5 manières de faire preuve d’autoempathie (nous relier à nous-mêmes avec bienveillance dans les moments difficiles)
Marshall Rosenberg, psychologue américain et concepteur du processus de Communication Non Violente (CNV), nous invite à tirer partie de nos erreurs plutôt qu’à nous empêtrer dans la haine de nous-même et, par ricochet, des autres. Pour y arriver, Marshall Rosenberg propose plusieurs pistes pour nous relier à nous-mêmes avec bienveillance et faire preuve d’autoempathie dans les moments difficiles.
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1.Identifier nos besoins fondamentaux et nos émotions pour faire preuve d’autoempathie
Apprendre à faire preuve d’autoempathie, c’est apprendre à identifier nos besoins fondamentaux (qui sont communs à tous les humains) et nos émotions (qui émergent en nous pour attirer notre attention sur nos besoins insatisfaits).
Rosenberg insiste sur ces éléments parce que, selon lui, le fait de réaliser des actes par désir d’argent, pour l’approbation des autres, par peur, par honte ou encore par culpabilité nous coûtent beaucoup en termes de joie de vivre et de bien être.
En Communication NonViolente, quelques besoins fondamentaux qui animent tous les êtres humains sont proposés :
- autonomie (choisir nos rêves/ nos buts/ nos valeurs; choisir les stratégies pour atteindre ces rêves/ buts; liberté)
- célébration (célébrer la vie, la réussite, les pertes)
- intégrité (authenticité, créativité, sens, estime de soi)
- interdépendance (acceptation, proximité, considération, contribution, sécurité émotionnelle/, empathie, amour, respect, soutien, confiance, compréhension, utilité…)
- nourriture sur le plan physique (air, aliments, mouvement et exercices physiques, repos, protection, toucher…)
- jeu (amusement, rire, stimulation intellectuelle)
- communion d’esprit (beauté, harmonie, inspiration, ordre, paix)
De même, des listes de sentiments sont proposées pour nous aider à exprimer précisément nos états émotionnels. Voici quelques exemples de ressentis internes quand nos besoins fondamentaux ne sont pas satisfaits :
- à bout
- abasourdi
- abattu
- accablé
- affligé
- agacé
- apeuré
- blessé
- confus
- coupable
- crispé
- débordé
- découragé
- déçu
- de mauvaise humeur
- démoralisé
- dérouté
- désemparé
- déstabilisé
- écoeuré
- effrayé
- en colère
- épuisé
- excédé
- fâché
- fragile
- furieux
- hésitant
- horrifié
- impuissant
- inquiet
- irrité
- jaloux
- mal à l’aise
- méfiant
- nerveux
- perplexe
- pessimiste
- piteux
- résigné
- secoué
- seul
- soupçonneux
- tourmenté
- triste
- vidé
- d’humeur sombre/ morose/ maussade
- sentiment de rancoeur/ de ressentiment/ d’aversion/ d’insécurité
Ces listes peuvent nous aider à faire preuve d’autoempathie en nous fournissant les mots pour verbaliser ce qui est douloureux en nous.
L’évaluation que nous faisons de nous-mêmes, instant par instant, est un domaine important où nous pouvons remplacer la violence par de la compassion. – Marshall Rosenberg
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2.Eviter les “je dois”
Marshall Rosenberg estime que les expressions du type “je dois”, “je devrais”,”il faut que” ou encore “j’aurais dû/ je n’aurais pas dû” nous tirent du côté de la violence et du mal être. Quand nous utilisons ce type d’expressions à propos de nos comportements, nous ne pouvons pas être en lien avec nous-mêmes ni apprendre quoi que ce soit à partir de nos expériences parce que le verbe “devoir” implique que nous n’avons pas le choix. Ces expressions traduisent une coupure d’avec notre élan vital.
Nous ne sommes pas faits pour obéir aux ordres des “je dois” et “il faut”, qu’ils viennent de l’extérieur ou de l’intérieur de nous-mêmes. Et si nous nous plions et nous soumettons à ces exigences, l’énergie que nous y consacrons est dépourvue de toute joie porteuse de vie. – Marshall Rosenberg
En conséquence, Marshall Rosenberg nous invite à traduire nos “je dois” en “je choisis” :
- lister les actes de notre vie que nous ne vivons pas comme un jeu (celles que nous faisons par contrainte plutôt que par joie);
- écrire devant chacun de ces actes “je choisis de”;
- trouver l’intention qu’il y a derrière ce choix en ajoutant aux points de la liste initiale “Je choisis de…” –> “…parce que je veux (de l’argent/ du calme/ la paix/ manger…)”;
- remplacer cette intention première par un besoin fondamental (exemple : besoin de contribuer à ma santé et à celle de ma famille/ besoin de lien social/ besoin d’ordre/ besoin de reconnaissance…);
- rester avec le sentiment que nous faisons ces choses parce que nous choisissons effectivement de les faire en fonction d’un ou plusieurs besoins vitaux listé ci dessus.
Si un acte ne correspond à aucun besoin fondamental mais plutôt à une stratégie (argent, statut social, approbation de l’entourage…), une motivation négative (honte, culpabilité…) ou une contrainte (éviter les problèmes, les sanctions…), il est préférable de voir dans quelle mesure il est possible de changer voire d’abandonner ce choix.
Le fait de remplacer les “je dois” par des “je choisis” représente deux avantages :
- prendre conscience du besoin fondamental que l’acte sert et quelle est la qualité de l’énergie motivant l’acte,
- décider d’effectuer l’acte avec une énergie qui sert la vie (en rapport avec les besoins et les valeurs importantes identifiées).
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3.Raisonner en termes de besoins fondamentaux plutôt que juger et accuser autrui
En Communication Non Violente, quand nous nous jugeons nous-mêmes (“je suis bête/ nul.le/ irrécupérable…”), cela signifie que nous n’agissons pas en harmonie avec nos besoins.
Ainsi, le défi consiste à nous évaluer instant par instant quand nous accomplissons un acte qui éveille en nous des auto critiques et à identifier le sens où nous voulons aller tel que révélé par nos besoins insatisfaits et les valeurs qui nous sont chères. Nous pouvons faire le choix de nous arrêter et de nous demander : “quel est le besoin insatisfait qui s’exprime au travers de ce jugement moral sur moi-même ?”.
Quand nous nous relions à ce ou ces besoins (il peut y avoir plusieurs couches de besoins), nous pouvons être envahis de sentiments ambivalents et douloureux (tels que listés plus haut).
Qu’il s’agisse de tristesse, de frustration, de déception, de peur, de souffrance ou d’autre chose encore, c’est pour une bonne raison que la nature nous a dotés de ces sentiments : ils nous poussent à agir dans le but de satisfaire nos besoins et de respecter nos valeurs. – Marshall Rosenberg
Faire preuve d’autoempathie consiste non seulement à se relier aux émotions et besoins non satisfaits qui naissent d’actes passés regrettés mais également à les accepter pleinement comme tels sans chercher à les nier, les minimiser ou les transformer (“oui, c’est vrai, j’ai peur, et en même temps je suis triste et il y a aussi de la colère; j’aurais aimé pouvoir… et c’est difficile à vivre”). L’autoempathie, c’est accueillir les besoins insatisfaits et les sentiments qui émergent de cette prise de conscience.
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4.Embrasser avec autoempathie toutes les parties de soi-même
Concernant des actes passés que nous regrettons à présent, Marshall Rosenberg parle de deuil et de pardon. Le deuil en CNV consiste à se relier aux émotions et besoins insatisfaits qui émergent de comportements adoptés dans le passé et qui éveillent des regrets dans le présent. Il est possible de donner suite au deuil en nous pardonnant à nous-mêmes.
Le pardon porte sur deux éléments :
- la partie en nous-mêmes qui regrette un acte passé,
- la partie en nous-mêmes qui a accompli cet acte au départ.
La question clé du pardon est la suivante : “Lorsque j’ai fait ce que je regrette maintenant, quels sont les besoins que j’essayais de combler ?”. En répondant à cette question avec authenticité et vulnérabilité, nous pouvons reconnaître avec autoempathie que ce comportement était une stratégie inappropriée pour servir un besoin (cette stratégie ayant échoué à satisfaire le besoin en question).
Nous avons de la compassion pour nous-mêmes lorsque nous sommes capables d’embrasser tous les aspects de nous-mêmes et de reconnaître les besoins et valeurs exprimés par chacun d’entre eux. – Marshall Rosenberg
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5.Prendre son temps
Marshall Rosenberg insiste sur l’importance de prendre son temps. Il estime que, malgré les difficultés que représente cette nouvelle manière d’être présent à soi, si notre intention est de vivre en harmonie avec nos valeurs, alors nous aurons à coeur de nous accorder ce temps de “ré-éducation”.
La pratique est essentielle. Au départ, elle nécessitera de s’arrêter physiquement, de ralentir le débit de la parole, de prendre de vrais temps de pause, de réfléchir posément avant de parler, de prendre le temps de répondre mentalement à des auto questions et de s’occuper de soi avant de communiquer avec autrui.
Si, à chaque fois que nous nous jugeons, nous nous demandons “Quels sont les besoins qui chez moi ne sont pas satisfaits ? Qu’est-ce que je ressens ? Y-a-t-il en moi une partie vulnérable qui a besoin d’empathie ?”, alors nous intégrerons cette manière de penser en termes de besoins comme une nouvelle manière de communiquer au quotidien.
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Source : Les mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs) de Marshall Rosenberg (éditions La Découverte). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.
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