Crises, oppositions et colères des jeunes enfants : faire face avec la parentalité positive
Avec les jeunes enfants, il arrive qu’on se retrouve démunis. On a l’impression d’avoir satisfait leurs besoins, de leur avoir accordé suffisamment d’attention, d’avoir rempli leur réservoir d’amour et pourtant, ils sont irritables, grognons, ils s’opposent. Nous avons beau être convaincus que le respect des droits de l’enfant et de sa dignité est non négociable, nous pouvons nous sentir à bout.
Je vous suggère quelques outils de parentalité positive pour faire face.
Prendre quelques instants avant de répondre et ne pas se forcer à répondre immédiatement
Le fait de différer de quelques secondes la réponse aux pleurs, réclamations et oppositions des jeunes enfants nous permet de ne pas répondre sous le coup de l’énervement ou du stress et de reprendre nos esprits. Cette pause que nous nous accordons évite une réponse trop sèche qui risque de déclencher une crise chez l’enfant. Pour autant, cela ne signifie pas laisser pleurer l’enfant volontairement, juste nous accorder un temps d’auto empathie pour respirer.
Les émotions étant contagieuses, si l’enfant perçoit de l’impatience ou de l’agacement chez nous, il y a de fortes chances pour que notre propre colère amplifie celle de l’enfant qui va venir amplifier la nôtre en boomerang etc… dans un cercle vicieux.
Même sans les mots, la manière dont nous nous tenons ou dont nous regardons l’enfant peut déclencher la contagion émotionnelle. Une profonde respiration avec une expiration ample et longue a un effet apaisant. En effet, une expiration lente, longue et profonde est une méthode efficace pour s’apaiser. Lors de l’expiration, l’air est évacué emportant le gaz carbonique issu des échanges au niveau du sang, les poumons reprennent leur état de base, et tout le système nerveux autonome revient au repos, au relâchement, au calme par une action du système nerveux parasympathique. Le système parasympathique est la branche du système nerveux autonome responsable du repos, de la relaxation, de la restauration, de la réparation, de l’économie et de la reconstitution des ressources énergétiques (la digestion par exemple).
Sortir et prendre l’air, si possible au contact de la verdure et en portage physiologique ou dans les bras
Le contact physique déclenche la sécrétion d’ocytocine, hormone de l’amour, qui entraîne une baisse du niveau de cortisol, hormone du stress, dans le sang.
Cet effet apaisant est visible chez l’enfant mais aussi chez le parent (les deux bénéficiant des effets de l’ocytocine).
Garder en tête que les jeunes enfants ne sont ni manipulateurs, ni capricieux mais qu’ils ont des besoins
L’enfant qui pleurniche ou se montre irritable, difficile a peut-être passé une mauvaise journée ou couve quelque chose mais ne sait pas (encore) le dire avec des mots.
La communication accompagnée de signes peut permettre de palier aux frustrations de l’enfant liée à un déficit de langage.
Permettre à l’enfant de dépenser son énergie
Parfois, les enfants ne se dépensent pas assez et sont “sur les nerfs” (notamment chez les petits de maternelle à qui on demande une grande concentration et une réflexion au détriment de leurs besoins de bouger et de se dépenser).
L’enfant a probablement besoin de courir, de sauter, d’escalader, de mettre la tête en bas, de malaxer vivement de la pâte à modeler… de se défouler et décharger les tensions.
Si l’enfant se montre agressif, il est possible de le contenir physiquement (sans le blesser et sans violence) pour le protéger lui-même et les autres.
Passer par le jeu et le rire
Chanter, danser ou prendre une voix amusante a le pouvoir de créer de la complicité et de bâtir un pont plutôt que dresser un mur. Ainsi, chanter pour nous exprimer (“Je ne comprends pas ce que tu veux lalala”) ou danser permet de dédramatiser plutôt que s’énerver.
Se connecter à quelque chose d’agréable
Se connecter à une pensée ou un souvenir agréable (regarder une photo de l’enfant tout bébé, penser à un souvenir agréable ensemble, imaginer une mimique ou une habitude de l’enfant qui nous fait fondre) est générateur d’émotions agréables et a un pouvoir apaisant.
De même, se souvenir que l’enfant est encore petit, qu’il est en train d’apprendre la maîtrise de soi, le langage et qu’il est guidé par son besoin d’attachement nous permet d’adopter une attitude empathique et une pensée plus souple (“mon enfant est en train d’apprendre, il ne sait pas encore dire les choses mais je lui fais confiance pour apprendre et je suis son meilleur modèle, je suis capable de rester calme”).
Proposer des choix
Rechercher le consentement et formuler des demandes plutôt que des ordres permet de nourrir le besoin d’autonomie et de maîtrise de l’enfant. Attention toutefois à cette solution qui consiste à proposer des choix : les enfants peuvent se sentir pris au piège par des faux choix (qui masquent une attente d’obéissance de la part du parent et donc une négation du besoin d’autonomie et d’empathie de l’enfant); les enfants peuvent aussi se sentir submergés par des demandes qu’ils ne sont pas capables de gérer.
Parfois, des consignes claires, bienveillantes, adaptées à l’âge de l’enfant sont plus efficaces que des choix. Une consigne efficace respecte plusieurs critère :
- la consigne est passé dans un contact visuel et physique (pas de consigne par dessus l’épaule ou entre deux portes; sollicitation de plusieurs sens de l’enfant et pas seulement l’ouïe)
- la consigne explicite les attentes (dire “fais attention” n’est pas assez explicite car l’enfant ne sait pas ce qui est attendu; idem pour “calme toi”)
- la consigne est brève et, si elle concerne plusieurs actions, est passée en plusieurs temps (une consigne pour une action, une autre consigne pour l’action suivante etc…)
- la consigne dit ce qui est attendu et est formulée dans un langage affirmatif plutôt que négatif (dire ce qui est interdit ne rend pas clair ce qui est attendu)
Refléter les émotions de l’enfant et reconnaître sa difficulté
Un enfant en crise, qui s’oppose, qui souffre a d’abord besoin que sa souffrance soit reconnue, vue, entendue. Il a besoin de se sentir rejoint avec empathie et compris là où il est avec sa détresse sans que personne cherche à le calmer, le conseiller ou à faire diversion.
Quand l’enfant reçoit de l’empathie et que ses émotions sont reconnues, il se détend réellement, il se sent acceptée avec ce qui le traverse, dans toute sa souffrance et son vécu. Le mot magique ici est : “Oui”.
Ainsi, il est possible de dire au jeune enfant : “Oui, c’est super dur ce que tu vis en ce moment; oui, c’est douloureux et je vois bien que c’est difficile.”
Dès lors, la bulle de tension se dégonfle; peut-être même que l’enfant se mettra à pleurer à chaudes larmes. Ces larmes sont à accueillir, aussi longtemps que l’enfant en a besoin.
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Pour aller plus loin :
Non systématique, colère des enfants et crises d’opposition : les conseils d’Isabelle Filliozat pour parents à bout
Parents : quand on n’en peut plus… que faire pour ne pas craquer ?