
“Tu devrais avoir honte”, “Tu manges comme un porc”, “Tout ce que tu as réussi à faire, c’est me donner mal à la tête”
Pour Thomas Gordon, les messages-Je sont responsables et responsabilisants :
- L’adulte qui formule un message-Je assume la responsabilité de ses sentiments et celle d’exprimer ouvertement son besoin à l’enfant
- Les messages-Je laissent à l’enfant la responsabilité de modifier son comportement inacceptable plutôt que de le forcer à le faire.
- Ces messages sont dépourvus du jugement négatif qui caractérise les messages-Tu et amènent l’enfant à aider l’adulte plutôt qu’à se mettre en colère et à se venger.
Pour autant, les messages-Je efficaces ne proposent pas de solution (“je pense que tu devrais faire comme ça”, “à ta place, je ferais comme ci”…). Les enfants sont créatifs pour trouver des solutions par eux-mêmes car ils détestent voir leurs besoins insatisfaits.
5. Émettre un message-Je de prévention
Les messages-Je de prévention sert à amener les enfants à adopter une conduite particulière à l’avenir, de manière à satisfaire le besoin de l’adulte. Ils consistent à informer les enfants de nos besoins en évitant les requêtes agressives, exigeantes ou autoritaires. Voici quelques exemples de messages-Je préventifs :
” J’aimerais que tu me préviennes lorsque tu ne prévois pas de rentrer tout de suite après l’école. J’aurai l’esprit plus tranquille.”
“J’ai besoin de votre aide pour certaines corvées ménagères que j’exécutais seule jusqu’à maintenant.”
Thomas Gordon liste 8 avantages des messages-Je préventifs :
- Nous demeurons conscients de nos sentiments et responsables de nos besoins
- Les autres connaissent nos besoins et nos sentiments à leur égard
- Notre attitude ouverte, directe et franche incite les jeunes à se comporter de même
- Nous réduisons les risques de conflit et de tension résultant de besoins inconscients ou inexprimés
- Nous diminuons l’élément de surprise qui secoue souvent les enfants auxquels on n’avait pas explicité nos besoins et attentes
- Nous prenons l’entière responsabilité de nos projets et préparons la satisfaction de nos besoins futurs
- Nos relations demeurent saines parce qu’elles sont fondées sur l’ouverture, la franchise et la satisfaction mutuelles de nos besoins
- Les enfants se rendent compte que leurs parents sont des êtres humains avec des besoins, des désirs, des attentes, des peurs et parfois des contradictions
6. Ecouter l’enfant pour désamorcer sa réaction émotive
Les réactions face aux messages-Je sont en général positives de la part des enfants, mais il peut arriver que ces messages provoquent des réactions défensives. En effet, les messages-Je mettent les enfants devant la perspective de devoir changer leur comportement habituel et leur font prendre conscience que leur comportement pose problème.
Dans le cas d’une réaction émotive négative, il vaut mieux passer des messages-Je d’affirmation à une posture d’écoute active empathique. L’écoute active permet de comprendre le problème que le message-Je a posé à l’enfant par la reconnaissance de ses sentiments.
Cela peut passer par des réactions du type :
“Je vois, tu te sens…”
“Tu n’as pas envie de…, on dirait”
“ça a l’air de t’embêter/ te mettre en colère”
“J’ai l’impression que…”
Une fois que l’adulte a aidé l’enfant à démêler son propre problème, ils peuvent arriver à un compromis où l’enfant accepte d’aider l’adulte à résoudre le sien.
7. Résoudre le conflit par une solution gagnant-gagnant
Quand les messages-Je et l’écoute active n’ont pas amené l’enfant à modifier son comportement, adultes et enfants ont un problème tous les deux : l’adulte ne peut pas satisfaire son propre besoin à cause du comportement de l’enfant et l’enfant ne peut pas satisfaire son besoin correctement.
Lorsqu’un message-Je ne produit pas de résultat, vous devez envisager de chercher une solution répondant à vos besoins et à ceux de l’enfant. – Thomas Gordon
Notre rôle d’adulte est alors de chercher avec l’enfant une solution qui comprend habituellement les 4 étapes suivantes :
- Définir le problème
“On a un problème : toi, tu veux… et moi, j’ai veux/ toi, tu as besoin de… et moi, j’ai besoin de…”
- Énumérer des solutions
Les solutions sont celles de tous les protagonistes impliqués : celles proposées par les enfants ont la même valeur que celles proposées par les adultes. Aucune ne sera jugée et encore moins mise de côté lors de cette étape.
- Evaluer ces solutions
Chacun donne son avis en toute bienveillance (sans dénigrement), expliquant en quoi et pourquoi cette solution lui convient ou ne lui convient pas. SI les solutions ont été notées sur un papier lors de l’étape précédente, il est possible de rayer les solutions qui ne conviennent pas.
- Choisir ensemble une solution acceptable par tous
Pour aller plus en détail dans le processus de résolution de conflit avec la méthode gagnant-gagnant, je vous invite à consulter cet article : Comment favoriser l’adhésion des enfants aux règles de la vie collective ?
8. Quand nous sommes en colère, prendre le temps d’identifier notre”sentiment premier”
Thomas Gordon écrit :
Je suis persuadé que la colère est quelque chose que nous produisons, que nous fabriquons, après avoir éprouvé un sentiment premier. En tant que sentiment secondaire, la colère se transforme presque toujours en message-Tu de reproche.
Parents et enseignants qui expriment souvent des messages-Tu de colère devraient se regarder dans un miroir et se demander : “Qu’est-ce qui se passe ? Quels sont mes besoins frustrés par le comportement de l’enfant ? Quels sont les sentiments premiers que je n’aime pas ?”
Ces sentiments premiers peuvent être la peur, la déception, l’embarras, la honte, l’anxiété. J’en parle dans cet article : La colère dans la relation parents-enfants.
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Source : Éduquer sans punir, apprendre l’auto discipline aux enfants de Thomas Gordon (éditions Marabout Poche). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.
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