6 étapes pour aborder les conflits entre enfants

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Quand les enfants se disputent, se montrent agressifs et potentiellement violents (en mots ou en gestes), nous pouvons intervenir pour les aider à développer des compétences émotionnelles et relationnelles. L’idée est de les outiller afin qu’ils deviennent autonomes et compétents dans la résolution non violente des désaccords et conflits qu’ils rencontreront inévitablement.

Une manière d’aborder les conflits est de reconnaître les émotions des enfants dans un premier temps avant de les engager dans un processus de résolution. Cette manière de faire demande un peu de pratique et du temps avant d’être maîtrisée efficacement… mais, comme pour les enfants, nous pouvons procéder par essais/ erreurs et tâtonnements. A force de mettre en oeuvre ce type d’approches, elles deviendront notre manière habituelle de parler et d’aborder les conflits… ainsi que celles des enfants par effet d’imprégnation.

1.Verbaliser les émotions ressenties 

Les jeunes enfants ne sont pas conscients de ce qu’ils ressentent et des raisons qui les poussent à agir comme ils le font (crier, insulter, casser, taper). Ils ne font que réagir à leurs émotions, comme submergés et contrôlés par elles. Ils ont en quelque sorte besoin d’un “cerveau externe” de secours qui va les aider à s’apaiser et accompagner graduellement la maturation de leur cerveau. En tant qu’adultes, nous pouvons être ce “cerveau externe” en partageant notre calme et en reflétant les émotions de l’enfant.

L’écoute empathique, ce n’est pas prétendre qu’on a parfaitement compris l’autre ou lui faire sentir qu’on sait mieux que lui ce qu’il ressent (ni faire de la lecture de pensée). Il s’agit simplement de rejoindre l’autre dans ses ressentis corporels et émotionnels, dans ses pulsions motrices (envie de pleurer, de taper…). L’écoute empathique est dite active dans le sens où l’on est dans une démarche de recherche, de compréhension, de mise au jour de ce qui se passe à l’intérieur. Cela peut passer par :

  • le silence

Dans un premier temps, face à un enfant (mais aussi un adulte) qui semble avoir besoin de se confier, de pleurer, une présence silencieuse mais réelle peut suffire : hocher la tête, dire “hum” ou “oh, je vois”. L’écoute active se manifeste alors dans la qualité de la présence.

  • la reformulation

Reformuler les émotions et les pensées de l’enfant, c’est paraphraser, redire, refléter comme un miroir. Cette reformulation permet à l’autre de se sentir réellement compris et d’approfondir sa réflexion, sa compréhension de ce qui est en jeu. La reformulation ne peut être efficace que si elle s’appuie sur une empathie sincère, une envie de rejoindre l’enfant, une capacité à sentir intimement ce qu’il ressent.

  • le questionnement

Le questionnement peut passer par des formulations du type :

  • J’ai l’impression que tu as peur/ que tu es en colère, c’est ça ?
  • Ce que tu veux dire, c’est que, quand tu as vu (observation), alors tu as ressenti (émotion) ?
  • Quand tu dis que…, c’est que tu t’es senti humilié/ incomprise ? Ou quelque chose comme ça ?

Le questionnement est particulièrement utile quand une personne émet des reproches ou des critiques et peut s’appuyer sur une description de ce qui semble déclencher les reproches (ex : Quand tu me dis que je suis méchante, tu parles du fait que je t’ai empêché de jouer à la console tout à l’heure ?). Cela permet à l’enfant de clarifier son message et l’amène vers des éléments concrets comme base de recherche de solutions.

2.Accepter les émotions, pas tous les comportements

Une chose utile à garder en tête est que l’enfant a besoin d’exprimer quelque chose : pas de redirection du comportement sans connexion émotionnelle préalable.

La plupart des problèmes disciplinaires comportent deux parties : des émotions de colère et des gestes de colère. Il faut gérer chacune des parties de façon différente. On doit identifier les émotions et s’en occuper; tandis que l’on doit limiter les gestes et les orienter dans une autre direction.

Parfois, la verbalisation des émotions de l’enfant suffit à elle seule à détendre l’atmosphère. En d’autres occasions, l’identification des émotions ne suffit pas et les limites sont nécessaires. Une approche utile est de se concentrer sur l’aide à offrir à l’enfant à la fois en ce qui concerne sa conduite mais aussi ses émotions. On peut alors reconnaître et valider les émotions tout en rappelant les règles : “C’est OK d’être en colère, mais ta colère ne te donne pas le droit de taper.”

3.Explorer les raisons du désaccord et reformuler le désir de l’enfant

Haïm Ginott, précurseur de la parentalité positive, nous rappelle qu’on traite ses enfants avec le respect qu’on attend d’eux. Tous les comportements ont de “bonnes” raisons, dans le sens où il y a une motivation, une cause. Même si nous ne comprenons pas cette raison de prime abord, nous pouvons tenter de reformuler le désir de l’enfant afin de mettre le doigt sur ce qu’il voulait vraiment.

« Tu avais vraiment envie de regarder cette émission à la télé ce soir. Tu en as marre, tu as l’impression que c’est toujours les autres qui choisissent le programme. »

« Tu voulais faire ci et ta soeur a fait ça. Maintenant, tu as l’air très fâché contre elle. Tu aurais envie de la chasser de la maison et qu’elle ne revienne plus jamais. »

« Tu voudrais ramener au moins un jouet du magasin et ça te fait vraiment envie. Tes larmes m’indiquent jusqu’à quel point tu as envie de ce jouet. »

4.Trouver des solutions

Une fois que nous avons identifié les besoins et désirs de l’enfant, que nous les lui avons reflété avec empathie, nous pouvons l’engager dans un processus de recherche de solutions. Nous pouvons commencer par lui demander s’il existe d’autres manières d’obtenir ce qu’il veut.

Nous pouvons également poser des questions qui vont guider vers une résolution du problème comme “Est-ce que tu serais intéressée de connaître ce que d’autres enfants ont fait dans la même situation que toi ?” ou “Est-ce que tu serais d’accord pour savoir ce que j’ai fait à ton âge dans la même situation que toi ?”. Il est également possible de rappeler à l’enfant qu’il a réussi dans le passé à surmonter des problèmes de ce type : “Rappelle-toi la dernière fois que J. ne voulait pas te prêter son ballon. Qu’est-ce que tu lui as dit ? Et ensuite, qu’est-ce qui s’est passé ?”.

5.Evaluer les conséquences des solutions

Une fois que quelques solutions ont été évoquées, il est possible de les évaluer afin de mesure leur niveau de pertinence :

  • que se passerait-il si tu faisais ça ? comment ton copain/ ta soeur se sentirait ? comment réagirait l’autre ? et toi, comment tu te sentirais ?
  • si la solution te semble OK, que vas-tu faire en premier ? qu’est-ce que tu vas dire à ton frère ? et ensuite ?

L’idée est d’amener l’enfant à envisager les conséquences de ses actes et à concevoir une stratégie pour passer à l’action. A cet effet, une fiche d’évaluation peut aider.

Fiche résolution de problème

6.Anticiper

Enfin, les enfants sont invités à réfléchir à ce qu’ils peuvent faire en prévention pour éviter de se trouver à nouveau dans cette situation problématique :

  • Imaginons que tu aies une autre chance de vivre cette situation à nouveau avec ta soeur. Que ferais-tu de différent cette fois ?
  • Si le problème se présente à nouveau dans le futur, que feras-tu ?

 

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Pour aller plus loin :

Fratrie & conflits : prendre au sérieux les enfants sans chercher à minimiser le problème ou à prendre parti pour l’un

La résolution de problème sur le bout des doigts : un outil pour trouver des solutions et rebondir face aux échecs