Enfants : quand repas rime avec conflit

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Tous les degrés de refus d’un aliment existent : chaque situation est particulière et l’ objectif est de ne pas faire le « lit » d’ une future anorexie en faisant de la nourriture un territoire de domination, de chantage, de rapport de force. Avant de passer aux solutions, il convient de passer en revue les facteurs qui interviennent dans les conflits autour du repas.

  • L’aspect quotidien et répétitif crée une frustration et même, à force, une appréhension des repas en famille qui se manifeste par de la peur accompagnée d’énervement à la fois de la part des enfants et des parents. C’est d’autant plus le cas quand les deux parents ne sont pas d’accord sur le rapport à la nourriture.

 

  • La dimension personnelle : chaque parent revit à travers ses enfants ce qu’il a vécu lui-même et le comportement de l’enfant peut activer des déclencheurs émotionnels sans relation avec l’intensité de la situation réelle.

Chaque adulte se forge son opinion sur ce qu’il croit avoir vécu (j’étais un enfant sans problème, je terminais bien mon assiette) et ce qui s’est réellement passé (je leur en ai fait voir de toutes les couleurs, je cachais la viande sous mon assiette). Ce déséquilibre assez classique vous incitera à « enjoliver » votre propre passé devant votre enfant, surtout si c  est le premier, lorsqu’il s’agira de le nourrir : « Avec moi, ça va bien se passer, je ne vais pas reproduire les mêmes situations qu’avec mes parents qui m’obligeaient à manger. » Ou peut-être ferez-vous partie de ces parents qui pensent que l’enfant doit terminer son assiette, point barre, et que c’est ainsi – on ne va pas en faire une mauviette. C’est une vision qui mène souvent à des situations de blocage. – Arnault Pfersdorff (pédiatre)

 

  • La dimension socio-culturelle : un parent élevé dans une famille où la nourriture venait à manquer peut ne pas accepter que l’enfant refuse de finir son assiette alors que le parent a tant manqué. De plus, dans certaines cultures, les enfants “bien en chair” sont signes de prospérité économique et de bonne santé.

 

  • L’aspect éducatif : on peut penser qu’il faut forcer les enfants à goûter parce que, sinon, ils se contenteront de manger seulement ce qu’ils aiment et ne diversifieront pas leurs goûts. Le risque de cette attitude est de forcer les enfants, de leur faire du chantage ou de leur promettre des récompenses. De plus, les luttes de pouvoir autour de la nourriture traduisent un rapport rigide à l’autorité et ont plus à voir avec les croyances des parents qu’avec les besoins et stades de développement des enfants. Les conséquences sont de plusieurs natures : l’enfant perd le contact avec sa satiété, la qualité des relations se dégradent, les enfants associent les repas familiaux avec des émotions désagréables et, pour les cas les plus graves, des troubles alimentaires peuvent apparaître. La Diversification Menée par l’Enfant (DME) est une manière d’éduquer le goût des très jeunes enfants. On appelle DME également diversification menée par l’enfant, diversification consciente et diversification autonome; ou en anglais baby led weaning. Cette diversification consiste à ne pas donner des purées ou des compotes, mais à commencer directement avec des morceaux, afin que l’enfant découvre en toute autonomie le plaisir de manger.

De manière sous-jacente, acceptez-vous le fait qu’il ne termine pas ce que vous vous êtes donné du mal à préparer ? Pour aller plus loin, n’êtes-vous pas en train de vous projeter sur « ce que vous estimez être bon pour lui « et non plus sur « ce qui est nécessaire pour lui » ? – Arnaud Pfersdorff

 

7 pistes pour accompagner les enfants qui mangent peu ou déséquilibré

Dans son livre Mon enfant ne mange pas, Arnaud Pfersdorff propose sept pistes pour accompagner les enfants qui ne mangent pas :

  • Instaurer des rituels selon les pratiques et préférences de la famille (ex : préparer tous ensemble le repas, faire sonner une cloche pour signaler le début du repas, un rituel spécial “weekend” avec un repas plus détendu comme une soirée pizza le samedi soir ou un brunch le dimanche midi ou encore un repas avec les doigts le dimanche soir)

 

  • Accompagner progressivement l’enfant dans sa découverte du goût (ex : introduire assez tôt des condiments et épices, présenter les crudités une par une à prendre avec les doigts et à croquer directement, participer à un atelier du goût, faire des dégustations ou associations rigolotes du type sucré/ salé, passer par le côté gratiné et des plats colorés)

 

  • Servir de petites portions et laisser l’enfant se resservir plutôt que forcer à finir une assiette servie en fonction de l’appréciation de l’adulte plutôt qu’en fonction de l’appétit de l’enfant (Arnault Pfersdorff conseille de partir du principe qu’un enfant de 3 à 7 ans ne doit pas manger plus de la moitié, voire du tiers, de ce qu’un adulte en bonne santé ingére et que l’équilibre alimentaire ne se fait pas sur un seul repas)

 

  • Ne pas forcer (il est possible de proposer un aliment sans forcer et d’inviter l’enfant à goûter un plat refusé auparavant parce que ses goûts ont peut-être changé)

 

  • Ne pas faire durer le repas plus d’une heure (sauf si l’enfant a besoin de temps pour manger mais l’idée est de ne pas laisser l’enfant à table pour qu’il termine une assiette devant laquelle il rechigne alors que le reste de la famille en est au dessert ou en train de débarrasser)

 

 

  • Lâcher prise sur les quantités et la nature de ce qui est ingéré au profit de questions centrées sur la santé : mon enfant prend-il du poids, grandit-il et est-il en bonne santé? Son sommeil est-il agité ? Est-il agressif à l’école? Refait-il pipi dans sa culotte dans la journée ?

 

Si les problèmes persistent (avec une incidence sur le poids de l’enfant notamment), il est recommandé de consulter un pédiatre. Les intolérances, les allergies ainsi que les troubles alimentaires pédiatriques existent bel et bien. En cas de doute (peu de prise de poids ou baisse du poids, très faible nombre d’aliments tolérés, problèmes de sommeil…), vous pouvez en parler avec votre médecin ou votre pédiatre qui vous orientera vers des examens complémentaires s’il le juge nécessaire (exemples : allergologues; orthophonistes; neurologues ou neuropsychologues).

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Source : Mon enfant ne mange pas de Arnault Pfersdorff (éditions Hachette). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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