Prendre uniquement ce qui relève de l’intention positive derrière un jeu psychologique pour déjouer la manipulation

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Jeu psychologique et Triangle Dramatique

Les tenants de l’Analyse Transactionnelle ont conçu une approche pour sortir des jeux psychologiques et de la manipulation à partir du fameux triangle dramatique de Stephen Karpman.

Stephen Karpman est le créateur du concept de Triangle Dramatique qui s’inscrit dans le courant de l’Analyse Transactionnelle. Le concept de Triangle Dramatique prend son sens au regard des jeux psychologique tels que décrits par l’Analyse Transactionnelle. Un jeu psychologique part du Déclencheur initial jusqu’au Bénéfice final.

Stephen Karpman a conçu un formule du jeu psychologique : A + PF = R → E → S → BF

où A est l’Accroche, PF est le Point Faible, R est la Réaction, E est l’Escalade, S est le Switch (renversement de rôle) et BF est le Bénéfice Final (les flèches représentant des interactions entraînées par l’interaction précédente).

Selon lui, un Jeu psychologique est lancé quand une personne commence par une Accroche sur le Point Faible d’une autre personne qui est alors “hameçonnée”. Ces deux personnes deviennent des joueurs. Le joueur qui a initié le jeu avec une Accroche obtient une Réaction du deuxième joueur et cette Réaction déclenche une Escalade (émotions, expressions du visage, paroles) et un Switch (renversement de rôle) pour finir sur le Bénéfice Final.

Mon Triangle Dramatique décrit la danse infernale des joueurs. C’est une danse très simple avec seulement 3 pas à apprendre. Chaque pas est un rôle : P (Persécuteur), S (Sauveur) ou V (Victime).  Nous dirons qu’il y a drame si un des joueurs change de rôle, ce qui veut dire qu’il passe d’un des rôles PSV à un autre. – Stephen Karpman

Révéler les aspects positifs du Triangle Dramatique

Stephen Karpman a conçu le Triangle OK pour révéler les aspects positifs du Triangle Dramatique (dans un objectif de compassion et d’amélioration de la qualité des relations). Ce Triangle OK est aussi appelé Triangle Compassionnel et consiste à observer l’intention positive derrière un des trois rôles P (Persécuteur), S (Sauveur) ou V (Victime). 

Pour compléter cette approche, Pierre Agnèse et Jérôme Lefeuvre proposent une technique pour mettre en pratique cette idée dans la vie quotidienne. Le principe en est relativement simple : quand une personne se présente à nous depuis un rôle de P (Persécuteur), S (Sauveur) ou V (Victime), nous allons répondre en valorisant son intention positive (cachée) et ignorer ainsi son invitation au jeu psychologique.

Chaque rôle se voit attribuer une version positive :

  • Persécuteur -> attitude de Permission
    • Derrière le rôle de Persécuteur, on va chercher des Permissions (cela peut passer par le fait de proposer des contrats, rappeler les règles, établir des limites personnelles, énoncer des droits et des devoirs)
  • Sauveur -> attitude de Soutien
    • Derrière le rôle de Sauveur, on va chercher la demande de Soutien
  • Victime -> Vulnérabilité et Volonté
    • Derrière le rôle de Victime, on va chercher la Volonté de l’autre d’éviter de se comporter en victime impuissante (sa recherche de pouvoir, de sens, d’action) et demander à l’autre d’exprimer ses besoins de manière Vulnérable (c’est-à-dire authentique, sans rien cacher, en exprimant les émotions difficiles)

La “méthode de photographe” : apprendre à développer le positif d’un message négatif

Chercher l’intention positive et basculer d’un rôle de manipulateur à une attitude compassionnelle 

Pierre Agnèse et Jérôme Lefeuvre définissent cette approche comme une “méthode de photographe” (partir du négatif et prendre dans ce que l’autre donne uniquement ce qui relève de l’intention positive derrière le Jeu) ou encore comme une “répartie sélective” (sélectionner dans ce que dit l’autre ce qui relève d’une attitude de Permission, de Soutien ou de Vulnérabilité).

La méthode du photographe qui développe le positif d’un message négatif consiste finalement à apprendre à faire la sourde oreille sur la teneur provocante ou désagréable d’un échange. Elle demande une bonne gestion de soi ! – Pierre Agnèse et Jérôme Lefeuvre

Cette approche s’appuie sur une règle édictée par Stephen Karpman : dans toute attaque, il y a toujours 10% d’intention positive, 10% de vérité, 10% de la population qui aurait fait de même (et quand nous sommes à l’origine de l’amorce d’un Jeu psychologique, il y a au moins 10% dans ce que nous disons qui est faux).

Pierre Agnèse et Jérôme Lefeuvre formulent quelques exemples :

  • si une personne endosse un rôle de Persécuteur contre nous, nous pouvons désamorcer le Jeu en le remerciant de mettre les choses au clair avec nous et en énonçant une proposition de contrat (Permission d’avancer ensemble) -> “J’entends que tu n’es pas d’accord/ que tu estimes ma manière de faire inefficace… et je te remercie de me le dire. Je préfèrerais avoir des propositions/ conseils/ invitations/ suggestions plutôt que des critiques/ découragements.”

 

  • si une personne endosse un rôle de Sauveur contre nous, nous pouvons désamorcer le Jeu en le remerciant de son soutien et recadrer l’échange en énonçant clairement ce dont nous avons besoin et ce dont nous n’avons pas besoin -> “Je te remercie de m’alerter sur les dangers/ risques. J’apprécie l’aide que tu me proposes. En l’état actuel des choses, je préfère prendre des risques/ faire par moi-même pour apprendre et m’améliorer en fonction de mes propres erreurs. Si tu avais une suggestion concrète, quelle serait-elle ?”

 

  • si une personne endosse un rôle de Persécuteur contre nous, nous pouvons désamorcer le Jeu en reconnaissant le courage qu’il y a à chercher des solutions quand on est Vulnérable et en offrant du Soutien (=de l’empathie) plutôt que du sauvetage -> “Tu dis que tu vas laisser tomber et c’est vrai que tu n’y arrive pas encore. C’est courageux de montrer ta frustration et d’oser montrer tes doutes. Quand tu essayeras à nouveau, tu pourras me solliciter pour des encouragements et du soutien.”

Une approche utile mais pas magique

Les auteurs rappellent que cette approche n’est pas pour autant magique et qu’elle demande des essais/ erreurs, de l’entraînement dans un temps long. Nous pouvons utiliser cette méthode du photographe avec nous-même (quand nous entrons dans un monologue intérieur où nous endossons un des trois rôles contre nous ou quand nous tendons une amorce de jeu psychologique à un interlocuteur). Nous pouvons nous rendre compte que nous parlons à partir du rôle de Persécuteur, Sauveur ou Victime et décider de basculer vers l’attitude complémentaire correspondante :

  • dans tous les cas, je cherche en moi l’intention positive et je me souviens qu’au moins 10% de ce que je dis est faux
  • je suis en position de Persécuteur : je pose une question à l’autre pour tenter de poser les bases d’un contrat et nous donner la permission de continuer plus sereinement (ex : Pouvons-nous redéfinir ensemble l’objectif que nous poursuivons pour recadrer notre échange ?)
  • je suis en position de Sauveur : je formule mes besoins et je demande à l’autre ce dont il a réellement besoin puis je (me) offre du soutien empathique, une écoute non jugeante dénuée de conseils (ex : Est-ce que tu as besoin de conseil ou seulement d’une oreille attentive ?)
  • je suis en position de Victime : je reconnais qu’il y a un problème et que nous cherchons (maladroitement) une solution puis je montre ma volonté de contribuer à l’émergence de cette solution OK pour chacun d’entre nous.

 

Il est possible de “renverser” les rôles du Triangle et de les transformer en Attitudes positives. Cela nécessite d’être conscient des rôles présents dans un échange pour opérer une reformulation vers l’autre. C’est comme un tour de passe-passe au cours duquel un interlocuteur me tend le poing et je le remercie pour sa force. Si cette méthode ne marche pas à tous les coups, elle vaut cependant qu’on la tente ! Cette technique fonctionne aussi pour soi-même lorsque nous prenons conscience que nous sommes en train d’inviter l’autre à Jouer, nous pouvons basculer en faisant amende honorable et reformulant notre intention positive. – Pierre Agnèse et Jérôme Lefeuvre

 

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Source : Déjouer les pièges de la manipulation et de la mauvaise foi de Pierre Agnèse et Jérôme Lefeuvre (InterEditions). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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