Quand un enfant subit des moqueries, lui dire de faire comme s’il n’entendait pas est inefficace
Dans son livre Harcèlement à l’école : lui apprendre à se défendre, Marie Quartier (diplômée en thérapie brève systémique et stratégique) rappelle qu’il est inefficace de dire à un enfant victime de moquerie de faire comme s’il n’entendait pas.
Marie Quartier écrit que, face à la bêtise et à la méchanceté des attaques que subit un enfant, nous aimerions (en tant que parents) qu’il soit capable de ne pas entendre, de rester insensible et de ne pas être affecté par ces attaques. Pourtant, si c’était le cas, cet enfant ne serait plus harcelé.
Dire à un enfant de faire comme s’il n’entendait pas pose plusieurs problèmes :
- il est placé devant une difficulté supplémentaire : non seulement il souffre des ces moqueries mais il doit aussi cacher ses émotions;
- les enfants qui le maltraitent savent déceler la souffrance de leur victime, même si elle cherche à la masquer. Le harcèlement ne s’arrêtera donc pas;
- l’enfant à qui on dit de faire comme s’il n’entendait rien reçoit le message que la situation n’est pas grave et risque de ne plus en parler du tout à des personnes susceptibles de l’aider même si la situation s’envenime gravement.
Comment aider un enfant ou un adolescent en souffrance à s’exprimer ?
Parler est difficile pour les enfants
Il est parfois difficile pour un enfant de raconter les maltraitances ou le harcèlement qu’il subit. De nombreuses raisons peuvent expliquer cet état de fait :
- l’enfant a peur d’inquiéter ses parents,
- il a honte d’être victime (la honte de l’enfant lui donne l’impression que ce qu’il vit est inavouable),
- il craint que ses parents réagissent de manière inadaptée ou disproportionnée (ex : aller voir les parents de l’autre enfant, en parler au directeur de l’école sans demander l’avis de l’enfant avant…),
- il a peur de représailles si le harceleur apprend qu’il a parlé
En tant que parents, nous pouvons être alertés par quelques signaux (baisse des notes, vol, maux de tête ou de ventre, excuses pour ne plus aller à l’école…). On voit bien en général que “quelque ne va pas”, qu’il y a un “truc qui cloche”. Cette étape du repérage des symptômes peut être difficile parce que les enfants se révèlent habiles à les masquer, à les garder pour soi, du fait de leur peur et de leur honte. De plus, ces symptômes de la souffrance psychique sont très variés. En cas de doutes, consulter un spécialiste, d’abord sans l’enfant, permet d’avoir un avis sur la question et d’être aidé dans la communication avec l’enfant.
Communiquer avec l’enfant/ ado en souffrance
Quand nous sommes convaincus qu’il y a matière à s’inquiéter, nous pouvons tendre une perche à l’enfant et formuler auprès de lui des hypothèses, sans se montrer trop intrusifs.
Il est important que l’enfant/ ado soit convaincu qu’il n’a rien à craindre, qu’il peut faire confiance à ses parents (qui respecteront ses émotions et ses choix) et qu’il n’est pas bête. Dans ce type de situation, il est primordial de ne rien faire sans l’accord de l’enfant qui confie son problème.
Nous pouvons dire que nous croyons en lui, en ses compétences relationnelles et en sa capacité d’analyse de la situation.
Nous pouvons lui proposer de l’aide (sans l’imposer) : face aux comportements lâches et bas, on est plus fort quand on réfléchit à plusieurs à la riposte. Nous pouvons dire à l’enfant que nous avons quelques idées à lui proposer ou qu’il peut aller consulter un spécialiste, mais que la décision finale de la stratégie à adopter lui reviendra toujours.
Ne pas imposer des solutions ou stratégies
Marie Quartier insiste sur l’importance de ne pas chercher à imposer des solutions qui correspondent à notre mode de pensée mais pas au sien.
Face aux souffrances que traverse votre enfant, sachez rester dans une posture de disponibilité et contentez-vous de proposer, sans insister. C’est à lui de décider, puis d’assumer les conséquences de ses choix. Cela demande un immense courage au parent, qui a envie de sortir son enfant de sa souffrance. Ainsi, vous pouvez lui dire : « Je considère que tu es le mieux placé pour savoir ce qui est bon pour toi. J’ai quelques idées à te proposer, mais c’est à toi d’en décider. Je suis là uniquement pour te soutenir si tu le souhaites. » – Marie Quartier
Comment communiquer avec l’école/ l’établissement ?
Toujours demander l’avis de l’enfant/ adolescent victime avant de passer à l’action
Marie Quartier recommande de toujours demander à l’enfant s’il souhaite que nous en parlions avec les responsables scolaires.
- Si oui, qu’est-ce que l’enfant attend précisément comme solution ?
Consulter l’enfant et réfléchir avec lui est essentiel, pour qu’il reste acteur de la solution : non seulement il va se rendre compte qu’il est capable de penser les choses concrètement mais il va aussi renoncer à l’espoir de la « solution miracle » en confrontant ses idées avec les nôtres.
Par ailleurs, l’enfant doit aussi décider à qui nous parlerons : il sait mieux que nous quels adultes pourront le comprendre.
- S’il non, que craint-il ?
Connaître ses craintes nous permettra de lui proposer une solution qui lui convienne et d’éviter d’aggraver sa situation.
Confiance plutôt que reproches
Une fois que le rendez-vous est pris pour aborder le problème avec l’établissement, mieux vaut ne pas aborder le problème en formulant des reproches aux personnels de l’institution. Il sera plus efficace de témoigner de la confiance et de leur demander aussi leur analyse.
Si c’est le cas, il est recommandé de leur faire part des éventuelles craintes de l’enfant quant aux conséquences d’une action de leur part.
S’il l’enfant semble courir un danger, la priorité est évidemment de l’extraire de la situation qui le détruit (cela peut être une question de vie ou de mort…).
Pourtant, Marie Quartier estime qu’ensuite, il faudra lui permettre de reconstruire sa confiance en lui. L’aide d’un thérapeute est alors fortement recommandée.
Le site de Marie Quartier peut être une ressource utile : probleme-souffrance-ecole.fr
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Source : Harcèlement à l’école : lui apprendre à se défendre de Marie Quartier (éditions Eyrolles). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.
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Crédit photo : pressfoto