3 beaux albums pour aborder le décès avec les enfants (parent, ami, animal de compagnie)
Je vous propose une sélection de 3 beaux albums illustrés pour aborder la thématique du décès et du deuil avec les enfants. Le premier album aborde un thème fort : le décès de sa maman du point de vue d’un jeune enfant. Dans le deuxième album, on suit l’histoire de la jeune Annabelle et de son petit amoureux Simon, qui succombe après une leucémie. Le troisième album met en scène Evan, un renard dont le meilleur ami est un chien : quand ce dernier meurt, le goût de vivre d’Evan disparaît.
La croûte : un long album pour aborder le décès d’un parent (7 ans et +)
Cet album est très poignant car il aborde un thème fort : le décès de sa maman du point de vue d’un jeune enfant. On suit au fil des pages les émotions qui traversent le petit garçon après l’annonce du décès de sa mère suite à une longue maladie.
Il est d’abord en colère contre elle car elle l’a abandonné; il éprouve aussi de la la tristesse de voir que rien ne sera plus jamais comme avant; il hésite face à son père qui est lui aussi submergé par le chagrin; il a peur d’oublier sa mère (sa voix, son odeur, ses habitudes…).
Cet album est assez long (30 pages) et ce format permet de développer les émotions et les pensées de l’enfant endeuillé :
- la colère contre la maman (“elle n’avait qu’à pas faire d’enfant si c’était pour partir”)
- faire comme si l’annonce du décès était irréelle (“j’ai fait comme si je n’avais pas compris”)
- la compréhension de la réalité qui arrive (“je sais très bien que mourir, ça veut dire qu’on ne vivra plus jamais”)
- la tristesse à l’évocation des habitudes prises avec sa mère (“comment il va faire papa pour me préparer mon petit pain coupé en deux avec le miel étalé en zigzag ?”)
- l’incompréhension face à un père lui-même endeuillé qui pleure le décès de sa femme (“je n’aime pas trop voir papa pleurer”)
- des rituels et superstitions créés comme pour faire revivre la mère et s’assurer de ne jamais l’oublier (“j’essaie de ne pas oublier l’odeur de maman mais elle s’en va, je ferme toutes les fenêtres pour ne pas qu’elle s’échappe”)
- l’explosion de larmes qui coulent sans s’arrêter pour une broutille qui paraît anodine aux yeux des adultes mais pas à ceux du jeune garçon
- la douce intervention de la grand-mère qui rappelle à l’enfant que sa mère est au creux de son coeur et qu’elle n’en partira jamais.
Le nom de l’album “La croûte” fait référence à une habitude prise par le petit garçon : après s’être blessé en tombant, il a entendu dans sa tête la voix de sa mère qui le réconfortait. Et cela lui a fait du bien. Il s’est alors mis à gratter la croûte pour se faire saigner et entendre à nouveau la voix de sa mère.
Avec le temps, de nouvelles habitudes se mettent en place au sein du duo père/fils et l’enfant se rend compte qu’il peut laisser tomber sa croûte. La cicatrice de la blessure fait écho à la cicatrice du cœur du garçon comme dernière étape du deuil : l’acceptation. L’acceptation
c’est être capable de se souvenir et de se réorganiser. L’acceptation est un lent processus, pas un point final.Cet album est touchant tant sur la forme que sur le fond et ne fait pas l’impasse sur les difficultés rencontrées par les enfants confrontés à un décès (et en particulier celui d’un parent).
……………………………….
La croûte de Charlotte Moundlic (éditions Père Castor) est disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.
Commander La croûte sur Amazon, sur Decitre, sur Cultura ou sur la Fnac
Le Cimetière des mots doux : un splendide album pour aborder le décès d’un ami enfant (enfants de 5 ans et +)
Cet album est splendide tant sur le fond que sur la forme malgré la gravité du thème abordé. Agnès Ledig a le don de trouver les mots justes pour traiter des sujets graves. Ses personnages sont attachants et nous invitent à les rejoindre dans un univers tour à tour joyeux et empli de tristesse, entre instants de bonheur intense et de douleur insupportable.
On suit dans ce livre l’histoire d’Annabelle et son amoureux Simon, atteint d’une leucémie, à l’école, à la maison, à l’hôpital, au cimetière, dans la forêt. Leur histoire s’inscrit dans un quotidien familier aux enfants.
Agnès Ledig a écrit ce livre pour offrir aux enfants concernés par la mort d’un proche un outil concret pour vivre le deuil. Les mots doux représentent un geste symbolique : c’est d’abord Simon qui offre des mots doux à son amoureuses puis c’est Annabelle qui lui écrit des mots doux pour le réconforter et avoir l’impression qu’ils sont ensemble malgré la maladie.
Les émotions et sentiments de la petite fille sont décrits avec leur juste intensité : oui, les enfants peuvent se sentir abattus; oui, les enfants sont capables d’aimer intensément: oui, c’est important de reconnaître et accueillir la douleur des enfants; oui, les enfants éprouvent un sentiment de manque pendant des années. Annabelle est incitée à pleurer par le grand frère de Thomas qui lui dit : “Quand le chagrin est trop fort, il faut le jeter dehors. Les larmes sont là pour ça.”.
La dernière illustration nous montre qu’Annabelle pense encore à son amoureux alors qu’elle est adulte.
L’histoire est suivie d’un mémo à l’intention des adultes dans lequel Agnès Ledig rappelle que cacher ou taire quelque chose ne le fait pas disparaître. Ce type d’histoire, toute en douceur et poésie, permet aux enfants (et aux adultes) d’expérimenter à distance le décès d’une personne proche et de traverser cette épreuve avec plus de sérénité. Comme souvent, l‘accueil des émotions et la création de rituels (ici, les mots doux qu’Annabelle écrit et offre à Simon, avant et après son décès) sont centraux.
…………………………………….
Le Cimetière des mots doux de Agnès Ledig (éditions Albin Michel Jeunesse) est disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.
Commander Le Cimetière des mots doux sur Amazon, sur Decitre, sur Cultura ou sur la Fnac
Le jardin d’Evan : un album pour aborder le décès d’un animal de compagnie
Cet album est une magnifique allégorie du cycle de la vie . On y suit Evan, un renard dont le meilleur ami est un chien. Evan et son chien sont inséparables et font tout ensemble. Ce qu’ils aiment par dessus tout est de s’occuper du jardin luxuriant. Un jour pourtant, le chien d’Evan meurt et le goût de vivre d’Evan disparaît. Il est tellement triste qu’il saccage son jardin parce que plus rien n’a de sens sans son fidèle compagnon.
Evan conçoit un nouveau jardin à l’image de ses émotions : un jardin plein de mauvaises herbes piquantes et urticantes, un jardin triste et gris, mal entretenu.
Un jour, la branche d’un plant de citrouille apparaît sous la palissade et Evan décide de la conserver parce qu’il pique et que ses feuilles sont velues. Ce plant de citrouille marque un tournant dans le processus de deuil du renard : au fur et à mesure qu’une belle citrouille bien orange grossit, Evan renaît à la vie au point de participer au concours de la foire annuelle pour y présenter sa citrouille. A cette occasion, il redécouvre les petits bonheurs simples de la vie : revoir ses amis, manger des glaces, faire du manège… et gagner un prix au concours des plus belles citrouilles !
Evan reçoit un peu d’argent et se laisse tenter pour jeter un coup d’oeil dans un carton contenant des petits chiots . Le renard repart alors avec un petit chien… L’image finale nous montre le renard et son nouveau compagnon comme une invitation à penser une nouvelle vie.
J’ai beaucoup aimé ce livre parce qu’on y retrouve les grandes étapes du deuil de manière imagée et accessible aux enfants :
- le déni : l’auteur utilise le mot “impensable” pour désigner le décès du chien
- la colère : cette phase de colère est décrite à travers la destruction du jardin par Evan qui saccage tout et arrache toutes les racines
- la dépression : Evan se replie sur lui-même, ne sort plus et n’éprouve plus qu’une immense tristesse
- l’acceptation : la phase d’acceptation arrive à travers le plant de citrouille qui ouvre de nouvelles perspectives (des émotions nouvelles avec l’envie d’en prendre soin, l’excitation à l’idée de la foire, la capacité à profiter du temps présent en s’amusant et enfin la rencontre finale avec le chiot).
Cet album peut être un médiateur pour les enfants qui connaissent un deuil (en particulier d’un animal de compagnie). L’histoire rappelle qu’accepter, ce n’est pas voir la situation sous un angle positif mais que c’est apprendre à vivre avec la perte.
L’histoire d’Evan insiste sur
L’acceptation est un lent processus, pas un point final.………………………………
Le Jardin d’Evan de Brian Lies (éditions Albin Michel jeunesse) est disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.
Commander Le Jardin d’Evan sur Amazon, sur Decitre, sur Cultura ou sur la Fnac