Les tâches ménagères et parentales : un facteur d’épuisement physique et mentale pour les mères en post partum.

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Anna Roy est sage-femme et elle accorde beaucoup d’importance à la santé mentale et physique des jeunes mères. Dans son livre Le post-partum dure 3 ans, elle insiste sur la répartition des tâches ménagères au sein du couple parental. Cette question de la répartition des tâches revêt une importance particulière car, en qualité de sage-femme, Anna Roy a assisté à plusieurs situations d’effondrement physique ou psychique de mères qui pourtant se sentaient capables de tout assumer à la maison. En période de post partum, le nombre de tâches à réaliser est énorme, alors même que la mère peut être fragilisée, physiquement et psychiquement. Aux tâches domestiques et parentales peut s’ajouter l’horizon de la reprise du travail qui va faire basculer le déséquilibre en situation ingérable.

Dans son ouvrage Daronne et féministe, Fabienne Lacoude écrit que les femmes prennent en charge 60 % du travail domestique toutes tâches confondues, mais 72 % du cœur des tâches ( c’est-à-dire le périmètre restreint). C’est l’INSEE qui divise le travail domestique en trois périmètres : le périmètre restreint concerne la cuisine, la vaisselle, le ménage, le rangement, les soins matériels aux enfants et personnes dépendantes, le linge, et la conduite pour accompagner les enfants. On s’aperçoit donc que, plus une tâche est pénible, ennuyante, longue, répétitive, plus elle est prise en charge par les femmes. On lit souvent des hommes se défendre en disant qu’ils prennent en charge l’entretien de la voiture, la tonte de la pelouse ou le bricolage dans la maison, sans se rendre compte que ces tâches ne sont pas quotidiennes et qu’elles sont donc moins chronophage et moins énergivores que les tâches du périmètre restreint.

Les femmes qui ont un ou plusieurs enfants ont du mal à reconnaître le stress engendré par leurs responsabilités de mères. Pourtant, les mères sont trois fois plus touchées par le burnout (épuisement) que les pères, à cause de l’inégale répartition des tâches qui fait peser un lourd poids sur leurs épaules, mais aussi parce qu’elles attendent souvent d’avoir épuisé toutes leurs ressources avant de demander de l’aide.

Or il n’y a rien de naturel à ce que la charge de la tenue du foyer repose (presque) entièrement sur les femmes. Coline Charpentier, spécialiste de la charge mentale maternelle, regrette que les contraintes autour des enfants reposent sur les mères et que ce que les pères font soit vu comme du “bonus”. Quand un père s’occupe des enfants et prend en charge les tâches qui y sont liées, c’est un héros (quand la mère assume exactement les mêmes tâches, c’est normal). Il paraît donc encore utile de redire que les pères “n’aident pas” les mères, ils sont autant parents que les mères.

Le déséquilibre dans la répartition des tâches ménagères n’est pas la faute des femmes, et leur épuisement encore moins. Dire aux femmes qu’elles n’ont qu’à demander à leurs compagnons, c’est leur ajouter une nouvelle couche de charge mentale car elles devraient à nouveau prendre l’initiative de la communication. De plus, c’est faire preuve de condescendance pour les hommes que de les penser incapables de prendre des initiatives domestiques. Pourtant, les hommes ont démontré qu’ils sont tout à fait capables de prendre des initiatives (dans le domaine professionnel, associatif, sportif…) et qu’ils comprennent les codes implicites.

Mieux répartir les tâches ménagères et parentales dans le couple en période de post partum : une mesure nécessaire pour les mères

Selon Anna Roy, il existe deux cas de figure dans la manière d’aborder la répartition des tâches quotidiennes dans le couple parental.

1. La mère reprend le travail dans les mois qui suivent l’accouchement.

L’inégale répartition des tâches, qui était peut-être déjà un sujet avant la naissance du bébé, a eu le temps de se mettre en place durant tout le congé maternité car la jeune mère était à la maison toute la journée. Souvent, dans la tête du père, la mère n’a que ça à faire.

Parce que les femmes sont en congé maternité, elles absorbent naturellement la majorité des tâches. Ces tâches enflent avec l’arrivée du bébé : changer les couches, conduire l’enfant chez le pédiatre, laver le linge souillé par les régurgitations… De manière insidieuse, le co-parent prend l’habitude de ne pas gérer ces tâches. Parfois, il ne les voit pas et donc ne prend pas conscience de l’ampleur de la tâche. Anna Roy remarque que, au moment où la mère reprend à son tour le boulot, et tandis que les tâches sont toujours les mêmes, elle continue de gérer puisque les choses sont organisées ainsi. C’est donc la double peine pour les mères :la fameuse “double journée” puisqu’elles cumulent travail professionnel et travail domestique.

Comme le retour au travail est une période à haut risque, Anna Roy conseille de l’anticiper pour une juste répartition, ce qui signifie que le père va devoir changer les habitudes qu’il a pu prendre pendant le congé maternité. Anna Roy propose une méthode : trois semaines avant la reprise du travail, le couple prévoit un moment au cours duquel la mère liste tout ce qu’elle fait lors d’une journée type. Il s’agit de lister toutes les mini tâches qu’une simple action sous-tend. Par exemple, pour une nuit passée par un bébé chez les grands parents, que faut-il prévoir de A à Z ? Coline Charpentier remarque par exemple que, faire à manger, c’est au minimum 8 actions (allant de faire les courses, avoir un plan de travail propre à mettre la table en passant par mettre les restes au frigo).

Comme premier exercice à faire à deux, décomposez chaque tâche importante de la journée, avec ou sans enfants. Faites-le ensemble. Voyez toutes les actions que cela implique. […] C’est comme cela qu’on commence. On teste, on voit, mais on fait à deux. – Coline Charpentier

Certaines tâches pourront être rayées puisqu’elles vont disparaître grâce au mode de garde. Il restera alors une liste de tâches à exécuter quotidiennement qui incombent autant aux deux parents puisque le lieu de vie familial et l’enfant sont de la responsabilité tant du père que de la mère. Il convient de prendre les tâches une par une et de les attribuer à l’un ou l’autre.  Une fois toutes les actions listées, il est plus facile de les départager, en choisissant ce qui plait le plus ou ce qui est le plus pratique pour l’un ou l’autre des membres du couple. L’idée est que chacun puisse exprimer comment il se sent à l’évocation de cette idée et en quoi cette répartition contribue à l’harmonie du foyer.

Il est possible de faire un essai pendant une durée déterminée (un mois par exemple) pour voir si cette organisation fonctionne, faire le bilan et réajuster si nécessaire. Si le père se braque, se plaint ou fait culpabiliser sa compagne, celle-ci peut lui rappeler qu’aucun privilège ne peut être accordé selon le sexe.

Si votre frigo est plein, si vos habits sont propres, si votre maison est saine et que votre fécondité est maîtrisée, et que vous n’y êtes pour rien, soit vous êtes très riches et vous payez quelqu’un, soit vous avez quelqu’un qui travaille gratuitement pour vous. Tous ceux et celles qui habitent la même maison et qui ont décidé de le faire par amour sont responsables de cette maison. – Coline Charpentier (in T’as pensé à… ? : guide d’autodéfense sur la charge mentale – édition Le livre de poche)

2. Le congé maternité dure plus longtemps (notamment via la prise d’un congé parental ou un arrêt maladie)

Dans le cas où le congé maternité est prolongé pour une raison ou une autre, la mère passe le plus clair de son temps avec le bébé (et éventuellement les aînés). Comme elle est physiquement présente pour assurer les tâches du quotidien, elle n’a pas de moment de pause et son identité de femme se fond avec celle de mère et de ménagère.

Il lui faut des moments de respiration et elle doit pouvoir trouver au minimum en trouver le soir et le week-end (des gardes ponctuelles peuvent aussi être mises en place), de la même façon que l’on se repose après une dure journée de labeur ou une semaine à crapahuter partout. ) – Anna Roy

Là encore, Anna Roy conseille de fixer une réunion pour identifier avec le compagnon les tâches qu’il peut prendre en main. La boussole de cette réunion est la notion de temps pour soi de la mère puisque son quotidien n’a rien à voir avec des vacances.

Pour aller plus loin : Les pères “n’aident pas” les mères, ils sont autant parents que les mères.

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Sources :

Le post-partum dure 3 ans de Anna Roy (éditions Larousse). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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T’as pensé à… ? : guide d’autodéfense sur la charge mentale de Coline Charpentier (édition Le livre de poche). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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Daronne & féministe – Grossesse, post-partum, charge mentale… quand la maternité rend féministe ! de Fabienne Lacoude (éditions Solar). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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